Le projet de réforme en cours sur la procédure du divorce par consentement mutuel sans passage devant le Juge est un recul des droits de l’enfant et de la primauté de son intérêt.

Si la réforme prévoit une négociation de la séparation et une convention enregistrée chez le Notaire, rien n’est prévu pour protéger l’intérêt des enfants du couple qui se sépare.

Quand les deux époux se sont mis d’accord sur les modalités de leur divorce, leur accord sera contresigné par l’avocat de chacune des parties, puis enregistré chez un Notaire.

Bien que prévu dans le projet de réforme, l’audition de l’enfant par le Juge ne pourra pas s’effectuer.

La réforme prévoit que, dans le cas où l’enfant mineur en fait la demande, il soit représenté par un juge.

Le Juge n’a pas vocation à représenter, mais à trancher un litige. Pourquoi, le Juge, pourquoi pas un psychologue, un pédo-psychiatre, voir même son instituteur, un des deux parents de son meilleur ami ?

Quant à l’article 388-1 du Code Civil, comment pourrait-il encore être appliqué dans le cadre d’un divorce par consentement mutuel ?

L’article 388-1 du Code Civil dispose que : « Dans toute procédure le concernant, le mineur capable de discernement peut, sans préjudice des dispositions prévoyant son intervention ou son consentement, être entendu par le juge ou, lorsque son intérêt le commande, par la personne désignée par le juge à cet effet.

Cette audition est de droit lorsque le mineur en fait la demande. Lorsque le mineur refuse d'être entendu, le juge apprécie le bien-fondé de ce refus. Il peut être entendu seul, avec un avocat ou une personne de son choix. Si ce choix n'apparaît pas conforme à l'intérêt du mineur, le juge peut procéder à la désignation d'une autre personne.

L'audition du mineur ne lui confère pas la qualité de partie à la procédure.

Le juge s'assure que le mineur a été informé de son droit à être entendu et à être assisté par un avocat. »

La réforme prévoit que la convention portera la mention de ce que le mineur a été informé par ses parents. Cette mention est imposée sous peine de nullité.

Ainsi, l’information de possibilité d’audition des enfants mineurs sera délivrée par les parents. Le texte proposé est justifié  de la manière suivante : Cette information sera délivrée par les parents qui savent quel langage employer pour être compris de l’enfant, et non par les Avocats. (sous amendement n° 398 adopté par l’Assemblée Nationale le 18 mai 2016) .

Mais comment l’enfant peut-il demander à un juge d’être entendu, alors que le Juge n’est pas saisi ?

Est-ce à dire que c’est à l’enfant de saisir le Juge ?

Mais quid alors de sa capacité à agir (et de sa qualité) ?

Devra t’on faire appel à la désignation d’un administrateur ad hoc ? Mais dans ce cas làs, la procédure qui devait être simplifiée va se retrouver dans les méandres procédurales de la désignation de l’administrateur ad hoc, en totale contradiction avec la simplification recherchée pour la procédure de divorce par consentement mutuel.

Les Avocats auront l’obligation de mentionner dans la convention de divorce que « le mineur a été informé par ses parents de sa possibilité à être entendu ». Mais les Avocats devront se fier à la simple bonne foi de leurs clients.

Et quelle sera la solution face à des parents qui opteraient (comme un certain nombre ont pu le souhaiter) d’une résidence alternée, non  pas des enfants, mais des parents exercée dans l’ancien domicile conjugal qui deviendrait alors le domicile des enfants ?

Les Magistrats, qui reçoivent des formations spécifiques sur ce qui est dans l’intérêt de l’enfant, par des professionnels de l’enfance et des psychologues, écartent dans la plus grande majorité des cas, cette solution qui ne peut être favorable à un bon développement de l’enfant.

Qui procèdera au contrôle des inventions que peuvent trouver certains parents trop bien attentionnés, qui peuvent se révéler être un véritable fardeau à porter pour l’enfant ?

L’intervention du Juge est un leurre, puisqu’il n’a pas de capacité à agir en justice, et ne peut pas, par conséquent créer une instance.

Les parents sont d’accord, donc aucun d’eux ne voudra saisir le Juge. Aucun d’eux ne souhaitera renoncer à son  sacré saint  « consentement mutuel.

En l’état, ce projet de loi est une hérésie totale et une négation flagrante du droit de l’enfant à faire valoir prévaloir ses intérêts dans la séparation de ses enfants.

 

Maître Florence VALLANSAN, Avocat au Barreau de TOULON

Le 31 mai 2016