Le gouvernement portugais a créé le régime fiscal du résident non habituel (RNH) concernant l’impôt sur le revenu des personnes physiques (IRS), dans la perspective d’attirer au Portugal des experts professionnels non-résidents, dans des activités à haute valeur ajoutée ou de la propriété intellectuelle, industrielle ou know-how, ainsi que des bénéficiaires de pensions perçues à l’étranger. (Code fiscal de l’investissement approuvé par le décret-loi 249/2009, du 23 Septembre)

Le régime fiscal de faveur mis en place depuis 2009 concerne tout à la fois les retraités français que certains actifs qui souhaiteraient s’installer au Portugal.

-          S’agissant des retraités, une circulaire (n°9/2012 du 3 août 2012) rappelle que les retraités européens qui s’installent au Portugal bénéficient d’une exonération totale d’IRS (l’Impôt sur le revenu portugais), pendant 10 ans, sur leurs pensions de retraite.

Cette exonération dépend, en réalité, des termes de conventions fiscales bilatérales conclues entre les différents pays européens et le Portugal.

S’agissant de la France, il existe une convention fiscale signée le 14 janvier 1971 (Decreto-Lei n°105/71 26 de março) entre les deux pays laquelle prévoit que : « les pensions versées à un résident d’un Etat contractant au titre d’un emploi antérieur, ne sont imposables que dans cet Etat. » Autrement dit, les pensions de retraites perçues devrait être taxées dans le pays de résidence. Le Portugal a choisi de ne pas le faire justement pour attirer à lui des retraités à fort pouvoir d’achat et ainsi relancer son économie.

En revanche, sont exclus de ce bénéfice les fonctionnaires retraités français qui perçoivent leur pension de l’Etat français ou d’une collectivité locale puisque la convention fiscale signée le 14 janvier 1971 prévoit que l’Etat français taxe ces retraites même si le bénéficiaire a sa résidence dans l’autre état contractant.

-          S’agissant des actifs qui souhaiteraient s’installer au Portugal pour y exercer une activité professionnelle, des avantages fiscaux sont également prévus et notamment une taxation à taux fixe à 20 % au titre de l’impôt sur le revenu à condition de remplir un certain nombre de critères bien définis.

Dans les deux cas, pour bénéficier des avantages fiscaux, il est nécessaire de solliciter le bénéfice du statut de résident non habituel auprès des autorités fiscales du Portugal.

Il est à noter que le bénéfice du statut s’applique aussi à des personnes de nationalité portugaise vivant en France et qui souhaiteraient retourner dans leur pays.

1- QUELLES SONT LES DEMARCHES POUR OBTENIR LE STATUT DE « RESIDENT NON HABITUEL » ?

Pour bénéficier de ce régime, il faut tout d’abord être résident au Portugal au sens fiscal.

L’intéressé doit réunir les conditions suivantes :

- ne pas avoir été résident fiscal portugais au cours des 5 dernières années,

- et résider plus de 183 jours par an (suivis ou non) au Portugal durant l’année de la demande d’application de ce régime fiscal,

- Ou si l’intéressé a séjourné moins de temps, il doit disposer sur le territoire portugais au 31 décembre de l’année en cause, d’une habitation dans des conditions qui permettent de supposer l’intention actuelle de la maintenir et de l’occuper comme résidence habituelle. Il n’est pas nécessaire d’acheter un bien immobilier. Une location peut être prise en compte.

Une fois s’être inscrit comme résident fiscal auprès du service des finances et obtenu son NIF (Numéro d’identification fiscale), (plus connu sous le terme : « contribuinte), l’intéressé devra ensuite demander le statut de Résident non Habituel « RNH » aux services fiscaux portugais (www.portaldasfinancas.gov.pt), et ce au plus tard le 31 mars de l’année qui suit l’emménagement au Portugal.

Autrement dit, pour bénéficier du statut, il faut d’abord être considéré comme résident fiscal, pour ensuite demander à bénéficier des avantages fiscaux.

Il convient d’avoir à l’esprit que cette demande de bénéfice du statut de Résident non habituel n’est pas un droit et que l’attribution du statut n’est pas automatique. Elle est soumise, au cas par cas, à l’appréciation des autorités fiscales portugaises. Le délai de traitement de la demande prend en moyenne 6 mois.

2- LE DEPART N’EMPECHERA PAS DE CONSERVER DES LIENS AVEC L’ADMINISTRATON FISCALE FRANCAISE :

L’application du régime de faveur repose sur une résidence effective de l’intéressé au Portugal.

