Dans un arrêt du 15 mars 2023 (n° 20-23.694), publié au bulletin, la chambre sociale de la Cour de cassation a clarifié la question de la compétence du conseil de prud’hommes en cas d’action par laquelle un salarié sollicite la condamnation d’une entreprise utilisatrice au paiement de dommages-intérêts.

Un salarié a été engagé en qualité d’agent de maintenance par une société exploitant une activité d’entretien et de dépannage d’équipements de logements individuels dans des immeubles appartenant principalement à des bailleurs sociaux.

Cette société s’est vu attribuer le marché public de la maintenance des alimentations en eau chaude et froide sanitaire dans l’ensemble des logements individuels et collectifs du patrimoine de l’Office public de l'habitat des communes de l'Oise-Oise Habitat (l'Office public), établissement public à caractère industriel et commercial, exerçant une activité de bailleur social.

Le salarié a saisi la juridiction prud’homale de demandes indemnitaires dirigées contre son employeur et l’Office public pour obtenir notamment la réparation de préjudices liés à l’exposition à l’amiante.

L’Office public a formé un pourvoi en cassation compte tenu de ce que l’arrêt d’appel a retenu la compétence de la juridiction prud’homale pour connaître des demandes du salarié contre lui et le condamner solidairement à payer à ce dernier diverses sommes en réparation de préjudices résultant de l’exposition au risque d’amiante et de l’absence de formation.

La Cour de cassation devait ainsi trancher la question de la compétence du conseil de prud’hommes en cas d’action par laquelle un salarié sollicite la condamnation d’une entreprise utilisatrice au paiement de dommages-intérêts.

Elle commence par rappeler qu’aux termes de l’article L. 1411-1 du code du travail, le conseil de prud’hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s’élever à l’occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du présent code entre les employeurs ou leurs représentants et les salariés qu’ils emploient.   

Selon l’article L. 4111-5 du code du travail, pour l’application de la quatrième partie du code du travail, les travailleurs sont les salariés, y compris temporaires, et les stagiaires, ainsi que tout personne placée à quelque titre que ce soit sous l’autorité de l’employeur.

La Cour de cassation en conclut que relève de la compétence du conseil de prud’hommes l’action par laquelle un salarié sollicite la condamnation au paiement de dommages-intérêts de son employeur ou d’une entreprise utilisatrice, au sens de l’article R. 4511-1 du code du travail, dans l’établissement de laquelle s’exécute, en raison des manquements aux obligations, notamment de coordination, prévues par le code du travail.

L’article R. 4511-1 du code du travail prévoit que les dispositions relatives à la prévention des risques liés à certaines activités ou opérations s'appliquent au chef de l'entreprise utilisatrice et au chef de l'entreprise extérieure lorsqu'une entreprise extérieure fait intervenir des travailleurs pour exécuter ou participer à l'exécution d'une opération, quelle que soit sa nature, dans un établissement d'une entreprise utilisatrice, y compris dans ses dépendances ou chantiers.

C’est dans ce cadre que s’inscrivent les dispositions de l’article R. 4511-5 du code du travail aux termes desquelles le chef de l'entreprise utilisatrice assure la coordination générale des mesures de prévention qu'il prend et de celles que prennent l'ensemble des chefs des entreprises extérieures intervenant dans son établissement.

Dès lors que le salarié forme des demandes indemnitaires à l’égard de l’entreprise utilisatrice auquel il fait grief de ne pas avoir exécuté les obligations mises à sa charge par le code du travail, le conseil de prud’hommes est compétent pour connaître du litige.

Jérémy DUCLOS
Avocat au barreau de Versailles
Spécialiste en droit du travail

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