La médiation extrajudiciaire est celle pouvant être proposée par toute partie aux autres parties, avant, pendant ou après le déroulement d’une procédure judiciaire. Les parties désignent le médiateur d’un commun accord, ou avec l’intervention d’un tiers qu’elles chargent de cette désignation.

 

La médiation judiciaire suppose que le juge saisi d’un litige peut, à la demande conjointe des parties ou de sa propre initiative mais avec l’accord de celles-ci, ordonner une médiation, tant que la cause n’a pas été prise en délibéré.

 

L’article 201 de la directive 2009/138, intitulé « Libre choix de l’avocat », prévoit :

« 1. Tout contrat d’assurance protection juridique prévoit explicitement : a) que, lorsqu’il est fait appel à un avocat ou à toute autre personne ayant les qualifications appropriées selon le droit national, pour défendre, représenter ou servir les intérêts de l’assuré dans une procédure judiciaire ou administrative, l’assuré a la liberté de choisir cet avocat ou cette autre personne ; [...], 2.Aux fins de la présente section, on entend par “avocat” toute personne habilitée à exercer ses activités professionnelles sous une des dénominations prévues par la [directive 77/249]. »

 

Dans cette affaire, une loi belge ne prévoyait pas, pour le preneur d’assurance, dans le cadre d’un contrat d’assurance-protection juridique, le droit de choisir son avocat lors d’une procédure de médiation.

 

Une question préjudicielle a donc été posée à la Cour de Justice de l’Union Européenne : cette loi belge était-elle conforme à l’article 201 de la directive 2009/138 ?

Car selon les ordres des barreaux qui saisirent la CJUE, la procédure de médiation doit être couverte par la notion de « procédure judiciaire » au sens dudit article 201, et un preneur d’assurance, dans le cadre d’un contrat d’assurance-protection juridique, doit avoir le droit de choisir son avocat lors d’une procédure de médiation.

 

Dans son arrêt du 14 mai 2020 (affaire C-667/18), la CJUE juge que :

 

http://curia.europa.eu/juris/document/document_print.jsf;jsessionid=7D55C60A2DEA5A959F8CB10E98FC7EC7?docid=226487&text=&dir=&doclang=FR&part=1&occ=first&mode=DOC&pageIndex=0&cid=394396

 

  • le terme « procédure » ne comprend pas seulement la phase de recours devant une juridiction proprement dite, mais également une phase qui la précède et qui est susceptible de déboucher sur une phase juridictionnelle ;

 

  • la notion de « procédure judiciaire », au sens de l’article 201 de la directive 2009/138, s’interprète de manière tout aussi large que celle de « procédure administrative », dans la mesure où il serait, par ailleurs, incohérent d’interpréter ces deux notions de manière différente au regard du droit de choisir son avocat ou son représentant ;

     

  • la notion de « procédure judiciaire » ne saurait être limitée ni aux seules procédures non administratives se déroulant devant une juridiction proprement dite ni en opérant une différenciation entre la phase préparatoire et la phase décisionnelle d’une telle procédure. Ainsi, toute phase, même préliminaire, susceptible de déboucher sur une procédure devant une instance juridictionnelle doit être considérée comme relevant de la notion de « procédure judiciaire » au sens de l’article 201 de la directive 2009/138 ;

 

  • considérer que cette médiation ne constitue pas, elle aussi, aux fins de l’article 201 de la directive 2009/138, une « procédure judiciaire » au sens de cet article, priverait, pour cette seule phase, l’assuré de son droit de choisir son avocat ou son représentant. Or, il ne saurait être contesté que l’assuré a besoin d’une protection juridique lors de la phase qui, une fois entamée, fait partie intégrante de la procédure devant la juridiction qui l’a ordonnée. Une telle interprétation est au demeurant conforme à l’objectif de la directive 2009/138, visant à assurer une protection adéquate des assurés, dans la mesure où elle leur permet de continuer à bénéficier de l’assistance du même représentant pour la phase proprement judiciaire de la procédure ;

 

  • s’agissant de la procédure de médiation extrajudiciaire, la circonstance que celle-ci n’intervienne pas devant une juridiction ne permet pas non plus de l’exclure de la notion de « procédure judiciaire » au sens de l’article 201 de la directive 2009/138. En effet, une telle procédure de médiation est susceptible d’aboutir à un accord entre les parties concernées pouvant, à la demande même d’une seule d’entre elles, être homologué par une juridiction. En outre, dans le cadre de la procédure d’homologation, cette juridiction est tenue par le contenu de cet accord tel que défini par les parties lors de la médiation, en dehors des hypothèses dans lesquelles celui-ci est contraire à l’ordre public ou, le cas échéant, à l’intérêt des enfants mineurs ; Il s’ensuit que l’accord auquel les parties parviennent, qu’il résulte d’une médiation judiciaire ou extrajudiciaire, a pour conséquence de lier la juridiction compétente qui procède à son homologation et présente, après avoir acquis force exécutoire, les mêmes effets qu’un jugement ;

 

  • dans ces conditions, le rôle de l’avocat ou du représentant semble même être plus important dans le cadre d’une médiation que dans celui d’une réclamation introduite devant une autorité administrative, telle que celle mentionnée au présent arrêt, dont l’issue ne lie ni une éventuelle instance administrative ultérieure ni une juridiction administrative ;

 

  • dans le cadre d’une procédure qui est susceptible de fixer définitivement la position juridique du preneur d’assurance, sans qu’il ait de possibilité réelle de modifier cette position au moyen d’un recours juridictionnel, le preneur d’assurance a besoin d’une protection juridique et, compte tenu des effets de l’homologation de l’accord résultant de la médiation, les intérêts du preneur d’assurance qui a eu recours à la médiation seront mieux protégés s’il peut se prévaloir du droit au libre choix du représentant prévu à l’article 201 de la directive 2009/138, à l’instar du preneur d’assurance qui s’adresserait directement au juge ;

 

  • il serait donc incohérent que le droit de l’Union encourage l’utilisation de telles méthodes et restreigne, dans le même temps, les droits des justiciables qui décident de se prévaloir de ces méthodes ;

 

En conclusion : l’article 201, paragraphe 1, sous a), de la directive 2009/138 doit être interprété en ce sens que la notion de « procédure judiciaire » visée à cette disposition inclut une procédure de médiation judiciaire ou extrajudiciaire dans laquelle une juridiction est impliquée ou susceptible de l’être, que ce soit lors de l’engagement de cette procédure ou après la clôture de celle-ci.

 

 

Stéphane VACCA

Avocat droit du travail

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