[ Droit public- Fonction publique - Eviction illégale - Collectivités - Exécution d'une décision de justice]

 

 

Lorsque le juge administratif annule un acte d'une collectivité dont il estime qu'elle se sépare, de façon illégale, d'un agent public - lui-même étant à quelque jours de sa titularisation -  il entend bien que celle-ci exécute sa décision.

Pour ne pas l'avoir fait, une collectivité est condamnée au terme de la procédure particulière de l'exécution des décisions de justice, à réintégrer l'agent, se prononcer sur sa titularisation, et ceci sous astreinte[1].

 

La réintégration oblige la collectivité, quand bien même le poste qu'occupait l'agent n'existe plus

 

En l'espèce, la Cour intervenait suite à sa propre décision rendue en 2018[2].

En substance, la commune employeur avait été jugée coupable d'un licenciement illégal pour des raisons liées à la santé de l'agent public.

Suite à cette décision de 2018, un arrêté réintégrait "juridiquement" l'agent, mais faisait état de la suppression de son poste et… le licenciait de nouveau.

A cet égard, la Cour indique : "La circonstance que l'emploi alors occupé par M… en qualité de stagiaire, qui ne saurait correspondre à un "emploi unique" compte tenu du cadre d'emploi en cause, a été supprimé, demeure, à cet égard sans incidence sur l'obligation d'exécuter pleinement l'arrêt de la cour."

A quoi en effet, sert-il d'organiser la fonction publique territoriale en cadres d'emplois, si cela revient à n'appliquer qu'une pure logique de poste individuel ?

La Cour indique donc que la commune n'a "pas tiré toutes les conséquences de l'annulation prononcée".

 

L'exécution de la décision de justice oblige à ce que la collectivité se prononce sur la titularisation de l'agent

 

Dans son dispositif, l'arrêt indique bien qu'à "l'issue du stage la collectivité se prononcera sur la titularisation…".

En effet, la commune récalcitrante s'était affranchie du principe juridique qu'une annulation replace les parties dans la situation telle qu'elle se présentait au moment de la prise de la décision illégale.

L'intéressé étant en fin de stage, il convenait que sa titularisation soit examinée (ce qui n'avait en réalité, jamais été le cas ! ).

En ne le faisant pas suite à l'arrêt de 2018, la commune n'a pas exécuté correctement celui-ci.

Si bien que la Cour a dû l'indiquer expressément.

A défaut d'être titularisé par voie de justice, ce que celle-ci se refuse jusqu'à présent d'opérer, au moins l'agent public a-t-il le droit à ce que la procédure prévue aille jusqu'à son terme.

 

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La décision de la Cour s'inscrit dans la spécificité du droit administratif qui expose que, dès lors que le jugement est notifié, les mesures d'exécution doivent être prises. "…la notification rend effectifs les droits et obligations des parties, qui ont désormais le pouvoir ou le devoir de conformer leur comportement à ce qui a été jugé"[3].

Dès lors, toute résistance, surtout d'une personne publique, en plus d'être illégale, est inutile.

 

 

                                                                                                         

 

 

 

 

Cet article peut être repris et utilisé en tout ou partie  à la condition que les références soient mentionnées : auteur, date, titre et site de diffusion. Et, si possible, que j'en sois averti !

 


[1] Arrêt de la Cour Administrative d'Appel de Nantes, Exécution, du 1er mars 2022, n°20NT02940.

[2] Arrêt de la Cour Administrative d'Appel de Nantes 19 décembre 2017, n°18NT00598.

 

[3] Selon la formule du professeur Chapus - Droit du contentieux administratif - 11ème édition - n°1195