Le radar embarqué Gatso Millia flashe de plus en plus d’automobilistes et motards. A l’issue de cet article, vous saurez de quoi il s’agit et comment vous défendre.

 

Le pouvoir de flasher confié à un prestataire privé

 

En 2015, l’Etat a fait le choix de confier à des entreprises privées une compétence réservée auparavant exclusivement aux forces de l’ordre. Ainsi, des sociétés privées ont obtenu le pouvoir de constater des excès de vitesse.

 

Cette décision du gouvernement a été contesté sans succès par l’association 40 millions d’automobilistes. Précisément, le 8 juillet 2019, le Conseil d’État a validé le dispositif en estimant notamment que :

 

11. Les décisions litigieuses ne permettent de déléguer à des personnes privées que la seule tâche matérielle de conduite de véhicules équipés de radars, accessoire aux missions de police qui restent dévolues aux forces de l'ordre. Il ressort en outre des pièces du dossier que l'administration a prévu que les trajets effectués par les véhicules des prestataires seraient déterminés sous l'étroit contrôle des services de l'Etat et que les conducteurs n'auraient accès ni aux matériels de contrôle, ni aux données relatives à la constatation des infractions. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que les décisions attaquées méconnaîtraient l'interdiction de déléguer une mission de police à une personne privée.

https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000038742989

 

En pratique, des véhicules banalisés et dotés d’un radar embarqué sillonnent les routes de France. Ils flashent sans relâche, 8 heures par jour et 7 jours sur 7.

 

A ce jour, 223 voitures banalisées sont conduites par des salariés d’une société privée. Sachant qu’il y a au total 381 voitures avec des radars mobiles en service, 59% sont ainsi conduites par des salariés d’une société privée.

 

L’État parle pudiquement « d’équipements de terrain mobiles externalisées ». Vous apprécierez.

 

Un procédé hautement critiquable

 

En théorie, ces véhicules sont censés parcourir des endroits accidentogènes, dans le but de concourir à la sécurité routière.

 

En réalité, énormément de dérives sont constatées.

 

D’ailleurs, très peu de préfectures publient les parcours effectués par lesdits véhicules alors que cette logique de transparence avait été mise en avant par le comité interministériel de la sécurité routière.

 

En outre, l’idée même de participer à la sécurité routière est critiquable. Comment invoquer la peur du gendarme alors qu’il s’agit de véhicules banalisés et que les salariés de la société privée n’ont pas le pouvoir d’interpeller l’usager de la route ?

 

Le motard ou automobiliste en infraction découvre qu’il est en infraction uniquement lorsqu’il reçoit l’avis de contravention ou l’appel des forces de l’ordre en vue d’une audition s’il s’agit d’un excès de grande vitesse.

 

Cette manière de procéder n’a aucune visée pédagogique. Il s’agit simplement d’une logique financière comme le dénonce régulièrement la Cour des comptes.

 

Le Gatso Millia, un flash invisible  

 

En pratique, le radar qui équipe les voitures banalisées est un cinémomètre Gatso Millia.

 

Il s’agit d’un radar embarqué qui est installé à l’avant du véhicule, ce qui le rend très difficile à identifier.

 

Au surplus, cet appareil ne produit aucun flash.

 

Ainsi, la personne en infraction en est informée uniquement à réception de l’avis de contravention ou de l’appel des forces de l’ordre.

 

L’avis de contravention mentionne le type de radar et l’indication « Gatso Millia » vous permet de comprendre qu’il s’agissait d’un radar embarqué.

 

Pour votre parfaite information, avant d’arriver dans votre boîte aux lettres, les clichés pris par les radars embarqués sont envoyés au Centre national de traitement des infractions situé à Rennes. Là, des agents des forces de l’ordre analysent les clichés et décident ou non de l’envoi d’un avis de contravention. 

 

Un fonctionnement très encadré

 

Le cinémomètre Gatso Millia fonctionne selon deux modes :

 

  • Le mode stationnaire (véhicule garé sur le bord de la route)
  • Le mode mouvement (véhicule dans le flot de circulation)

 

Or, le mode de fonctionnement va conditionner le sens de mesure des véhicules :

 

« Sens de mesure des véhicules :

  • En mode stationnaire : rapprochement et/ou éloignement
  • En mode mouvement : éloignement »

 

De plus, le mode de fonctionnement va déterminer les conditions d’utilisation particulières, à savoir :

 

« - En mode mouvement :

