Pour rappel, un salarié peut librement prendre acte de la rupture de son contrat de travail.

Si les manquements sont suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail, la prise d’acte produira les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse/ nul. Le salarié pourra donc prétendre à des dommages et intérêts.

En revanche, si les manquements ne sont pas établis ou suffisamment graves, la prise d’acte produira les effets d’une démission. Le salarié pourra donc dans cette éventualité être condamné à payer une indemnité compensatrice de préavis (Cass. soc. 8-6-2011 n° 09-43.208 FS-PB ) sauf si ce dernier avait proposé d’effectuer son préavis et que l’employeur l’en avait dispensé. (Cass. soc. 19-5-2015 no 13-25.615 FS-D )

Les juges du fond apprécient donc souverainement la gravité des faits à l’origine de la prise d’acte.

Ainsi, la Cour de cassation avait déjà eu l’occasion de se prononcer en matière de défaut de paiement de salaires.

En effet, cette dernière avait indiqué que le défaut de paiement du salaire sur une période de 5 mois justifiait la prise d’acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur. (Cass. soc. 30-5-2018 n° 16-28.127 F-D)

Toutefois, la Cour de cassation est venue apporter dernièrement quelques précisions complémentaires en indiquant que le retard de paiement de salaires sur une période de 2 mois ne constitue pas un manquement suffisamment grave justifiant la prise d’acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur et fait donc produire à la prise d’acte les effets d’une démission. (Cass. soc. 29-1-2020 n° 17-13.961 F-D)

 

1. Faits et procédure

En l’espèce, un salarié engagé en qualité de responsable commercial, moyennant une rémunération mensuelle brute fixe et une rémunération variable sur objectifs, avait pris acte de la rupture de contrat de travail le 9 juin 2012 et saisit en conséquence le Conseil de prud’hommes.

En effet, ce dernier reprochait à son employeur divers manquements :

  • non-paiement de l'intégralité de la part variable de son salaire,
  • paiement tardif de la partie fixe,
  • un rappel à l'ordre injustifié etc… ; 

2. Solution

Par un arrêt en date du 29 janvier 2020, la Cour de cassation a jugé d’une part qu’une partie des manquements n’était pas établis et que d’autre part, le retard dans le paiement des salaires des mois de mars et avril 2012 n’empêchait pas la poursuite de la relation de travail.

Dès lors, la Haute juridiction a considéré que la prise d’acte du salarié produit donc les effets d’une démission.

Au vu de la jurisprudence de la Cour de cassation, il semblerait donc que le retard de paiement de salaires sur une période de deux mois soit insuffisant pour justifier une prise d’acte aux torts de l’employeur (Cass. soc. 29-1-2020 n° 17-13.961 F-D) mais qu’un retard sur une période de 5 mois suffisent. (Cass. soc. 30-5-2018 n° 16-28.127 F-D)

En tout état de cause, le Code du travail prévoit que le fait de méconnaitre ses obligations en matière de paiement du salaire est passible pour l’employeur d’une amende prévue pour les contraventions de 3e classe. (article R 3246-1 du Code du travail)