La Cour de cassation était invitée à préciser si le juge des tutelles peut autoriser qu'un mandataire rémunéré perçoive, dans un premier temps, des fonds sur un compte ouvert à son propre nom avec précision du nom du majeur protégé avant d'être versé sur un compte ouvert au nom dudit majeur.
La Haute Juridiction rend un avis très strict : les textes interdisent tout paiement ou encaissement par un tiers, et les opérations bancaires doivent être effectuées exclusivement au moyen des comptes ouverts au nom de la personne protégée (Cass. 1re civ. avis., 5 déc. 2025, n° 25-70.019).
Dans le cadre d'une instance concernant une personne protégée, le juge des tutelles souhaitait savoir si, « dans le cadre d'un mandat rémunéré », les sommes perçues par le mandataire pouvaient transiter provisoirement sur un compte bancaire ouvert à son nom, avant d'être versées sur celui du majeur protégé.
La question renvoyait directement à l'articulation entre les pouvoirs du tuteur ou curateur, l'intervention possible de tiers et les règles protectrices régissant les opérations bancaires du majeur.
La Cour rappelle tout d'abord que, selon l'article 452 du Code civil, la tutelle et la curatelle sont des charges personnelles : le tuteur ou le curateur peut certes s'adjoindre, sous sa responsabilité, le concours d'un tiers, mais seulement pour des actes limitativement énumérés, et jamais lorsqu'ils impliquent un paiement ou un encaissement de fonds.
L'article 3 du décret du 22 décembre 2008 précise en effet que l'intervention d'un tiers est cantonnée à des actes conservatoires ou à certains actes d'administration, sous réserve qu'ils n'emportent ni paiement ni encaissement d'argent.
Enfin, l'article 427, alinéa 5, du Code civil impose que toute opération bancaire effectuée « au nom et pour le compte de la personne protégée » soit réalisée exclusivement au moyen de comptes ouverts en son nom.
Sur la base de ces textes, la Cour déduit plusieurs principes :
– l'acte par lequel le tuteur ou curateur s'adjoint un tiers n'a pas à être autorisé par le juge, mais il ne peut jamais comprendre d'actes impliquant la réception ou le paiement de sommes ;
– un tiers ne peut recevoir aucun revenu (tels que loyers ou autres recettes) pour le majeur protégé, ni payer des sommes dues par ce dernier ;
– toutes les opérations financières doivent être faites directement sur le compte du majeur protégé ;
– le juge des tutelles ne peut donc autoriser ni le tuteur/curateur à déléguer ces actes interdits, ni le tiers à les accomplir ;
– la Cour rappelle en outre que, par application de l'article 2003 du Code civil, l'ouverture d'une tutelle entraîne la révocation de tous les mandats antérieurs.
La Cour adopte ainsi une interprétation particulièrement protectrice de la personne vulnérable.
Le transit des sommes par un compte tiers est strictement prohibé, et le juge des tutelles ne peut légalement aménager cette règle.
(Source : Lexis360 du 12/12/2025)

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