Les CRCI sont les commissions régionales de conciliation et l'indemnisation. Elles sont issues de la loi n°2002-303 du 4 mars 2002 qui a mis en place un système d'indemnisation amiable de l'accident médical, des infections iatrogènes ou nosocomiales.

La saisine de ces commissions est subordonnée à différentes conditions :

- Les conséquences anormales de l'acte médical au regard de l'état de santé et de l'évolution du patient ;

- L'acte médical doit être directement imputable à des actes de prévention de diagnostic ou de soins et doit avoir été pratiqué postérieurement au 5 septembre 2001.

- La gravité du dommage subi est également une conditions de recevabilité de la saisine de la commission : "Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'incapacité permanente supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret" (L.1142-1 du code de la santé publique).

Les commissions rendent des décisions dont la portée juridique a été source de contentieux, notamment celui de savoir si un recours contre les avis est envisageable.

Le cas d'espèce :

Un patient victime d'un accident médical avait saisi la CRCI de Corse qui s'était déclarée incompétente pour absence de lien de causalité entre le dommage subi par le patient et l'acte médical. Le patient avait alors saisi le Tribunal administratif de Bastia d'un recours pour excès de pouvoir, qui avait rejeté la demande, mais en des termes bien particuliers(2005-291761 du 12 septembre 2005).

La motivation du Tribunal n'a pas manqué de suscité l'intérêt de la doctrine, notamment sur la nature des décisions des CRCI.

En effet, le Tribunal a retenu ce qui suit :

« Considérant, en deuxième lieu, que si l'article L.1142-8 du code de la santé publique dispose : « Lorsque les dommages subis présentent le caractère de gravité prévu au II de l'article L.1142-1, la commission émet un avis sur les circonstances, les causes, la nature et l'étendue des dommages, ainsi que sur le régime d'indemnisation applicable...cet avis ne peut être contesté qu'à l'occasion de l'action en indemnisation introduite devant la juridiction compétente par la victime... », la déclaration d'incompétence de la CRCI de Corse n'est ni un avis au sens des dispositions précitées ni un acte préparatoire mais un refus de proposition constitutif d'une décision administrative faisant grief et, comme telle, susceptible de recours ;

Considérant, enfin, que la décision par laquelle une CRCI rejette une demande tendant à ce qu'elle formule un avis sur la réparation des dommages subis par la victime d'un accident médical ne constitue pas une décision juridictionnelle à l'encontre de laquelle des voies de recours pourraient être exercées, selon le cas, devant une juridiction d'appel ou de cassation relevant de l'un ou de l'autre ordre de juridictions mais qu'elle est une décision administrative prise pour le compte d'un établissement public à caractère administratif dont le tribunal administratif, juge de droit commun du contentieux administratif, est seul compétent pour connaître en premier ressort.

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'exception d'incompétence et les fins de non-recevoir opposées en défense par l'ONIAM doivent être écartées ».

Ainsi, le Tribunal fait une distinction entre les décisions d'incompétence qui sont susceptibles de recours car non constitutives d'un avis ou d'un acte préparatoire et privant ainsi le patient du droit de recourir à la procédure amiable, et lesdits avis.

Le Conseil d'Etat, saisi pour avis par la Cour administrative d'appel, adoptera une autre position (avis du 10 octobre 2007, n°306590) :

« Il en résulte que, comme l'avis au fond sur la demande d'indemnisation, la déclaration par laquelle une commission s'estime incompétente pour connaître de la demande ou estime celle-ci irrecevable, quand bien même elle fait obstacle à l'ouverture d'une procédure de règlement amiable, ne fait pas grief et n'est susceptible d'être contestée devant le juge de l'excès de pouvoir dès lors que la victime conserve la faculté de saisir, si elle s'y croit fondée, le juge compétent d'une action en indemnisation... ».

Ainsi, selon le Conseil d'Etat, il n'y a pas lieu à traitement différent des décisions rendues par la commission, selon qu'elles offrent une indemnisation ou rejettent la demande, elles ont toutes les mêmes conséquences juridiques, à savoir l'absence de grief. Elles sont alors insusceptibles de recours.

La position du Conseil d'Etat a été de préserver la distinction entre les juridictions et les commissions, les premières rendant des décisions susceptibles de recours, les secondes des avis qui n'ont pas pour fonction de juger mais de réglementer, et préparer à une solution amiable.

La question se pose alors de l'opportunité de saisir les CRCI, tant pour les patients qui pouvaient obtenir une indemnisation de manière plus rapide et moins conflictuelle que par la voie contentieuse, que pour les médecins qui se trouveront alors plus souvent assignés devant les tribunaux, même en l'absence de toute faute.

Source : TA Bastia 12 septembre 2005 n°0500230, jurisdata n°2005-291761,

"Responsabilité de la puissance publique, L'acte par lequel une CRCI se déclare incompétente n'est pas susceptible de recours", JCP 9 janvier 2008 G II n°10007, note Benoît Apollis et François Vialla