Le principe de la protection du droit d’auteur est posé par l’article L111-1 du code de la Propriété Intellectuelle « l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous ».

Le législateur reconnaît ainsi une valeur juridique et économique aux œuvres de l’esprit et octroie à son auteur un monopole.

Se pose alors la question de « qu’est-ce qu’une œuvre de l’esprit » ?

On pense immédiatement aux écrits de la littérature, aux œuvres musicales, à une peinture...

On oublie souvent l’œuvre architecturale. Or l’article L.112-2 du code de la Propriété Intellectuelle liste de manière non exhaustive les œuvres de l’esprit et vise notamment ce type d’œuvre.

  • Déterminer l’auteur d’une œuvre architecturale

Reste ensuite à déterminer qui est « l’auteur » de l’œuvre ?

L’article L113-1 du code de la Propriété Intellectuelle dispose que « la qualité d’auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l’œuvre est divulguée ».

Le législateur a donc instauré une présomption simple. Ainsi, si le véritable créateur de l’œuvre n’est pas le tiers sous le nom duquel l’œuvre est divulguée, il pourra toujours prouver sa qualité. Cette présomption n’est applicable qu’aux personnes physiques. Les personnes morales ne peuvent pas se voir investies de la qualité d’auteur.

Comme nous l’avons vu précédemment, les droits d’auteur naissent du simple fait de la création de l’œuvre et n’est pas subordonnée à un dépôt.

Toutefois, afin de prouver sa qualité d’auteur et la date de création de l’œuvre, il faut se constituer des preuves. Pour ce faire, les plans d’architectes, les documents annexes, les contrats, la publicité sont autant d’éléments qui peuvent aider à la preuve.

  • L’œuvre architecturale créée par un salarié architecte

Lorsque l’œuvre architecturale a été créée par un salarié architecte doit-on considérer qu’il est l’auteur de l’œuvre ?

L’employeur, société d’architecture, devient-il du fait de la conclusion d’un contrat de travail titulaire des droits d’exploitation sur les œuvres créées par un salarié ?

La loi est claire sur ce point.

Au terme de l’article L.111-1 alinéa 3 du code de la Propriété Intellectuelle : « l’existence ou la conclusion d’un contrat de louage d’ouvrage ou de service par l’auteur d’une œuvre de l’esprit n’emporte pas dérogation à la jouissance du droit reconnu…».

Même si la jurisprudence n’est pas toujours constante, il n’en demeure pas moins que la Cour de cassation a rappelé maintes fois ce principe.

Le salarié reste titulaire des droits d’exploitation sur son œuvre. Si l’employeur souhaite exploiter l’œuvre d’un de ses salariés, il devra donc conclure une cession de droits d’auteurs avec ce dernier et l’indemniser en conséquence.

  • Les droits attachés à l’œuvre architecturale

Comme nous l’avons vu, l’auteur aura la faculté d’exploiter l’œuvre en question, sous quelque forme que ce soit, aux fins éventuelles d’en tirer un profit.

Il pourra également céder ses droits à un tiers qui pourra l’exploiter. Pour protéger l’auteur, le code de la Propriété Intellectuelle impose un accord écrit avec des clauses bien précises.

L’auteur bénéficiera également du droit moral, droit immatériel, opposé aux droits patrimoniaux, qui vise  à protéger la personnalité de l’auteur à travers son œuvre et qui recouvre notamment le droit à la paternité et au respect de son œuvre c’est-à-dire le droit d’interdire toute modification, suppression ou ajout d’éléments à l’œuvre initiale.

Il est de jurisprudence constante que le droit moral de l’auteur est « perpétuel, inaliénable et imprescriptible ».

Contrairement aux droits patrimoniaux, l’auteur de l’œuvre ne peut transmettre son droit moral. Il ne peut donc pas faire l’objet d’une cession de droit.

Que prévoit le code de la Propriété Intellectuelle lorsque l’œuvre architecturale a été créée à plusieurs ?

  • L’œuvre architecturale créée à plusieurs

Lorsque l’œuvre est réalisée par plusieurs auteurs, chacun d’eux devient co-auteur de l’œuvre appelée œuvre de collaboration.

L’article L.113-2 du code de la Propriété Intellectuelle définit l’œuvre de collaboration comme une création à laquelle plusieurs personnes physiques ont concouru.

L’œuvre de collaboration est réalisée par plusieurs personnes physiques en concertation pour arriver à une finalité décidée en commun.

Chacun des co-auteurs est finalement copropriétaire de l’œuvre et de ce fait l’exploitation de celle-ci doit se faire à l’unanimité.

Pourtant dans certains cas, si l’œuvre est réalisée à plusieurs, le titulaire des droits d’exploitation peut ne pas être l’auteur de l’œuvre. Il s’agit d’une particularité législative appelée œuvre collective.

Selon l’article L.113-2 alinéa 3 du code de la Propriété Intellectuelle : « est dite œuvre collective l’œuvre créée sur l’initiative d’une personne physique ou morale qui l’édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom et dans laquelle la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration se fond dans l’ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu’il soit possible d’attribuer à chacun d’eux un droit distinct sur l’ensemble de l’œuvre réalisée ».

L’œuvre est le résultat d’une fusion de contributions. De ce fait, la personne physique ou morale qui est l’initiatrice de l’œuvre sera présumée titulaire des droits d’exploitation sur l’œuvre si celle-ci est divulguée sous son nom.

L’article L.113-5 du code de la Propriété Intellectuelle prévoit que « L’œuvre collective est, sauf preuve contraire, la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de qui elle est divulguée. Cette personne est investie des droits de l’auteur ».

La jurisprudence est venue préciser que cette personne était détentrice des droits patrimoniaux mais également des prérogatives du droit moral (Cass, com, 22 mars 2012 : JurisData n°2012-004913).

La Cour d’appel de Paris le confirme dans son arrêt le 9 octobre 2020 (CA Paris, pôle 5, ch. 2, 9 oct. 2020, n° 18/27357).

La société PBJA, exerçant l’activité estimait qu’à la suite des travaux de rénovation de la gare souterraine de Châtelet - Les Halles, la RATP avait porté atteinte à l’intégrité de son œuvre et l’a assignée en contrefaçon.

Or, l’œuvre revendiquée ne pouvant être qualifiée d’œuvre collective, la société PBJA n’était pas recevable à agir en contrefaçon au titre du droit moral.

La Cour d’appel constate en effet que la société PBJA ne démontre pas que la divulgation de l’œuvre a été faite sous son nom. Elle n’établit pas davantage que l’œuvre a été créée sous sa direction et que l’œuvre est le fruit de plusieurs contributions qui se fondent dans un ensemble sans qu’il soit possible d’attribuer à chacun d’eux un droit distinct.

Dans le cadre d’un contentieux portant sur le droit d’auteur, il convient, avant d'agir en contrefaçon d'être prudent quant à la qualification de l’œuvre et des droits qui en découleraient pour son titulaire.