En vue d’organiser à l’avance le partage de ses biens, le disposant peut nommer par testament un ou plusieurs exécuteurs testamentaires, chargés d’en faire respecter les termes (Code civil, article 1028)

Les termes "exécuteur testamentaire" peuvent paraître trompeurs, car on pourrait déduire à leur simple lecture que l’exécuteur est celui qui exécutera le testament. Or, la réalité est bien différente, car l’exécuteur testamentaire est avant tout chargé de surveiller l’exécution des dispositions testamentaires par ceux à qui elle incombe, c’est-à-dire les héritiers. Toutefois, dans certains cas, son rôle ne se limitera pas à un simple contrôle et il participera activement au règlement de la succession.

L’exécuteur testamentaire peut donc être défini comme la personne nommée par le testateur, chargée par lui de surveiller l’exécution de ses dernières volontés. Il peut être amené à participer lui-même à cette exécution du testament.

En effet, s’agissant des dispositions de dernières volontés, par hypothèse, l’auteur de ces obligations n’est plus là lorsqu’il s’agit de les exécuter. Le risque d’inexécution est donc accru. Il l’est certes pour les dispositions patrimoniales, mais il l’est plus encore pour les dispositions extrapatrimoniales puisqu’en dehors de la mémoire du défunt, elles ne profitent à personne.

Aussi, depuis très longtemps, les systèmes juridiques, conscients du risque que ces dernières volontés demeurent lettre morte, offrent aux sujets de droit la possibilité de confier à un tiers la mission de surveiller l’exécution du testament, voire de l’exécuter lui-même.

L’exécution testamentaire semble poursuivre sa léthargie, n’ayant qu’un succès limité et devant en plus subir la concurrence du mandat à effet posthume… La question se pose de sa place inconfortable dans le règlement des successions, notamment par les difficultés à en préciser la nature dans un système de continuation de la personne.

En outre, en fin de mission l’exécuteur testamentaire, titulaire de pouvoirs sur les biens d’autrui, doit rendre des comptes aux héritiers. La mission de l’exécuteur testamentaire est en principe gratuit, toutefois il peut arriver que le testateur ait prévu une disposition en sa faveur laquelle peut recevoir plusieurs qualifications. La responsabilité de l’exécuteur testamentaire, comme celle d’un mandataire, est appréciée avec plus ou moins de rigueur selon qu’elle a fait l’objet ou non d’une rémunération.

 

  1. Une personne désignée par le testateur
  2. La nomination de l’exécuteur testamentaire

Tout comme les anciens textes du Code civil, la réforme adoptée en 2006 est muette quant aux conditions de forme que doit remplir la désignation par le de cujus de son exécuteur testamentaire. Sans doute, tant en 1804 qu’en 2006, il semblait évident que cette nomination, en tant que disposition de dernière volonté, devait prendre les formes habituelles en la matière.

Quoi de plus naturel que de désigner un exécuteur testamentaire dans le testament qu’il sera chargé d’exécuter ! Les règles solennelles du testament s’appliquent à la nomination de l’exécuteur testamentaire. Cette nomination pourra prendre la forme d’un testament olographe, mystique, authentique ou international. Nommé par le testateur, l’exécuteur testamentaire a le choix d’accepter ou non sa mission (Code civil, article 1025).

Les droits et les obligations qui sont les siens paraissent de nature strictement personnelle puisque son décès interdirait que ces propres héritiers poursuivent son action. Sa fonction est directement liée à la validité et à l’efficacité du testament qui le nomme. Il paraît logique, à cet égard, qu’il soit en charge de soutenir les arguments de l’efficacité du titre dont il tient son pouvoir (Code civil, article 1028 et 1029).

Pour être valable, la nomination d’un exécuteur testamentaire n’est pas assujettie à l’emploi de termes obligatoires. Si l’utilisation des termes « exécuteur testamentaire » lève le doute sur la qualité de la personne désignée, l’attribution de cette mission peut aussi résulter d’une périphrase par laquelle le testateur confie à une personne tout simplement la charge de surveiller, d’exécuter le testament ou d’accomplir telle ou telle tâche (la qualité d’exécuteur testamentaire a pu être retenue pour une personne chargée de distribuer aux « pauvres » tout ou partie de l’actif successoral.

