Comme souvent : oui… mais.
Déjà, la première étape consiste à ne pas se tromper de juridiction.
La Cour de cassation le rappelle depuis longtemps : toute demande de contre-expertise ou de complément d’expertise relève exclusivement du Tribunal statuant au fond. Pas du juge des référés. Pas du juge de la mise en état. Pas du juge chargé du contrôle des expertises (Cass. 2e civ., 26 juin 2008, n°07-13875 ; Cass. 2e civ., 13 mai 2015, n°14-16905 ; Cass. 2e civ., 2 juill. 2020, n°19-16501).
Exemple 1 : le Juge de la mise en état de Nanterre, 12 octobre 2017, saisi d’une demande de « réouverture des opérations » après dépôt de rapport. Refus net. Motivation limpide :
« L’analyse de la demande nécessite une lecture approfondie du rapport (…) examen qui relève non de la compétence du juge de la mise en état, mais du tribunal en sa formation de jugement. »
Exemple 2 : le juge de la mise en état de PARIS, 2 juin 2022. Nouvelle demande de contre-expertise… nouveau rejet :
« Toute demande de nouvelle mesure d’instruction motivée par l’insuffisance des diligences du technicien commis ne peut relever que de l’appréciation du juge du fond. »
Après, une fois qu’on a trouvé le bon juge, encore faut-il le convaincre. Et c’est loin d’être gagné.
Une contre-expertise n’est accordée que si le Tribunal, au moment de trancher le fond du litige, estime ne pas être suffisamment renseigné. Autrement dit : seulement quand le rapport ne permet pas de tirer des conséquences juridiques de constatations techniques… ce qui est rare puisque c’est, précisément, l’objet du rapport d’expertise judiciaire.
Sauf faits nouveaux postérieurs au rapport, ou sauf annulation du rapport pour cause de vices (qui est, là-aussi, extrêmement délicat puisqu’il s’agit de la nullité d’un acte de procédure, je mentionne Charles Simon dont je sais qu’il s’agit d’un contentieux qui doit le passionner), la contre-expertise ou le complément d’expertise sont donc quasiment impossibles à obtenir.
Sans même rappeler le principe de proportionnalité procédurale : il faudrait vraiment un dossier aux enjeux colossaux pour avoir envie d’en passer par une seconde expertise judiciaire ! Surtout quand la première s’est mal déroulée !

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