On le sait : l’article L. 145-46-1 du code de commerce prévoit que le Preneur commercial dispose d’un droit de préemption (si le propriétaire des murs veut les céder, l’exploitant peut se substituer à tout acquéreur).

Il ne faut surtout pas prendre cette disposition à la légère : « si la notification préalable n’a pas été effectuée ou est incomplète, la vente à un tiers du bien soumis au droit de préemption du locataire est nulle » (JurisClasseur, fascicule 490 : PRÉEMPTION).

Récemment, j’ai accompagné une personne qui avait acquis des locaux commerciaux dans lesquels exploitait le titulaire d’un bail commercial (il devenait donc le nouveau bailleur). Le Preneur, soutenant que son droit de préemption n’aurait pas été respecté, avait assigné l’ancien propriétaire, le nouveau propriétaire (mon client) et le Notaire devant le Tribunal Judiciaire de PARIS. Il sollicitait notamment du Tribunal qu’il constate la nullité de la vente.

La particularité du cas tient au fait que le Preneur – convaincu que la prescription était de cinq ans – avait assigné en juin 2021 alors que la vente datait d’octobre 2016. Il soutenait que l’action relative à son droit de préemption relevait de la prescription quinquennale de droit commun au motif que ce droit n’est pas propre au statut des baux commerciaux.

Cependant, l’article L. 145-60 du code de commerce dispose que « Toutes les actions exercées en vertu du présent chapitre se prescrivent par deux ans » : or, l’article L. 145-46-1 du code de commerce se trouve précisément dans ledit chapitre…

J’ai donc saisi le Juge de la mise en état d’un incident et il m’a rejoint pour considérer que l’action relative au droit de préemption du preneur commercial relève de la prescription biennale (de l’article L. 145-60 du code de commerce) et non de la quinquennale (de l’article 2224 du code civil): il a en conséquence déclaré l’action du Preneur irrecevable car prescrite.

Moralité pour les Preneurs : ayez le réflexe d’agir dans les deux ans de la notification qui vous est faite de la cession (et, pour le cas où elle ne vous aurait pas été notifiée, sachez que votre délai pour agir n’a pas même commencé à courir).

Moralité pour les Bailleurs (vendeurs) et les acquéreurs : « ceinture et bretelles » (ayez le réflexe Commissaire de Justice de manière à vous prémunir contre toute action dont les conséquences peuvent être particulièrement conséquentes s’agissant de l’anéantissement d’une vente immobilière).

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