Tous les associés disposent en principe du droit de demeurer dans la société. Il est néanmoins des cas dans lesquels l’intérêt social peut commander l’exclusion d’un associé.
La question de l’exclusion des associés est l’exemple type de situations pour lesquelles une rédaction minutieuse des statuts de la société lors de sa constitution s’avère primordiale.
La situation des associés diffère selon s’il s’agit d’une société commerciale ou d’une société civile. On distingue les situations d’exclusion statutaire, des situations d’exclusion légale.
1- Les situations d’exclusion statutaire des associés
Il est possible de prévoir dans les statuts de la société une clause permettant d’obliger les associés à céder leurs parts sociales et quitter la société. Ces clauses sont en général librement rédigées lors de la création de la société, mais doivent obéir à un certain nombre de conditions posées par la jurisprudence.
L’exclusion des associés nécessite l’existence d’une clause d’exclusion dans les statuts, insérée lors de la constitution de la société ou en cours de vie sociale, auquel cas il est nécessaire de recueillir l’accord unanime des associés.
Les statuts doivent prévoir des motifs d’exclusion objectifs et précisément définis. Ceux-ci doivent être conformes à l’intérêt de la société et à l’ordre public, tout en préservant le droit de défense de l’associé, qui doit pouvoir être avisé et entendu sur la décision d’exclusion.
L’exclusion peut être prononcée soit par l’organe dirigeant de la société, lorsque les statuts lui confèrent un tel droit (Cass. Com. 20 mars 2012, n° 11-10855) soit, situation la plus fréquente, par l’assemblée générale des associés.
Dans ce dernier cas, l’associé dont l’exclusion est envisagée ne peut être privé de son droit de participer à la décision d’exclusion. Il s’agit pour lui d’être convoqué à l’assemblée générale statuant sur la mesure d’exclusion et de prendre part au vote, conformément à l’alinéa 1er de l’article 1844 du Code civil qui prévoit que : « Tout associé a le droit de participer aux décisions collectives » (Cass. Com. 23-10-2007, n° 06-16537 / Cass. Com 09-10-2013, n° 11-27.235 et 12-21.238).
L’associé conserve cette qualité jusqu’au paiement de la valeur de ses parts sociales (Cass. Com., 05.05.2015, n° 14-10913).
En résulte la nécessité de prévoir dans les statuts de manière claire et précise les modalités de calcul du prix de rachat des actions. Il s’agit notamment de déterminer la formule de calcul de la valeur des parts sociales ainsi que la date à laquelle l’évaluation a lieu, permettant à l’expert d’évaluer la valeur des parts sociales, conformément à l’article 1843-4 alinéa 2 du Code civil qui dispose que : « L’expert ainsi désigné est tenu d’appliquer, lorsqu’elles existent, les règles et modalités de détermination de la valeur prévues par les statuts de la société ou par toute convention liant les parties ».
A défaut, le prix est fixé par un expert désigné dans les conditions prévues à l’article 1843-4 du Code civil (expert désigné par ordonnance du président du tribunal). Il a été décidé par la Cour de cassation que la valeur est estimée à la date la plus proche de la cession future (Cass. Com., 16-09-2014, n° 13-17807).
Il est nécessaire de rédiger la clause d’exclusion dans le respect des règles impératives des dispositions du Code civil applicables afin d’éviter de voir la clause réputée non écrite sur la base de l’article 1844-10 alinéa 2 du Code civil.
2- Les situations d’exclusion légale des associés
En l’absence de clause d’exclusion statutaire, il demeure possible d’exclure un associé de la société dans des situations limitativement prévues par la loi.
Ainsi, l’article 1844-12 du Code civil et l’article L. 235-6 du Code de commerce prévoient la possibilité de demander en justice le rachat forcé des droits sociaux d’un associé en cas d’incapacité ou de vice de consentement de ce dernier entraînant la nullité de la société ou d’actes ou délibérations postérieures à sa constitution. Dans ce cas, le vote de l’associé dont le rachat des droits est demandé est sans influence sur la décision de la société et la valeur des droits sociaux, en cas de contestation, est déterminée conformément à l’article 1843-4 du Code civil.
En présence d’une société civile, l’article 1860 du Code civil permet l’exclusion d’un associé en cas de déconfiture, faillite personnelle, liquidation de biens ou règlement judiciaire l’atteignant.
Concernant les sociétés par actions simplifiée (SAS), le Code de commerce, tout en prévoyant la liberté de détermination statutaire des conditions d’exclusion, autorise d’inclure dans les statuts la suspension des droits non pécuniaires de l’associé dans l’attente de la cession (article L. 227-16 du Code), l’exclusion de la société associée qui connaît un changement dans son contrôle (article L. 227-17 du Code), ou encore l’évaluation des actions de l’associé exclu selon l’accord des parties ou dans les conditions prévues à l’article 1843-4 du Code civil.
Pour les sociétés coopératives, l’article R. 522 du Code rural et de la pêche maritime permet l’exclusion d’un associé coopérateur par décision du conseil d’administration « pour des raisons graves, notamment si l’associé coopérateur a été condamné à une peine criminelle, s’il a nui sérieusement ou tenté de nuire à la société par des actes injustifiés ou s’il a falsifié les produits qu’il a apportés à la coopérative ».
Enfin, en matière de procédures collectives, notamment lors de l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire, l’article L. 631-19-1 du Code de commerce prévoit la possibilité pour le tribunal d’ordonner la cession des parts sociales du dirigeant associé de la société en difficulté, le prix de cession étant fixé à dire d’expert. Le dirigeant est dûment appelé par le tribunal avant le prononcé de la mesure.
De même, l’article L. 631-19-2 du même Code prévoit la possibilité de cession, dans certaines sociétés, et en vue de leur sauvegarde, au profit des personnes qui se sont engagées à exécuter le projet de plan, de tout ou partie de la participation détenue dans le capital par les associés ou actionnaires ayant refusé la modification de capital et qui détiennent, directement ou indirectement, une fraction du capital leur conférant une majorité des droits de vote ou une minorité de blocage dans les assemblées générales de cette société ou qui disposent seuls de la majorité des droits de vote dans cette société en application d’un accord conclu avec d’autres associés ou actionnaires, non contraire à l’intérêt de la société.
Il en résulte que la rédaction des statuts lors de la constitution de la société joue un rôle primordial afin d’éviter des situations de blocage ou de contentieux nuisibles à la bonne marche de la société. Plus la clause d’exclusion est claire et précise moins il sera possible de la contester devant le juge.
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