Selon un arrêt de la Première chambre civile de la Cour de cassation du 18 janvier 2023 (n° 21-21370), la méconnaissance par le directeur de l’établissement d’accueil de l’obligation d’informer sans délai la commission départementale des soins psychiatriques de sa décision d'admission d'une personne en soins psychiatriques sans consentement à la demande d’un tiers ou en cas de péril imminent, peut constituer une irrégularité de nature à justifier la mainlevée, par le juge des libertés et de la détention, de son hospitalisation sans consentement, s’il a ainsi été porté atteinte à ses droits.

Cette commission constitue l’une des garanties établies en faveur des personnes admises en soins psychiatriques en application des chapitres II à IV du titre Ier du livre II de sa troisième partie du code de la santé publique, dont l’article L. 3222-5 prévoit :

« Sans préjudice des dispositions de l'article L. 3222-4, dans chaque département une commission départementale des soins psychiatriques est chargée d'examiner la situation des personnes admises en soins psychiatriques en application des chapitres II à IV du titre Ier du présent livre ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale au regard du respect des libertés individuelles et de la dignité des personnes. »

En relèvent donc :

  • les personnes admises en soins psychiatriques à la demande d'un tiers ou en cas de péril imminent (chapitre II du titre Ier du livre II de la troisième partie du code de la santé publique) ;
  • les personnes admises en soins psychiatriques sur décision du représentant de l'Etat (chapitre III du titre Ier du livre II de la troisième partie du code de la santé publique) ;
  • les personnes détenues atteintes de troubles mentaux admises en soins psychiatriques (chapitre IV du titre Ier du livre II de la troisième partie du code de la santé publique) ;
  • les personnes dont l’admission en soins psychiatriques, sous la forme d'une hospitalisation complète, a été ordonnée par la chambre de l'instruction ou une juridiction de jugement ayant déclaré leur irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental (article 706-135 du code de procédure pénale).

En cas d’admission d’une personne en soins psychiatriques à la demande d'un tiers ou en cas de péril imminent, l’article L. 3212-5 du code de la santé publique prévoit notamment :

« I.- Le directeur de l'établissement d'accueil informe sans délai le représentant de l'Etat dans le département ou, à Paris, le préfet de police, et la commission départementale des soins psychiatriques mentionnée à l'article L. 3222-5 de toute décision d'admission d'une personne en soins psychiatriques en application du présent chapitre et leur communique une copie du certificat médical d'admission et du bulletin d'entrée. Il leur transmet également sans délai copie de chacun des certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3211-2-2. »

Dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 18 janvier 2023, une personne avait été admise, le 8 avril 2021, en soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète par décision du directeur d'établissement et à la demande d'un tiers, sur le fondement de l'article L. 3212-3 du code de la santé publique, ce qui lui rendait applicables les exigences précitées de l’article L. 3212-5 du code de la santé publique.

Le 14 avril 2021, le directeur d'établissement avait saisi le juge des libertés et de la détention d'une demande de poursuite de la mesure sur le fondement de l'article L. 3211-12-1 du code de la santé publique.

L’ordonnance du 30 avril 2021 du premier président de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion ayant maintenu l’hospitalisation complète de la patiente, qui s’était prévalue de l'irrégularité de la décision de placement en l'absence de preuve d'une information de la commission départementale des soins psychiatriques quant à sa situation, vient, sur son pourvoi, d’être annulée par la Cour de cassation, au vu de l’article 455 du code de procédure civile, pour contradiction de motifs, dès lors que, pour écarter le grief tiré du défaut d'information de la commission départementale des soins psychiatriques, elle avait relevé « qu'il est mentionné sur les décisions d'admission que cet avis a été effectué et qu'aucun élément intrinsèque ou extrinsèque à la procédure ne permet de le remettre en cause, tout en constatant que cette commission n'est pas mise en œuvre à La Réunion et correspond de fait à l'ARS qui s'auto-avise et qu'il est primordial de la mettre en œuvre dans l'année en cours pour ne pas priver à terme le malade d'un moyen de contrôle ou de recours ».

L’arrêt du 18 janvier 2023 a également censuré la violation, par l’ordonnance du 30 avril 2021, des dispositions du code de la santé publique suivant lesquelles :

  • la commission départementale des soins psychiatriques « peut proposer au juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire dans le ressort duquel se situe l'établissement d'accueil d'une personne admise en soins psychiatriques en application des chapitres II à IV du titre Ier du présent livre ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale d'ordonner, dans les conditions définies à l'article L. 3211-12 du présent code, la levée de la mesure de soins psychiatriques dont cette personne fait l'objet » (7° de l’article L. 3223-1) ;
  • « le directeur de l'établissement prononce la levée de la mesure de soins psychiatriques lorsque celle-ci est demandée (…) 1° Par la commission départementale des soins psychiatriques mentionnée à l'article L. 3222-5 » (article L. 3212-9) ;
  • « le juge des libertés et de la détention connaît des contestations mentionnées au premier alinéa du présent article dans le cadre des instances introduites en application des articles L. 3211-12 et L. 3211-12-1. Dans ce cas, l'irrégularité affectant une décision administrative mentionnée au premier alinéa du présent article n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet » (article L. 3216-1, alinéa 2).

La Cour de cassation a déduit de ces articles que « le défaut d'information de la commission des décisions d'admission peut porter atteinte aux droits de la personne concernée et justifier une mainlevée de la mesure ».

Or, « pour maintenir la mesure d'hospitalisation complète et écarter le grief tenant au défaut d'information de la commission, l'ordonnance énonce encore que celle-ci a seulement la possibilité d'interpeller ou de donner un avis sans pouvoir se saisir d'elle-même en l'absence de demande spécifique », si bien que les trois dispositions précitées ont été méconnues par le premier président, « qui a écarté par principe toute atteinte aux droit de la personne ».

Ayant cependant jugé que la cassation prononcée n’impliquait pas qu’il fût à nouveau statué au fond, la Cour a dit n’y avoir lieu à renvoi.

Il restera à la jurisprudence de préciser l’atteinte à ses droits que la personne concernée devrait invoquer ou prouver pour obtenir la mainlevée de son hospitalisation sans consentement, faute d’information de la commission départementale des soins psychiatriques quant à son admission en soins psychiatriques à la demande d’un tiers ou en cas de péril imminent.

Quelle que puisse être la valeur éventuelle du moyen tiré de ce défaut d’information, dès lors que, « si l'article L. 3216-1 du code de la santé publique donne compétence au juge des libertés et de la détention pour connaître des contestations relatives à la régularité des décisions administratives prises en matière de soins psychiatriques sans consentement, celui-ci n'est jamais tenu de relever d'office le moyen pris de l'irrégularité de la procédure au regard des dispositions de ce code » (Civ. 1ère 5 mars 2020, n° 19-23287), ce serait au requérant lui-même de s’en prévaloir, s’il s’y croyait fondé et y avoir intérêt, en tenant compte des prérogatives et des modalités de fonctionnement de la commission départementale des soins psychiatriques, fixées aux articles L. 3223-1 à L. 3223-3 et R. 3223-1 à R. 3223-11 du code de la santé publique.