Locaux commerciaux et meublés de tourisme

La règlementation du changement d'usage a été édictée en vue du protéger le nombre de logement disponible. 

Afin de protéger également les locaux commerciaux, le Code du tourisme prévoit la possibilité (sous-conditions) pour les communes de délibérer afin de soumettre à autorisation la location des locaux commer

Le Code du tourisme prévoit qu'une délibération du conseil municipal peut soumettre à autorisation la location d'un local qui n'est pas à usage d'habitation,en tant que meublé de tourisme (Code du tourisme, article L324-1-1, IV Bis).

Le Code du tourisme autorise effectivement les communs à définir des critères pour délivrer l'autorisation, lesquels peuvent être mis en œuvre de manière différenciée sur le territoire de la commune, en fonction de la situation particulière de certains quartiers ou zones (Code du tourisme, article R324-1-5).

C'est ce qu'a entrepris la Ville de Paris pour compléter la réglementation applicable aux meublés de tourisme.

 

L'interdiction de location en meublés de tourisme situés sur les linéaires commerciaux et artisanaux n'est pas disproportionnée

La Ville de Paris a prévu dans son règlement qu'une autorisation pour la location en meublés de tourisme d'un local commercial ne pouvait être délivrée s'agissant d'un local situé sur un linéaire commercial et artisanal faisant l'objet d'une protection au plan local d'urbanisme.

Les juges considèrent qu'il n'y a pas de ce fait d'interdiction générale et absolue, si bien qu'il ne donne pas raison aux commerçants requérants :

"17. Il ressort de l'exposé des motifs de la délibération contestée que la Ville de Paris a entendu réagir aux incidences négatives de la transformation d'un nombre élevé de commerces en meublés de tourisme sur l'environnement urbain et sur l'offre de commerces pour la population permanente, qui l'affectent particulièrement, en instaurant, dans le cadre des dispositions législatives l'y habilitant, une réglementation subordonnant à autorisation la location d'un local à usage commercial en meublé touristique. En adoptant cette réglementation, au vu d'éléments d'information nombreux, comprenant des études extérieures à ses services, dont il n'apparaît pas qu'ils seraient fondés sur des faits matériellement inexacts ou sérieusement critiquables du fait d'un prétendu défaut d'impartialité de leurs auteurs, le conseil de Paris n'a pas entaché d'erreur manifeste l'appréciation qu'il a portée sur l'opportunité d'édicter la réglementation litigieuse.

En ce qui concerne l'interdiction applicable aux linéaires commerciaux et artisanaux :

18. L'interdiction de la location, en meublés de tourisme, des locaux à usage commercial situés sur les linéaires commerciaux et artisanaux le long desquels l'article UG.2.2.2 du règlement du plan local d'urbanisme de Paris alors en vigueur proscrit les changements de destination, qui, s'appliquant aux locaux à rez-de-chaussée situés en bordure des voies, n'a pas par elle-même pour effet d'interdire toute possibilité d'installer des meublés de tourisme dans de larges secteurs et répond à l'objectif d'intérêt général de protection de la commercialité de certains quartiers et artères où celle-ci est menacée, constitue une mise en œuvre différenciée en fonction de la situation particulière de certains quartiers ou zones au sens de l'article R. 324-1-5 du code du tourisme et n'est pas disproportionnée. Le moyen tiré de ce que la délibération litigieuse aurait instauré une interdiction générale et absolue et ainsi méconnu les dispositions de cet article R. 324-1-5 doit donc être écarté." (CAA de Paris, 6 février 2025, n°24PA00475).

Il s'agit donc d'une illustration de critères qui peuvent être retenus avec pertinence pour exclure certains locaux commerciaux de la possibilité de louer en meublés de tourisme dans les territoires où une telle location est soumise à autorisation.

 

Toute modification d'un règlement de changement d'usage implique d'envisager l'édiction de mesures transitoires

Toute autorité administrative est tenue d'édicter des mesures transitoires lorsque l'application immédiate d'une nouvelle réglementation est impossible ou entraîne une atteinte excessive aux intérêts en cause (Code des relations entre le public et l'administration, article L221-5).

Ces mesures transitoires peuvent consister en une application différee dans le temps, des dispositions spécifiques pour les situations en cours ou des règles particulières pour régir la transition entre l'ancienne et la nouvelle réglementation (Code des relations entre le public et l'administration, article L221-6).

La délibération qui a soumis l'activité de location en meublé de tourisme des locaux commerciaux à nouveau régime d'autorisation préalable était d'application immédiate, avec application immédiate des sanctions, notamment d'amende civile, prévues par la réglementation.

Le juge sanctionne en conséquence la délibération pour son application immédiate, puisque les propriétaires concernés n'ont pas pu prendre leurs dispositions pour déposer des demandes ou gérer les réservations déjà effectuées :

"27. L'entrée en vigueur immédiate de la délibération attaquée a ainsi eu pour effet de soumettre l'activité de location en tant que meublé de tourisme des locaux commerciaux qui en sont l'objet à un nouveau régime d'autorisation préalable, assorti d'une amende civile, sans prévoir le délai indispensable au dépôt des demandes, à leur instruction et à la délivrance des autorisations nécessaires à sa mise en œuvre, délai qui, dans les circonstances de l'espèce, ne pouvait être inférieur à trois mois. Alors, d'une part, que la possibilité de louer un bien est une composante de la libre disposition de celui-ci et, par suite, du droit constitutionnel de propriété et que, d'autre part, la location de biens meublés à usage touristique est opérée sur réservation, l'absence de dispositions transitoires différant la date d'entrée en vigueur du nouveau régime d'autorisation préalable, rendant illégale toute poursuite d'une location entrant dans le champ de la délibération dans l'attente de l'autorisation requise, a porté une atteinte excessive aux intérêts des acteurs économiques en cause. Il y a donc lieu de prononcer l'annulation de la délibération litigieuse en tant qu'elle ne comporte pas de telles dispositions.

28. Il résulte de tout ce qui précède que l'association des commerçants accueillants est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de la délibération n° 2021 DLH 460 du 15 décembre 2021 du conseil de Paris portant règlement municipal fixant les conditions de délivrance des autorisations visant la location de locaux à usage commercial en meublés de tourisme en tant qu'elle est dirigée contre les troisième à dixième alinéas de l'article 2, qui sont divisibles des autres dispositions du règlement, et en tant que cette délibération ne diffère pas son entrée en vigueur au 7 avril 2022." (CAA de Paris, 6 février 2025, n°24PA00475)

Les collectivités doivent en conséquence prendre garde à adopter des mesures transitoires autant que de besoin.

 

Le cabinet est à votre écoute :

  • Pour vous assister dans l'analyse et la mise en oeuvre de la règlementation nationale et locale concernant les meublés de tourisme ;
  • Pour vous aider à prévenir, mesurer et éviter les risques induits dans le cadre de votre projet ;
  • Pour vous accompagner dans la régularisation, et le cas échéant, en cas de litige lié aux mesures adoptées par l'administration locale ;
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Goulven Le Ny, avocat au Barreau de Nantes

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