En ce qui concerne les conditions de mise en œuvre de l’action en garantie décennale par le vendeur de l’ouvrage en dépit de la vente de l’ouvrage : le vendeur conserve contre l'assureur de l'entreprise l’exercice de l’action en responsabilité civile décennale, dès lors qu'il a un intérêt direct et certain à agir.
Source : Cass. 3ème Civ., 12 novembre 2020, N° 19-22.376
En l’espèce, un maître de l’ouvrage vend une maison qu’il a fait édifier en confiant la réalisation d’une partie des travaux à un constructeur.
L’acquéreur recherche la responsabilité du vendeur, réputé constructeur au sens de l’article 1792-1 , 2° du Code civil.
Le vendeur condamné à indemniser l’acquéreur au titre des désordres affectant le gros œuvre, intente une action récursoire à l’encontre du constructeur et de son assureur. Ce dernier lui oppose la prescription décennale de l’action.
En appel, les juges du fond considèrent, qu’en raison de la vente, le vendeur a perdu la qualité de maître de l’ouvrage, le privant de toute action contre le constructeur sur un fondement décennal.
Ce faisant, ils considèrent que l’action du vendeur, exercée sur un fondement contractuel et non décennal, n’est pas prescrite par application de l’article 2224 du Code civil et condamne l’assureur du constructeur à garantir le vendeur.
La Cour de cassation censure les juges du fond d’avoir ainsi statué alors qu’ils auraient dû rechercher, comme il leur était demandé, si, en dépit de la vente de leur maison, les vendeurs n’avaient pas conservé contre l’assureur de l’entreprise l’exercice de l’action fondée sur la responsabilité décennale, dès lors qu’ils y avaient un intérêt direct et certain, excluant toute action fondée sur la responsabilité contractuelle de droit commun.
La garantie décennale est une protection légale attachée à la propriété qui accompagne la chose en tant qu’accessoire et se transmet donc aux acquéreurs.
Toutefois, l'action en garantie décennale à l'encontre des constructeurs peut être exercée par le vendeur lorsqu'il est lui-même recherché par son acquéreur à condition que l'action présente pour lui un intérêt direct et certain (Cass. 3e civ., 20 avril 1982, n° 81-10.026 - Cass. 3e civ., 11 décembre 1991, n° 90-17.489 lorsque le vendeur s’est engagé suite aux réclamations de l’acquéreur à remédier aux désordres - Cass. 3e civ., 31 mai 1995, n° 92-14.098 - Cass. 3e civ., 17 janv. 1996, n° 94-12.231 - Cass. 3e civ., 4 mars 2014, n° 13-12.468).
Dans la décision commentée, la troisième chambre civile transpose ce principe déjà énoncé s’agissant du vendeur d’immeuble à construire à l’action récursoire du vendeur après achèvement.
Par la suite, elle rappelle que les dommages qui relèvent d’une garantie légale ne peuvent donner lieu à une action en réparation sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun (Cass. 3e civ., 13 avril 1988, n° 86-17.824).
Enfin, s’agissant de la prescription de l’action en garantie décennale, la troisième chambre civile rappelle que le délai décennal étant un délai d’épreuve, toute action, même récursoire, fondée sur cette garantie ne peut être exercée plus de 10 ans après la réception (Cass. 3e civ., 15 février 1989, n° 87-14.713).
En l’espèce, considérant de manière erronée que l’action récursoire des vendeurs étaient de nature contractuelle, les juges du fond avaient appliqué le délai de prescription quinquennale, en application des dispositions de l’article 2224 du Code civil. Ils avaient donc fixé le point de départ du délai de prescription de l’action au jour où du dépôt du rapport d’expertise (connaissance des désordres et de leur imputabilité) et estimé que l’action n’était pas prescrite).
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