Le travail, c’est la santé ?
En droit social, il existe des notions proches relevant du droit du travail et du droit de la sécurité sociale. Des notions qui sont, en elles-mêmes complexes, et dont l’articulation l’est tout autant.
C’est le cas de la maladie professionnelle.
Par exemple : ce n’est pas parce que le médecin traitant a mentionné « dépression réactionnelle d’origine professionnelle » sur l’arrêt de travail qu’il s’agit d’une maladie professionnelle au sens juridique du terme. Ou encore, ce n’est pas parce qu’une pathologie n’a pas été reconnue comme ayant une origine professionnelle par la CPAM, que le salarié n’est pas bienfondé à solliciter une indemnisation devant le Conseil de prud’hommes au motif que les manquements de son employeur sont à l’origine de la dégradation de son état de santé.
Pour tenter d’y voir plus clair, je vous propose un focus en trois temps sur la maladie professionnelle.
1. Qu’est-ce-qu’une maladie professionnelle et à quoi sert-elle ?
‣ La maladie professionnelle, qu’est-ce-que c’est ?
La maladie professionnelle peut être définie comme une détérioration de l’état de santé d’un salarié ayant un lien direct avec son activité professionnelle ou ses conditions de travail.
Pour que la maladie soit « officiellement » professionnelle, elle doit être reconnue comme telle par la CPAM au terme d’une procédure spécifique qui varie selon que :
- la maladie contractée par le salarié est recensée dans un tableau annexée au Code de la sécurité sociale ;
- la maladie est dite “hors tableau”.
‣ Quel est l’intérêt de faire reconnaitre une maladie professionnelle ?
L’intérêt de faire reconnaître une maladie professionnelle est multiple.
Pendant l’arrêt de travail.
Déjà, le salarié bénéficie d’une meilleure indemnisation de son arrêt :
- Prise en charge à 100% des frais médicaux, chirurgicaux, d’analyse ou de pharmacie
- Dispense d’avance de frais ;
- Indemnités Journalière de Sécurité Sociale plus élevées et versées sans carence ;
- Indemnisation complémentaire versée par l’employeur sans carence (condition : 1 an d’ancienneté).
Aussi, pendant la durée de l’arrêt de travail pour maladie professionnelle, le salarié est protégé contre le licenciement. L’employeur ne peut licencier le salarié qu’en cas de faute grave ou d’impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la maladie (C. trav., art. L.1226-9).
En cas de séquelles.
Au terme de la période de soins, c’est-à-dire lorsque l’état de santé est consolidé, la CPAM fixe un taux d’incapacité permanente (taux d’IPP) lequel ouvre droit :
- Si le taux est inférieur à 10 % : au versement d’une indemnisation sous forme de capital ;
- Si le taux est au moins égal à 10 % : au versement d’une rente.
En cas d’inaptitude.
Si, à l’issue de l’arrêt pour maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte, il peut percevoir, pendant la procédure, une indemnité temporaire d’inaptitude.
Lorsqu’il est licencié pour ce motif, il bénéficie d’une meilleure indemnisation. Il perçoit :
- Une indemnité égale à l'indemnité compensatrice de préavis ;
- Une indemnité de licenciement égale au double de l’indemnité légale de licenciement (sauf indemnité conventionnelle plus favorable).
L’action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur est ouverte au salarié, victime d’une maladie professionnelle. Dans ce cadre, s’il démontre que l’employeur avait connaissance d’un danger pour sa santé et sa sécurité et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en protéger, il pourra solliciter une majoration de sa rente incapacité.
2. Quelle est la procédure pour faire reconnaître une maladie professionnelle ?
‣ Les tableaux de maladie professionnelle, qu’est-ce-que c’est ?
Ces tableaux désignent plusieurs dizaines de pathologies, qui sont présumées être d’origine professionnelle, dès lors que la situation du salarié satisfait à trois conditions cumulatives :
- Condition médicale : symptômes ou lésions pathologiques que doit présenter le salarié ;
- Condition administrative : délai de prise en charge = délai maximal entre la constatation de l'affection et la date à laquelle le salarié a cessé d'être exposé au risque ;
- Condition professionnelle : travaux susceptibles de provoquer l'affection en cause que doit avoir effectué le salarié.
‣ Quelle démarcher effectuer pour faire reconnaître une maladie professionnelle ?
C’est au salarié qu’il appartient d’engager les démarches. Pour ce faire, il doit :
- Consulter son médecin traitant, afin qu’il établisse un certificat médical initial faisant mention de l’origine professionnelle de la pathologie, qu’il lui remettra en deux exemplaires ;
- Adresser à la CPAM le formulaire de déclaration de maladie professionnelle accompagné des pièces jointes, dont le certificat médical initial.
‣ Quel est le délai pour faire reconnaître une maladie professionnelle ?
Le salarié doit agir, c’est-à-dire déclarer la maladie professionnelle (envoyer le dossier à la CPAM), dans un délai de deux ans :
- A compter de la date du certificat médical initial ;
- Ou de la date de cessation d’activité si elle est postérieure.
‣ Comment se déroule la procédure de reconnaissance d’une maladie professionnelle auprès de la CPAM ?
