Par un arrêt du 5 octobre 2021, la chambre criminelle est venue rappeler les limites admissibles de la polémique et de l'expression syndicale, tout en apportant d'utiles précisions quant aux expressions diffamatoires diffusées au moyen de tracts litigieux.
Un dirigeant a porté plainte à l'encontre d'un syndicaliste pour avoir distribué, sur la voie publique aux abords de l'usine, un tract mettant en cause ses "méthodes de management brutales".
Suivant relaxe en première instance, appels de la partie civile et du procureur de la République, puis arrêt confirmatif de la cour d'appel, le dirigeant s'est pourvu en cassation, réprouvant que le syndicaliste ait obtenu le bénéfice de la bonne foi.
En droit de la presse, l'exception de bonne foi suppose que les propos aient été exprimés en des termes mesurés, sans animosité personnelle, dans un but légitime, après une enquête sérieuse pour étayer le propos.
Lorsque les propos s'inscrivent dans un débat d'intérêt général et reposent sur une base factuelle suffisante, le droit conventionnel invite à apprécier moins strictement les quatre critères susvisés, afin d'offrir une plus grande liberté de ton et de polémique.
Il ne fait aucun doute que l'action syndicale (dont l'objet même est de représenter les salariés et d'assurer la défense de leurs intérêt) se distingue par sa contribution à des sujets d'intérêt général, ayant trait à des questions sociales et économiques, animant des débats publics, plus ou moins vifs, au niveau national ou local.
Au cas de l'espèce, la Cour de cassation vient confirmer que l'expression susvisée n'excédait pas les limites admissibles de la polémique syndicale.
Autre point remarquable, pour confirmer l'absence de publicité, la Cour de cassation observe que le tract n'avait été distribué qu'à des personnes liées entre elles par une communauté d'intérêt. En effet, bien que distribué sur la voie publique aux abords de l'usine, le document n'avait été remis qu'au personnel de l'entreprise, sans qu'il ne soit jamais établi que l'écrit litigieux ait pu toucher une personne étrangère à la manufacture.
Pour rappel, la notion de communauté d’intérêts est d'origine jurisprudentielle : elle permet d'exclure la publicité lorsque les propos sont tenus dans un cercle restreint de personnes, liées entre elles par des intérêts commus - c'est notamment le cas du personnel d’une entreprise (Crim., 3 juillet 1980, n°79-91.742, bull. crim. n°215).
Le droit de la presse est une matière particulièrement technique, qui nécessite l’assistance d’un professionnel du droit aguerri, tant pour mener une action à son terme, que pour être défendu utilement en cas de poursuites.
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