Une nomination "intuitu personae"– La mission d’exécuteur testamentaire est, depuis son origine, conçue comme un service d’ami en raison de la grande confiance qu’elle implique. Aussi, elle est à l’évidence conférée en considération de la personne choisie. Cette mission et les pouvoirs corrélatifs ne sauraient donc faire l’objet d’une délégation à un tiers, sauf si le testateur l’autorise expressément. De même, l’exécuteur testamentaire ne pourrait, à son tour, transférer cette charge à son décès à une tierce personne, car le décès de l’exécuteur met instantanément fin à sa mission (Code civil, article 1025, al. 2). Par ailleurs, il peut arriver que la personne choisie soit déterminée en fonction des qualités ou fonctions qu’il occupe : "le président de la Chambre des notaires", le "comptable de telle entreprise". Dans ces hypothèses, l’intuitu personae s’estompe et le service d’ami est remplacé par un service professionnel. Dans ce cas, on peut penser que la personne qui a accepté la mission aurait droit à une rémunération même si le testateur ne l’a pas prévue.

  1. Mission de l’exécuteur testamentaire

Ce pouvoir a été redimensionné : ayant la faculté de procéder à l’inventaire de la succession même hors la présence des héritiers, mais après les avoir appelés, il dispose principalement du pouvoir de vendre les actifs mobiliers et, dans certains cas, immobiliers (Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 15 mai 2008, 06-19.535).

Soutien et interprétation du testament – L’exécuteur testamentaire, en cas de litige sur la validité du testament, doit intervenir au procès. Ou bien il est mis directement en cause par les parties, ou bien, de lui-même, il intervient à la procédure. Cette participation à la procédure est une obligation pour lui et, s’il n’intervient pas, sa responsabilité pourrait être engagée. Son rôle est de permettre, en tant "qu’homme de confiance du défunt", d’éclairer le juge dans la résolution du litige qui peut porter sur la validité du testament (respect des conditions de forme ou de fond) ou sur son interprétation.

C’est surtout dans le domaine des successions sans héritier réservataire que ses pouvoirs se trouvent sensiblement augmentés. En effet, l’article 1030-1 du Code civil, donne à l’exécuteur testamentaire la faculté de vendre tout ou partie des immeubles de la succession. Il pourra placer les capitaux, payer les dettes et charges de la succession. Les héritiers auront néanmoins dû être préalablement avertis. On suppose que cet avertissement est indépendant de leur option successorale quand la vente intervient à cette période. Mais il faut conclure du caractère général du texte que cette faculté de vente pourrait intervenir après acceptation par les héritiers et ne relèverait que de la magistrature de l’exécuteur testamentaire. Voilà bien un pouvoir très étendu par rapport à la législation antérieure.

Poursuite de l’exécution du testament – L’article 1028 du Code civil prévoit que l’exécuteur est mis en cause en cas de contestation sur l’exécution du testament (Code civil article 1028, al. 1er) et que, dans tous les cas, il doit intervenir pour exiger l’exécution des dispositions litigieuses. Le droit pour l’exécuteur testamentaire d’agir en justice est un des pouvoirs essentiels de l’exécuteur testamentaire, sinon il serait réduit à être un défenseur sans aucune arme.

  1. Responsabilité de l’exécuteur testamentaire
  2. Responsabilité civile de l’exécuteur testamentaire

À l’image du mandataire, l’exécuteur testamentaire s’engage personnellement dans sa mission et, en cas de faute préjudiciable aux héritiers, aux légataires voire aux créanciers successoraux, il devra en répondre et, éventuellement, verser à ses victimes des dommages et intérêts (Cour de cassation, Chambre civile 1, du 12 juin 1990, 87-17.115). Cette responsabilité sera appréciée avec plus de souplesse si la mission est gratuite que si elle est rémunérée (Code civil, article 1992, al. 2 auquel renvoie Code civil, article 1034).

Dans la plupart des cas, cette mise en cause de l’exécuteur interviendra en fin de mission après examen de sa reddition de comptes. Conformément aux principes directeurs du droit de la responsabilité, cette mise en cause de l’exécuteur nécessite l’existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre les deux.

  1. Responsabilité pénale de l’exécuteur testamentaire

L’exécuteur testamentaire indélicat qui s’approprierait des biens qu’il détient en vertu de ses pouvoirs, encourt les sanctions de l’abus de confiance (Code pénal, article 314-1, la peine est de trois ans d’emprisonnement et de 375 000 € d’amende) et, éventuellement, du vol pour les autres biens (Code pénal article 311, la peine est de trois ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende). Ces sanctions peuvent être complétées par des sanctions professionnelles et disciplinaires si l’exécuteur testamentaire exerce une profession soumise à une déontologie propre.

SOURCES :