A réception de la demande, la CPAM procède à une instruction = elle vérifie que les trois conditions (médicale, administrative et surtout professionnelle) sont remplies.
Dans ce cadre, le salarié devra répondre à un questionnaire, il disposera d’un droit de consultation de son dossier, ainsi que de la possibilité de formuler des observations.
La CPAM dispose d’un délai de 120 jours francs pour statuer sur le caractère professionnel de la maladie. Le silence de la CPAM au terme de ce délai vaut reconnaissance implicite du caractère professionnel de la maladie. (CSS, art. R. 441-18).
Attention, s’il s’avère en cours d’instruction que l’une des conditions du tableau n’est pas remplie, la procédure de reconnaissance se poursuit mais le salarié doit alors démontrer que son travail habituel a concouru (même parmi d'autres causes) directement à la survenance de sa maladie.
En pareille situation, la CPAM se prononcera après avoir recueilli l’avis d’un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRMP).
En fonction de la décision (reconnaissance ou rejet), des voies de recours sont ouvertes à l’assuré.
‣ Faut-il prendre un avocat pour déclarer une maladie professionnelle ?
L’accompagnement d’un avocat en droit de la sécurité sociale n’est pas obligatoire pour effectuer cette démarche. En revanche, il est fortement conseillé.
En effet, l’avocat vous aidera à structurer votre dossier afin de maximiser les chances que votre demande aboutisse favorablement. Par ailleurs, lorsque la CPAM refuse de reconnaître la maladie professionnelle, un recours est ouvert au salarié mais dont le délai est bref. L’assistance d’un avocat dans ce cadre permet d’éviter de former un recours hors délai qui aurait pour conséquence d’éteindre toute chance de voir la maladie professionnelle reconnue.
3. Quelle est la procédure pour faire reconnaître une maladie professionnelle “hors tableau” ?
‣ Qu’est-ce-qu’une maladie professionnelle “hors tableau” ?
Ils s’agit de toutes les pathologies qui ne sont pas désignées dans les tableaux de maladie professionnelles annexés au Code de la sécurité sociale.
Par exemple : le burn-out, la dépression réactionnelle etc.
Ces dernières peuvent néanmoins être reconnues par la CPAM au titre des maladies professionnelles dès lors qu’il est démontré qu’ elle :
- a été essentiellement et directement causée par le travail habituel ;
- a entrainé une incapacité permanente d’au moins 25%.
‣ Quelle démarcher effectuer pour faire reconnaître une maladie professionnelle “hors tableau” ?
Les démarches sont les mêmes que pour les maladies désignées dans les tableaux. C’est au salarié qu’il appartient d’engager les démarches. Pour ce faire, il doit :
- Consulter son médecin traitant, afin qu’il établisse un certificat médical initial faisant mention de l’origine professionnelle de la pathologie, qu’il lui remettra en deux exemplaires ;
- Adresser à la CPAM le formulaire de déclaration de maladie professionnelle accompagné des pièces jointes, dont le certificat médical initial.
‣ Quel est le délai pour faire reconnaître une maladie professionnelle “hors tableau”?
Là aussi, le salarié doit agir, c’est-à-dire déclarer la maladie professionnelle (envoyer le dossier à la CPAM), dans un délai de deux ans :
- A compter de la date du certificat médical initial ;
- Ou de la date de cessation d’activité si elle est postérieure.
‣ Comment se déroule la procédure de reconnaissance d’une maladie professionnelle “hors tableau” ?
A réception de la demande, la CPAM procède à une instruction médico-administrative dans les mêmes conditions que pour une maladie désignée dans un tableau.
Après cette enquête, la CPAM transfère le dossier au Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP).
Le CRRMP doit lui-même solliciter l’avis du médecin du travail, puis rendre son avis motivé dans un délai de 110 jours francs à compter de sa saisine, sauf s’il décide d’engager des examens complémentaire, qui auront pour effet de prolonger ce délai.
L’avis du CRRMP s’impose à la CPAM.
Là aussi, la procédure est contradictoire, et le salarié doit être informé des points susceptibles de lui faire grief au cours de cette procédure d’instruction.
Le salarié pourra alors déposer des observations, qui devront être annexées au dossier.
Ces droits à information et à observation sont enfermés dans des délais stricts.
Une fois la décision de reconnaissance ou de rejet notifiée, le salarié dispose de voies de recours.
‣ Faut-il prendre un avocat pour déclarer une maladie professionnelle “hors tableau” ?
Comme pour la maladie professionnelle désignée dans un tableau, l’accompagnement d’un avocat en droit de la sécurité sociale n’est pas obligatoire pour effectuer cette démarche, mais il est dans ce cas plus que recommandé puisque l’origine professionnelle de la maladie n’est pas présumé.
En d’autres termes, c’est au salarié d’établir, c’est-à-dire démontrer, le lien direct entre sa pathologie et son travail. L’avocat permettra également de répondre utilement aux observations éventuellement formulées par l’employeur, tout en prenant soin de rédiger stratégiquement ses propres observations.
Aussi, en cas de rejet de la demande, l’avocat pourra efficacement vous accompagner dans les voies de recours ouvertes.
Pour toute question, contactez Maître Marine Pouzadoux, avocat en droit de la sécurité sociale à Toulouse.
Article rédigé sans l'aide de l'IA.
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