Que faire en cas d’impayés de loyer ? Bail commercial
Votre locataire ne vous règle plus ses loyers et vous souhaiteriez vous prévaloir de la clause résolutoire rédigée dans votre bail.
Généralement, les baux commerciaux stipulent une clause résolutoire qui prévoit qu’en cas de défaut de paiement du loyer et des charges, ou de toutes autres inexécutions contractuelles (la rédaction pouvant légèrement varier), le bailleur pourra se prévaloir de la condition résolutoire du bail et ce, de plein droit. Cette rédaction laisse souvent entendre aux bailleurs qu’ils pourraient se passer d’un juge pour « résilier » leur bail.
Or, le recours à un juge est nécessaire afin d’acter de l’acquisition de la clause résolutoire et surtout de ses conséquences, à savoir l’expulsion du preneur des locaux.
Mais avant d’envisager la procédure adaptée, il convient de déterminer les diligences préalables.
- Au préalable :
- Commandement de payer visant la clause résolutoire
Vous devez, conformément à l’article L145-41 du code de commerce, faire délivrer par un huissier de Justice un commandement de payer visant la clause résolutoire.
Si votre locataire manque à ses obligations contractuelles à un autre titre (réalisation de travaux sans votre autorisation, sous-location non autorisée, etc…), vous pourriez lui faire délivrer une sommation visant la clause résolutoire lui demandant de cesser les infractions au bail constatées.
L’acte doit donc viser la clause résolutoire et reproduire, sous peine de nullité, l’article L145-41 du code de commerce.
Il peut exister de simples commandements ou sommations de payer délivrés par voie d’huissier qui ne visent pas la clause résolutoire (ne reproduisent ainsi pas l’article L145-41 du code de commerce), qui visent ainsi juste à sommer votre locataire de régler sa dette locative sous un certain délai. Si vous ne souhaitez pas « menacer » votre locataire d’actionner par la suite la clause résolutoire, alors vous pouvez lui faire délivrer un simple commandement.
En revanche, dans le cas contraire, si vous ne souhaitez pas exclure l’hypothèse d’une résiliation du bail, vous avez tout intérêt à viser la clause résolutoire dès la délivrance du commandement.
Le commandement de payer visant la clause résolutoire doit laisser impérativement un délai d’un mois au preneur pour s’acquitter des sommes objet du commandement : ce délai est d’ordre public. Aussi, si le commandement mentionne un autre délai plus court par exemple, non seulement ce délai ne pourra pas s’appliquer, mais le commandement encourra la nullité.
- Et une saisie ?
En tant que bailleur, vous prévalant donc d’un contrat de louage d’immeuble, vous pouvez tenter une saisie conservatoire sans autorisation préalable du juge, conformément à l’article L511-2 du code des procédures civiles d’exécution.
Afin de tenter la saisie, il vous faudra les coordonnées bancaires du locataire. L’huissier n’a pas, en principe, dans le cadre d’une saisie conservatoire, la possibilité de rechercher les coordonnées bancaires du débiteur (comme dans le cadre de l’exécution d’une décision de justice).
Si la saisie est fructueuse, c’est-à-dire, permet de geler les sommes dues sur le compte bancaire du locataire, il vous faudra impérativement l’assigner devant le Tribunal avant l’expiration du délai d’un mois, et ce, afin d’obtenir une condamnation à l’encontre du débiteur, et débloquer les sommes saisies.
L’intérêt d’une saisie conservatoire est de vous garantir de la solvabilité du débiteur pour recouvrer votre créance. Le locataire peut quant à lui saisir le Juge de l’exécution (JEX) afin de contester la saisie.
En principe, même si votre position de créancier bailleur vous exonère de l’autorisation préalable du bailleur, vous devriez pouvoir justifier des menaces de recouvrement dans le cadre d’une contestation par le preneur devant le JEX ( art. L511-1 CPCE : Toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement. »).
Enfin, si vous disposez d’un bail notarié (dit authentique), alors vous pouvez directement tenter une saisie attribution en lieu et place d’une saisie conservatoire, c’est tout l’intérêt d’un bail notarié.
- A l’expiration du délai d’un mois :
Une fois le délai d’un mois expiré, vous pouvez saisir le Juge des référés du Tribunal Judiciaire compétent territorialement (déterminé par le lieu de situation des locaux) afin de solliciter l’acquisition de la clause résolutoire du bail, la condamnation aux sommes dues, et l’expulsion du preneur.
La procédure en référé est relativement courte par rapport à une procédure classique au fond.
Attention car si le preneur a fait opposition au préalable au commandement avant le délai d’un mois, alors, une procédure au fond sera enclenchée, ne vous permettant pas de saisir le Juge des référés. En toutes hypothèses, vous pourrez, dans le cadre d’une procédure au fond, solliciter la résiliation du bail et la condamnation à la dette locative.
Pour en revenir à la procédure de référé, le juge des référés ne peut pas statuer au fond : aussi, l’axe de défense d’un locataire sera de démontrer des contestations sérieuses qui échappent à sa compétence.
Le Juge peut ainsi considérer qu’il y a des contestations sérieuses, et écarter par exemple certaines sommes réclamées par le bailleur (appels de charges injustifiés, etc,..).
Dans tous les cas, le Tribunal peut:
- soit constater l’acquisition de la clause résolutoire et ordonner l’expulsion du preneur du local ;
- soit suspendre les effets de la clause résolutoire en accordant des délais (maximum sur 2 ans) pour apurer la dette, en sus des loyers courants, en prévoyant généralement que, dans l’hypothèse où une échéance n’est pas respectée à bonne date, la clause résolutoire sera cette fois automatiquement acquise et l’expulsion pourra avoir lieu. Aussi, si l’échéancier n’est pas respecté, ou le loyer courant n’est pas réglé à bonne date, vous pouvez mandater directement l’huissier pour procéder à l’expulsion. Le preneur est en quelque sorte en sursis.
NB : Dans le contexte de crise sanitaire ayant impacté les commerces dits de proximité, si votre locataire a été concerné par une période de fermeture, vous avez tout intérêt à distinguer les sommes dues au titre des périodes de fermeture (pouvant faire l’objet d’une contestation sérieuse) des autres sommes.
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