Si l'article 544 du Code Civil dispose que la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements, l'article 545 dudit code pose les limites de ce principe puisqu'il dispose que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.
Ainsi est réglementée l'expropriation de propriété pour une cause bien définie, celle de l'utilité publique. Si l'expropriation est le droit reconnu aux personnes publiques de déposséder un particulier ou une personne morale de son bien, pour l'incorporer au patrimoine de l'État, des régions, des départements, des communes, des établissements publics ou même morales de droit privé, la question se pose alors de savoir ce que renferme la notion d'utilité publique.
L'utilité publique est l'affirmation de l'intérêt supérieur de la collectivité publique par rapport aux intérêts privés qui justifie l'appropriation par une collectivité d'un bien déterminé afin de l'utiliser en vue de travaux ou services publics.
Le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique qui rassemble les textes législatifs et réglementaires en cette matière notamment l'ordonnance du 23 octobre 1958 texte fondateur maintes fois modifié, et la loi n°2002-276 du 27 février 2002 relative à la Démocratie de proximité, ne prévoit pas de définition de l'utilité publique. Celle-ci est issue d'une longue évolution jurisprudentielle. En effet, dans un premier temps et jusqu'en 1971, alors qu'il vient d'être indiqué que l'expropriation pour cause d'utilité publique a véritablement été réglementée par l'ordonnance de 1958, la notion d'utilité publique n'a pas été contrôlée dans le cadre de la déclaration d'utilité publique. Ce n'est qu'à partir de 1971 par un arrêt d'assemblée que le Conseil d'État a commencé à fixé les limites de l'utilité publique pour mieux les encadrer. Ensuite, cette haute autorité va exercer un contrôle de son opportunité. Sous la monarchie et la révolution, l'utilité publique a largement été utilisée pour aboutir, souvent de manière abusive, à l'expropriation recherchée, sans qu'aucun contrôle ne soit véritablement exercé. C'est à partir de seconde république qu'est exercé un contrôle de légalité.
L'arrêt rendu par le CE le 28 mai 1971 appelé « ville nouvelle-est » marque le tournant vers un contrôle plus approfondi de l'utilité publique, qui n'était jusque là exercé qu'au stade formel. Le CE exerce désormais un contrôle de l'opportunité qui passe d'une part par une confrontation entre le projet envisagé, l'avantage qui en sera tiré et les inconvénients qu'il entraîne, et d'autre part par l'étude du caractère indispensable du projet. Le contrôle exercé par le CE va même aller jusqu'à la confrontation des intérêts publics et privés, puis des intérêts publics entre eux. cela résulte d'une évolution jurisprudentielle.
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