  • Le véhicule porteur ne doit contrôler que des véhicules circulant sur une voie de la même chaussée,
  • Le véhicule porteur peut être utilisé sur des chaussées comportant au maximum 4 voies,
  • Lorsque la vitesse limite autorisée de l’axe contrôlé est de 50 km/h (soit la vitesse limite autorisée minimale paramétrable par le système en mode mouvement), et que cet axe comporte plusieurs voies contrôlables, le véhicule porteur doit être positionné de manière à ne contrôler que la voie limitrophe située à sa gauche.
  • En mode stationnaire :
    • Le véhicule porteur doit être stationné le long d’une chaussée comportant au maximum 4 voies et rectiligne sur au moins 50 mètres dans son sens de stationnement,
    • Le véhicule porteur doit être aligné avec le dispositif d’alignement prévu à cet effet conformément au manuel d’utilisateur précité. »

 

Il est donc impératif de vérifier le mode de fonctionnement pour déterminer avec précision si les modalités d’utilisation ont été respectées. En pratique, le plus souvent le véhicule est en circulation (car les appels d’offres passés par chaque région exigent des sociétés privées que les véhicules parcourent un maximum de kilomètres).

 

Le non-respect des conditions d’utilisation ne permet pas de garantir la fiabilité de la mesure réalisée par le radar.

 

C’est pourquoi notre cabinet a obtenu plusieurs décisions de relaxe. Concrètement, plusieurs clients ont été innocentés par la justice.

 

Pour un exemple très récent :

 

« Qu’en l’espèce, il ressort clairement des éléments de la procédure que le véhicule équipé du cinémomètre était en mouvement et a photographié et donc mesuré la vitesse du véhicule de monsieur X de face, ce qui signifie que ledit véhicule s’approchait du radar ; que dès lors, les conditions d’utilisation du cinémomètre permettant de garantir la fiabilité de la mesure de vitesse n’ont pas été respectées ;

 

Qu’en conséquence, il y a lieu de faire droit à l’exception de nullité soulevée in limine litis et de constater la nullité du procès-verbal de constatations n° … en date du 22 juin 2021 pour absence de conformité aux conditions d’utilisation de l’appareil de mesure ; »

 

En pratique comment se défendre

 

Il convient de distinguer deux hypothèses : la réception d’un avis de contravention et la convocation par les forces de l’ordre (s’il vous est reproché un excès de grande vitesse).

 

Dans le premier cas, vous disposez de la faculté habituelle de contester via le site internet de l’ANTAI : https://www.antai.gouv.fr

 

Pour une contestation efficace, il est conseillé de solliciter au préalable la copie du cliché photo, afin de s’assurer que vous n’êtes pas le conducteur.

 

Votre demande sera traitée par l’Officier du ministère public.

 

Celui-ci dispose de trois possibilités :

  1. Faire droit à votre contestation
  2. Rejeter votre contestation et vous inviter à payer
  3. Vous convoquer devant le tribunal de police, afin de permettre un débat et confier au juge le pouvoir de décider

 

Dans le second cas, dans l’hypothèse d’une convocation en vue d’une audition par les forces de l’ordre (hypothèse d’un excès de grande vitesse), il est préférable de s’attacher les services d’un avocat qui pratique habituellement le droit routier.

 

Notez dès à présent que si vous ne reconnaissez pas l’infraction, les forces de l’ordre n’ont aucun moyen légal de vous contraindre à dénoncer le conducteur.

 

L’obligation de désigner le conducteur pèse uniquement sur le représentant d’une personne morale (dirigeant de société) et en aucun cas sur les personnes physiques.

 

En outre, le seul fait d’être titulaire de la carte grise du véhicule pris en défaut ne permet pas de prononcer une condamnation pénale. Tout au plus, le juge peut infliger une amende mais il n’y aura ni suspension du permis, ni perte de points.

 

L’intérêt de solliciter un avocat en droit routier

 

L’avocat spécialiste en droit routier valide la stratégie après avoir pris connaissance de l’ensemble des éléments objectifs.

 

En outre, il peut être à vos côtés lors de l’audition par les forces de l’ordre, ce qui évite d’être confronté à un agent qui s’acharne dans but d’obtenir des aveux.

 

Enfin, l’avocat en droit routier vous représentera lors de l’audience devant le tribunal de police. Vous n’aurez pas à effectuer le déplacement. Vous éviterez ainsi un moment qui peut être désagréable.

 

Au surplus, il rappellera au juge par le biais d’un argumentaire écrit, que le seul fait d’être titulaire de la carte grise ne permet pas de fonder une condamnation pénale. Précisément, faute d’identification formelle, aucune suspension du permis de conduire n’est envisageable.

 

Enfin, dans le meilleur des cas, il pourra vous éviter de supporter une amende s’il a constaté en consultant l’entier dossier pénal (ensemble des PV rédigés par les forces de l’ordre) que le radar Gatso Millia n’a pas été utilisé conformément à ses conditions d’utilisation (voir la décision de justice citée plus haut et obtenue récemment par notre cabinet).

 

Naturellement, en cas de besoin, notre cabinet se tient à votre disposition.

 

Arnaud BERNARD