Lors de sa mission d’avocat , Myriam DELONCA accompagne parfois des clients vers une demande de changement d’état civil, notamment dans le cas d’un changement de sexe lors d’une situation de transsexualisme.
Il s’agit au-delà d’une situation personnelle accompagnée par des psychologues et des médecins également d’une situation juridique. Afin d’éviter au mieux les écueils de la procédure judiciaire qui peut être éprouvante, il vous sera présenté ici la Jurisprudence et les pièces nécessaires afin de constituer un dossier solide.
La modification d’un acte d’état civil et de naissance n’est pas une procédure anodine.
Ainsi il s’agit de faire délivrer une assignation devant le Tribunal de Grande Instance compétent aux fins de modification de l’acte d’état civil, les services du Procureur de la République seront également mis en cause.
En effet, comme le rappelle l’article 1047 du Code de Procédure Civile, c’est la juridiction du Tribunal de Grande Instance qui modifiera l’acte mais il appartient au Procureur d’indiquer sa position.
Compte tenu de la démarche contentieuse, la présence d’un avocat est essentielle.
Les demandes de modification d’acte dans le cadre du transsexualisme se fondent également sur les articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme qui précisent :
Article 8 Droit au respect de la vie privée et familiale
« Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance…. »
Article 14 énonce l’interdiction de la discrimination :
« La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe,(…). »
Toutefois, même si les jurisprudences de la Cour Européenne des Droits de l’homme sont prises en compte par les juridictions françaises, il reste indispensable de vérifier lors de l’assignation la position la plus récente de la Cour de Cassation.
Ainsi les récentes jurisprudences de la Cour rappellent les critères de recevabilité de la demande de changement d’état civil en cas de transsexualisme : »
« Pour justifier une demande de rectification de la mention du sexe figurant dans un acte de naissance, la personne doit établir, au regard de ce qui est communément admis par la communauté scientifique, la réalité du syndrome transsexuel dont elle est atteinte ainsi que le caractère irréversible de la transformation de son apparence »
Cass.Civ 7 juin 2012 N° 10-26947
De plus ,lors des arrêts du 13 février 2013, la Cour de Cassation a confirmé que :
« Pour justifier une demande de rectification de la mention du sexe figurant dans un acte de naissance, la personne doit établir, au regard de ce qui est communément admis par la communauté scientifique, la réalité du syndrome transsexuel dont elle est atteinte ainsi que le caractère irréversible de la transformation de son apparence »
Cass civ. 1 du 13/02/2013 n° 12-11.949
Cass civ 1 du 13/02/2013 n° 11-14.515
Dans ces conditions, l’acceptation la demande repose sur la démonstration de la réalité et la présence du syndrome transsexuel d’une part et d’autre part du caractère irréversible de la modification de l’apparence féminine vers une apparence masculine ou vice versa.
L’enjeu repose alors sur la réunion des pièces (documents) du dossier. Il est indispensable de fournir à votre avocat de nombreux éléments de preuve.
Ainsi, afin de démontrer la réalité de la présence du syndrome transsexuel, les pièces suivantes pourront être communiquées:
– Des attestations des psychologues, des psychiatres indiquant la réalité du syndrome, la description et la date d’apparition du syndrome ( enfance, adolescence ect),
– Des attestations de proches, d’amis, illustrant le comportement en société du demandeur. Plus précisément, la tenue vestimentaire, l’attitude, les activités sportives, le prénom utilisé par les proches. Ces attestations permettront d’illustrer par exemple qu’une femme transsexuel a un comportement sociétal de jeune homme
– Des copies de documents administratifs, factures, abonnement où la mention du sexe ressentie est d’ores et déjà utilisée.
Ces attestations ne seront pas une description intime, mais permettront à la juridiction d’aborder le requérant au changement de sexe dans son intégralité, dans sa vie quotidienne et donc dans la société.
De plus afin de démontrer le caractère irréversible de l’apparence, des attestations d’endocrinologues sur le traitement hormonal suivi, de chirurgien dans le cadre éventuellement d’opérations (pose de prothèse, mastectomies, …permettront de démonter le caractère irréversible de la modification de l’apparence.
Ces pièces relevant de l’intime et du parcours médical seront des éléments de preuves permettant à la juridiction de modifier l’acte d’état civil. A défaut une expertise judiciaire pourrait être sollicitée par la juridiction.
Il s’agira alors de rencontrer pour le demandeur (demanderesse) un expert médical et souvent également un expert psychiatrique qui se prononceront sur la réalité du syndrome et sur la permanence de la modification de l’apparence.
Cette expertise peut être une nouvelle épreuve et une nouvelle difficulté, ainsi la communication d’attestations, de certificats détaillés permettra éventuellement de l’éviter.
D’ailleurs la circulaire DACS 07/10 rappelle aux procureurs et aux juridictions que le recours expertises s’avère souvent inutile, lorsque des rapports et documents médicaux fournis par le requérant établissent que les traitements hormonaux ayant pour effet une transformation physique ou physiologique définitive, associés, à des opérations de chirurgie (prothèses ou ablation des glandes mammaires, chirurgie esthétique du visage…), ont entraîné un changement de sexe irréversible, sans exiger pour autant l’ablation des organes génitaux.
Ainsi comme il a été énoncé en amont, la préparation et la constitution du dossier sont des maillons essentiels afin de modifier son acte d’état civil (sexe de naissance) et prénom en cas de transsexualisme.
Transexuel et changement d’état civil : une simplification à venir dans un contexte jurisprudentiel parfois confus.
Le législateur envisage une proposition de loi qui permettrait de faciliter le processus de modification de la mention du sexe à l’état civil. Ce texte viendrait faciliter le parcours judiciaire difficile d’un transexuel souhaitant modifier son état civil. En effet, à ce jour cette modification repose sur une procédure contentieuse et sur des jurisprudences de 2014 alors qu’un processus plus simple pourrait être mis en place.
Ainsi, Le Tribunal de Grande Instance de Tours a de son côté reconnu la substitution dans l’acte de naissance de la mention sexe neutre à un homme qui indiquait présenté une ambiguité sexuelle et non un transexualisme. Là encore il appartiendra au législateur de trouver une solution pour répondre à la détresse idenditaire de ces personnes. ( TGI de Tours 20 aôut 2015 2ème chambre civile).
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