Le Tribunal administratif de Paris vient d’apporter une illustration – assez rare en jurisprudence – de l’abus de droit par « fictivité » au sens de l’article L. 64 du LPF.

Pour rappel, contrairement au volet plus fréquemment mobilisé du « but exclusivement fiscal », la branche « fictivité » sanctionne la simulation pure et simple d’actes dépourvus de réalité économique.

Au cas particulier, l’administration a écarté comme non opposables des créances acquises prétendument détenues sur une société débitrice, au vu d’un faisceau d’indices concordants : irrégularités substantielles des contrats d’origine, absence d’activité des entités interposées, doutes sur l’existence d’un cocontractant situé dans un État non coopératif, endossements en cascade sans capacité financière, abandons de créances sans intérêt économique, absence d’enregistrement et, surtout, absence de tout flux financier réel.

Mais – point intéressant – le tribunal de commerce de Paris avait jugé, le 19 novembre 2013, la créance « certaine, liquide et exigible », décision ensuite suivie d’un protocole transactionnel homologué par la cour d’appel de Paris en 2018.

Saisie du différend, la juridiction administrative rappelle que ni un jugement du tribunal de commerce reconnaissant une créance, ni une transaction homologuée ultérieurement ne suffisent, à eux seuls, à emporter la réalité d’opérations dont la fictivité préexiste.

Ce faisant, le TA précise les limites de l’autorité des décisions du juge judiciaire en matière fiscale : elles ne lient ni l’administration ni le juge de l’impôt lorsque la fictivité des actes est antérieure et qu’aucun flux réel ne corrobore l’opération. Le dispositif civil peut organiser les rapports entre parties, mais il ne confère pas, par lui-même, de substance à des actes simulés au regard de l’article L. 64 LPF. En présence d’une simulation, l’ensemble des actes doit être écarté, y compris ceux issus du juge judiciaire.

Il sera intéressant de savoir si un appel a été formé contre ce jugement, et il sera utile d’être attentif à la position du juge d’appel ! En effet, les griefs à l’encontre de ce jugement du TA de Paris ne sont pas inexistants… Affaire à suivre…

Source : TA Paris, 1re sect. - 3e ch., 5 nov. 2025, n° 2327147, SARL Compagnie Art et Placement

Lien vers le jugement ici.