Cour de cassation, 2e chambre civile, 20 Janvier 2022 – n° 20-13.245

La deuxième chambre civile revient sur les contours de la faute dolosive et sur l'opposabilité d'une clause d'exclusion prévue dans un contrat d'assurance.

Les faits étaient les suivants :

Une personne a mis fin à ses jours en se positionnant sur une voie de chemin de fer à un passage à niveau.

La SNCF arguant d'un préjudice a assigné l'assureur de cette personne en indemnisation.

L'assureur s'est opposé cette demande en invoquant, d'une part, l'article L. 113-1 du code des assurances et la commission par l'assurée d'une faute dolosive, d'autre part, l'application d'une clause d'exclusion de garantie prévue au contrat d'assurance.

Sur la faute dolosive

Au titre de la faute dolosive, la Cour d'appel de Douai a débouté la SNCF de sa demande d'indemnisation et de sa demande de garantie à l'encontre de l'assureur, jugeant que le choix délibéré de l'assuré avait eu pour effet de rendre inéluctable la réalisation du dommage pour la SNCF et de faire disparaître l'aléa attaché à la couverture du risque assuré.

La Cour de cassation a censuré la Cour d'appel de Douai au visa de l'article L113-1 du Code des assurances en rappelant que  "la faute dolosive s'entend d'un acte délibéré de l'assuré commis avec la conscience du caractère inéluctable de ses conséquences dommageables ".

Elle reproche à la Cour d'appel de Douai de ne pas avoir caractérisé la conscience que l'assuré avait du caractère inéluctable des conséquences dommageables de son geste.

Cette jurisprudence s'inscrit dans le prolongement des arrêts des 20 mai 2020 et 10 novembre 2021 rendus par la même chambre de la Cour de cassation (Cass, 2e viv , 20 mai 2020 n°19-14306 et  Cass. 2e civ., 10 nov. 2021, n° 19-12.659).

La faute dolosive se définit ainsi par deux caractères :

-     Un manquement délibéré de l’assuré à ses obligations et non une simple négligence ;

-     Un effet de ce manquement sur l’aléa consistant en sa disparition totale et non seulement en une diminution.

Sur les conditions d'opposabilité de la clause d'exclusion prévue au contrat d'assurance 

Le contrat d'assurance contenait une clause d'exclusion aux termes de laquelle étaient exclus de la garantie « sauf application de l'article L. 121-2 du code, les dommages intentionnellement causés ou provoqués directement, ou avec complicité, par [(l'assuré ()] ».

La Cour d'appel de Douai a retenu que l'absence de définition contractuelle de la cause ou de la provocation n'excluait pas la bonne compréhension d'une volonté de l'assureur d'exclure les dommages résultant d'un fait volontaire de l'assurée, qu'ils aient été voulus par leur auteur qui les avait ainsi causés intentionnellement ou qu'ils en soient la conséquence involontaire pour leur auteur, qui les avait ainsi provoqués directement.

La Cour de cassation a également censuré la Cour d'appel de Douai au visa de l'article L113-1 du Code des assurances retenant qu"[...]En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a procédé à l'interprétation d'une clause d'exclusion ambigüe, ce dont il résulte qu'elle n'était ni formelle ni limitée, a violé le texte susvisé."

La Cour de cassation confirme sa jurisprudence exigeante envers les assureurs, au titre des conditons de validité des clauses d'exclusion de garantie prévues dans les contrats d'assurance, notamment au titre double critère imposé par l'article L113-1 du code des assurances, le caractère formel et limité de la clause.

La clause doit être suffisamment explicite pour que l’assuré puisse connaître l’étendue de la garantie, et la nécessité d'interprétation d'une telle clause ne répond pas aux critères précités, de sorte qu'elle ne peut recevoir application. ( Déjà en ce sens Civ 2e 26 novembre 2020 n° 19-16435).