Par un arrêt rendu le 12 septembre 2018, la chambre sociale de la Cour de cassation (Cass. soc., 12 septembre 2018, nº 16-11.690 FS-PB) estime que les propos d’une salariée sur son compte Facebook accessibles à un groupe fermé composé de quatorze personnes, de sorte qu’ils relevaient d’une conversation de nature privée, ne caractérisent pas une faute grave ni même une cause réelle et sérieuse de licenciement. 

 

Les faits de l’espèce

Une salariée qui exerçait les fonctions de négociatrice immobilier a été licenciée par lettre du 3 mars 2009 aux deux motifs suivants:

  • Elle avait pris des congés du 5 au 11 février 2009 sans autorisation de l'employeur ;
  • Elle avait tenu des propos injurieux accompagnés de menaces sur Facebook.

Il lui était fait grief d’avoir proféré des propos injurieux et offensants à l'égard de son employeur ; ce qui résultait d’un procès-verbal d’huissier constatant que la salariée a adhéré à un groupe sur Facebook intitulé « Extermination des directrices chieuses ».

L’employeur considérait qu'il établissait ainsi des faits constitutifs d'une faute grave.

La salariée a estimé que son licenciement était abusif et a saisi le Conseil de Prud'hommes de Meaux  qui a fait droit à ses demandes et a condamné l’employeur à lui verser diverses sommes, par jugement rendu le 9 février 2013.

La question se posait de savoir si cette salariée avait commis une faute justifiant son licenciement pour faute grave et à tout le moins, son licenciement pour une cause réelle et sérieuse.

 

La cour d’appel de Paris estime que le licenciement est injustifié

Confirmant le jugement entrepris, la cour décide dans un arrêt du 03 décembre 2015 que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La seule existence de propos injurieux et calomnieux sur le réseau social ne suffit pas, en elle-même, à justifier le licenciement d'un salarié. Il incombe à l'employeur de démontrer le caractère public des correspondances litigieuses.

Elle considère, qu’en l’espèce, les propos tenus la salariée sur Facebook sont d'ordre privé dans la mesure où les termes employés n'étaient accessibles qu'à des personnes agréées par le titulaire du compte et fort peu nombreuses, à savoir un groupe fermé composé de 14 personnes.

Dans ce cadre, ses propos relevaient d'une conversation de nature privée et ne sauraient pour cette raison constituer un motif de licenciement.

 

La Cour de cassation confirme la décision de la cour d’appel

La Haute juridiction approuve les juges du fond, relevant la diffusion restreinte à un cercle privé et donc le caractère privé des échanges :

 « Mais attendu qu’après avoir constaté que les propos litigieux avaient été diffusés sur le compte ouvert par la salariée sur le site facebook et qu’ils n’avaient été accessibles qu’à des personnes agréées par cette dernière et peu nombreuses, à savoir un groupe fermé composé de quatorze personnes, de sorte qu’ils relevaient d’une conversation de nature privée, la cour d’appel a pu retenir que ces propos ne caractérisaient pas une faute grave ; qu’exerçant le pouvoir qu’elle tient de l’article L. 1235-1 du code du travail, elle a décidé que le grief ne constituait pas une cause réelle et sérieuse de licenciement.»

 

Conclusion

Dès lors que l’utilisateur Facebook veille à restreindre le champ de diffusion de ses propos  en utilisant les paramétrages de confidentialité qui lui sont proposés, l’employeur ne peut faire usage de son pouvoir disciplinaire même s’il considère qu’il y a abus de la liberté d’expression.

Les propos en cause sont considérés comme ayant un caractère privé ; ils relèvent d’une conversation privée et ne peuvent donc caractériser une quelconque faute susceptible de justifier un éventuel licenciement.