En conséquence, l’intéressé devra prévenir l’administration fiscale française de son départ et de son changement de résidence. Le candidat au départ devra veiller à ce que le centre de ses intérêts économiques ne se trouvent plus en France. (Famille proche, comptes bancaires, investissements, biens immobiliers…)

Il faudra bien entendu effectuer sa déclaration de revenu en France l’année du départ et l’effectuer chaque année notamment si des revenus de source française (exp : intérêts, dividendes, revenus foncier,..) sont perçus.

Enfin, il ne faudra pas perdre de vue l’existence de « l’Exit Tax » laquelle consiste à taxer les plus-values latentes des contribuables transférant leur domicile hors de France. Le champ d’application du dispositif concernant notamment les droits sociaux et valeurs mobilières relevant du régime d’imposition des plus-values mobilières des particuliers. Le principe étant que la plus-value est réalisée le jour du départ.

3- LES AVANTAGES DU STATUT DE RESIDENT NON HABITUEL SONT LIMITES DANS LE TEMPS :

Le citoyen qui obtient le bénéfice du statut de résident non habituel, obtient le droit d’être imposé comme tel durant une période de 10 ans consécutifs à partir de l’année où il s’est inscrit comme résident en territoire portugais.

Il devra chaque année faire une déclaration de revenu au Portugal et bien entendu continuer à résider sur le territoire portugais au moins 183 jours par an.

A l’issue de cette période de 10 ans, les bénéficiaires de ce régime seront assujettis à une imposition selon les règles de droit commun prévues par le code de l’impôt sur le revenu des personnes physiques ( codigo do imposto sobre rendimento das pessoas singulares CIRS).

L’impôt sur le Revenu au Portugal est comme en France progressif. Il peut aller jusqu’à un taux marginal de 48 % auquel s’ajoute une surtaxe de 3.5% ainsi qu’une taxe additionnelle (ces dernières variant chaque année avec l’adoption de la loi de finance et ayant été mis en place après l’adoption du pacte de stabilité exigé par les instances européennes).

3-1 :  Pour les retraités qui choisissent de s'installer au Portugal après leur vie professionnelle et ayant obtenu le statut de résident non habituel :

Les pensions de retraite seront totalement exonérées au Portugal et non imposables en France. (Sauf pour les fonctionnaires retraités français).  

Les revenus dits passifs (intérêts, dividendes, redevances, gains en capital, revenus immobiliers) de source étrangère perçus par les résidents non habituels sont également exonérés d'impôt au Portugal à condition qu’ils puissent être imposés dans l’Etat à leur source en application des règles prévues par la convention fiscale relative à l’élimination des doubles impositions.

Quant à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), celui-ci n'existe pas au Portugal. Même si le Portugal ne connaît pas l’impôt sur la fortune, un français résidant au Portugal restera assujetti à l’ISF, si le patrimoine conservé en France dépasse le seuil de 1,3 million d’euros. (L’épargne financière des non-résidents n'est pas taxée).  

3-2 : Pour les actifs exerçant une activité considérée comme ayant une haute valeur ajoutée :

Pour ceux des actifs qui voudraient s’installer et exercer une activité professionnelle au Portugal, la reconnaissance du statut RNH prévoit l’existence d’un taux spécifique réduit de 20 % (auquel s’ajoutera une surtaxe de 3.5%) sur les revenus salariaux de source portugaise ou issus d’une profession indépendante lorsque ceux-ci se rapportent à une activité à forte valeur ajoutée telle qu’établie par une ordonnance du Ministre de finances.

Cela concerne essentiellement les activités scientifiques, artistiques ou techniques. A titre d’exemple on pourra citer les activités suivantes : architectes, ingénieurs, artistes, acteurs, musiciens, activité d’audit, médecins, dentistes, professeurs universitaires, psychologues, professions libérales, cadres supérieurs, chercheurs, administrateurs ou gestionnaires de sociétés, etc…

En définitive : 

Les dispositions prises par les autorités portugaises peuvent être, de prime abord, attrayantes. Les choses sont moins simples qu’il n’y paraît.

Les questions à se poser ne se limitent pas qu’à l’aspect fiscal car d’autres points restent à éclaircir : le droit applicable en cas de décès (succession internationale), la sécurité sociale, le sort du contrat de mariage etc…

A suivre…

Louis-Philippe BIRRA

Avocat au Barreau de Rouen