CA Papeete, civ., 3 avril 2014 , n° 08/00180 : JurisData n° 2014-009715.

Selon la jurisprudence relative à l'article 1321 du Code civil, l'opération par laquelle une personne acquiert un immeuble avec des fonds et pour le compte d'une autre personne est une convention de prête-nom. L'acte officiel est dit « ostensible » et la convention de prête-nom est dite « occulte ».

De telles conventions ne rendent pas l'acte notarié nul, mais elles n'ont d'effet qu'entre les contractants à la convention de prête-nom. Le fait que les cocontractants et même le notaire aient été informés est sans effet.

Il résulte de la doctrine relative à la transmission de propriété en Polynésie française que de telles opérations de prête-nom étaient fréquentes à l'époque où tout transfert de propriété entre vifs était soumis à l'autorisation du gouverneur (D. 25 juin 1934 : JORF, 28 juin 1934, p. 6429-6430). En effet, ce dernier attachait une vigilance particulière aux acquisitions réalisées par des personnes d'origine chinoise, nombre d'entre elles n'ayant pas la nationalité française.

En l’espèce, ni l'acte de vente sous condition suspensive ni l'acte constatant le transfert de propriété ne contiennent la moindre allusion, contrairement à ce que fait plaider l’appelante, à une conclusion de la vente à son profit. L’autorisation donnée par le gouverneur apparaît exclusivement formulée au profit de sa sœur.

C’est donc à tort que le premier juge a apprécié le point de départ de la prescription de l'action en simulation. En effet, il ne peut s’agir, au mieux, que de l’année 1966.

Ainsi, même en considérant avec le premier juge qu’une transaction occulte au profit de la sœur de l’appelante peut-être présumée, il n’en demeure pas moins que l'action en simulation est prescrite pour avoir été engagée plus de trente ans après la réitération de l'acte initial.

Cette solution est conforme au droit positif qui invite les justiciables à faire diligence dans l'exercice de leurs prérogatives. Au soutien de la prescription, on invoque la perturbation de la paix sociale que pourrait provoquer l’exercice tardif d’un droit. Toutefois, cet argument n’est pas entièrement convaincant dans le contexte polynésien, car il existe dans cette collectivité d’outre-mer un important contentieux foncier, qui concerne les familles dites élargies et qui porte sur des biens indivis intergénérationnels.

A cet égard, un projet de loi est à l’étude pour permettre la création du Tribunal foncier de Polynésie française, autrefois créé par la loi nº 2004-193 du 27 févr. 2004 (art. 17 : JORF, 2 mars 2004, p. 4213). A cet effet, un article L. 552-9-1 devrait être créé dans le Code de l’organisation judiciaire (Ass. nat., 3e séance, 30 oct. 2014, art. 14 bis).

Dans le cas présent, des faits historiques expliquent la situation juridique en cause, mais la prescription est imposée au profit, sans doute d’une conception, toute métropolitaine, de la propriété individuelle.