Quels changements depuis l'entrée en vigueur du décret 2019-1333 du 11 décembre 2019 ?

 

1. PREAMBULE


Le décret 201919-1333 du 31 décembre 2019 réformant la procédure civile a posé le principe d'une exécution provisoire de droit, sauf dispositions légales contraires ou si la décision rendue n'en dispose autrement. 

Ce principe est prévu à l'article 514 nouveau du CPC. 

Dès lors : 

- une décision qui ne comporterait aucune mention particulière sera, sauf exceptions prévues par la loi, exécutoire de droit par provision ; 

- ni l'appel, ni l'opposition, n'ont de caractère suspensif d'exécition ; 

- en matière sociale, les dispositions relatives au Conseil de Prud'hommes sont maintenues : l'exécution provisoire est facultative par principe, sauf cas d'exécution provisoire de droit prévu par la loi.

Par dérogation à l'article 514, en application des articles 514-1 et 514-2, le juge saisi d'un litige a la faculté d'écarter, d'office ou à la demande d’une partie, l’exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s’il estime qu’elle est incompatible avec la nature de l’affaire.

Sa décision doit être spécialement motivée. 

L'exécution provisoire de droit demeure en revanche irrévocable (sauf saisine du Premier Président en cas d'appel), sans possibilité pour le juge de l'écarter en tout ou partie, dans les cas suivants : 

- en matière de référé ;

- lorsque sont prescrites des mesures provisoires pour le cours de l’instance par le juge de la mise en état ;

- lorsque sont ordonnées des mesures conservatoires par le juge de la mise en état ;

- lorsqu’une provision est accordée au créancier par le juge de la mise en état ;

Dans les matières où elle n'est pas obligatoire, l'exécution provisoire sera ordonnée chaque fois que le juge l’estime nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire.

Le présent focus a vocation à évoquer : 

- les conditions d'arrêt de l'exécution provisoire depuis la réforme de la procédure civile ; 

la radiation de l'appel pour défaut d'exécution



2. L'ARRET DE L'EXECUTION PROVISOIRE

 

2.1. L'arrêt de l'exécution provisoire de droit


L'article 524 alinéa 3 du CPC en sa version antérieure à l'entrée en vigueur du décret du 11 décembre 2019 pose deux conditions : 

- la violation manifeste du principe du contradictoire ou de l'article ; 

- et l'existence de conséquences manifestement excessives qu'emporterait l'exécution de la décision dont appel

Il s'agit de conditions cumulatives


Désormais, l'article 514-3 nouveau du CPC dispose que l'arrêt de l'exécution provisoire est conditionné à la démonstration des conditions suivantes : 

- l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation de la décision dont appel ; 

- et l'existence de conséquences manifestement excessives qu'emporterait l'exécution de la décision dont appel

Là encore, les conditions sont cumulatives

Le texte ajoute que si la partie qui sollicite l'arrêt de l'exécution provisoire n'a présenté aucune observation en première instance de ce chef, sa demande ne sera recevable que si elle démontre, outre le moyen sérieux d'annulation ou de réformation, que l'exécution de la décision risquerait d'entraîner des conséquences manifestement excessives révélées postérieurement à la décision de première instance. 

Le praticien veillera à faire application de ces conditions uniquement si l'instance en question a été introduite devant le Tribunal depuis le 1er janvier 2020. 

Pour les instances antérieures à cette date, ce sont les conditions de l'ancien article 524 qui auront vocation à s'appliquer. 

 

2.2. L'arrêt de l'exécution provisoire facultative


Sous l'empire de l'article 514 alinéa 1er ancien du CPC, l'arrêt de l'exécution provisoire facultative est conditionné à la démonstration de deux critères :  

- Si l'exécution provisoire est interdite par la loi ; 

- ou si elle risque d'entraîner des conséquences manifestements excessives. 

Ces deux conditions sont alternatives

Désormais, l'article 517-1 nouveau du CPC, prévoit que l'exécution provisoire facultative peut être arrêtée aux conditions suivantes :  

Si elle est interdite par la loi ; 

- ou Lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation de la décision et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives, conditions qui sont alors cumulatives.

Là encore, le praticien sera vigilant quant à l'application de la loi dans le temps, les conditions prévues au nouvel article 517-1 ne trouvant à s'appliquer que si le Tribunal a été saisi depuis le 1er janvier 2020.
 

3. LA RADIATION DE L'APPEL POUR DEFAUT D'EXECUTION


Lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le Premier Président ou dès lors qu'il est saisi le Conseiller de la mise en état, peut en cas d'appel, décider à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire lorsque l'appelant ne justifie pas avoir exécuté ou avoir procédé à la consignation prévue par la décision dont appel, sauf à ce qu'il soit démontré l'existence de conséquences manifestement excessives ou une impossibilité pour l'appelant d'exécuter la décision.

La disposition relative à la radiation de l'appel pour défaut d'exécution a connu une réforme importante avec l'entrée en vigueur au 1er septembre 2017 du décret 2017-891 du 6 mai 2017.

Ce décret a posé l'obligation pour l'intimé de présenter sa demande de radiation avant l'expiration des délais prévus aux articles 905-2, 909, 910 et 911, à peine d'irrecevabilité relevée d'office. 

Depuis ce décret, la demande de radiation suspend les délais impartis à l'intimé par les articles 905-2, 909, 910 et 911 du CPC. 

La décision de radiation n'emporte pas suspension des délais impartis à l'appelant par les articles 905-2, 908 et 911. Elle interdit en revanche l'examen des appels principaux et incidents ou provoqués.

En dehors du changement de numérotation (l'article 526 est devenu l'article 524) et de quelques remaniement d'alinéa, le Décret 2019-1333 du 11 décembre 2019 entré en vigueur le 1er janvier 2020 n'a pas apporté au texte de modifications notoires. 

Le praticien continuera donc à veiller : 

- pour l'intimé, à présenter sa demande de radiation avant l'expiration des délais légaux qui lui sont impartis pour conclure et signifier ses conclusions ; 

- pour l'appelant, à conclure en dépit de la demande de radiation, dans les délais légaux qui lui sont impartis ; 

- quelle que soit la qualité, au délai de péremption de deux ans qui court à compter de la notification de la décision ordonnant la radiation, soit que la partie ait intérêt à la faire constater, soit qu'elle aît intérêt à interrompre le délai.