Dans une affaire jugée par la Cour d’Appel de Chambéry le 22 mai 2025 (n° 22/01814), les juges ont condamné les sociétés Google à 10.000 euros de dommages et intérêts pour avoir créé, sans autorisation, une fiche Google My Business au nom d’un médecin dentiste.
Du fait de l'utilisation des coordonnées personnelles du professionnel de santé (nom, prénom, adresse professionnelle, numéro de téléphone), rendues publiques sur la fiche Google My Business, créée sans son consentement, Google a causé un préjudice au médecin. Ce préjudice consistant en un préjudice matériel et moral lié à la multiplication des démarches que le dentiste a dû effectuer afin d'obtenir le retrait de sa fiche, aux avis négatifs diffusés mais non vérifiables quant à leur source ainsi qu'au fait de ne pas avoir été en capacité d'exercer son droit d'opposition prévu par le règlement RGPD relatif au droit des données personnelles.
Rappelons que les coordonnées professionnelles d'un praticien de santé constituent des données personnelles au sens du RGPD, dans la mesure où ces informations permettent d'identifier directement la personne. Il en est ainsi des nom, prénom, adresse professionnelle et numéro de téléphone du médecin. Le fait que ces informations soient professionnelles n'en constituent pas moins, par ailleurs, des données personnelles en vertu de la règlementation.
En outre, la création et la publication automatique d'une fiche Google My Business, faite sans le consentement de la personne, alors qu'aucun intérêt légitime n'est invocable par ailleurs par les sociétés Google, rend ladite fiche illicite.
Aussi, toute personne dont les données personnelles sont traitées dispose d'un droit à l'effacement de ses informations. Malgré ses multiples demandes, le médecin s'était heurté à un refus d'exercer son droit de la part des sociétés Google.
La Cour d'Appel de Chambéry retient la faute des sociétés Google consistant en l'absence d'information préalable relative à la création de la fiche Google My Business, en violation de l'article 14 du RGPD, ce qui n'a pas permis au médecin d'exercer son droit d'opposition au traitement de ses données. Les juges retiennent également l'existence d'un préjudice moral lié à l'impossibilité de faire retirer des avis négatifs publiés sur la fiche Google My Business invérifiables. Il est intéressant de relever que les magistrats se fondent conjointement sur l'article 82 du RGPD ainsi que sur les dispositions de droit national (articles 1280 et 1281 du Code civil liés à la responsabilité délictuelle).
Les recours judiciaires des professionnels de santé à l'encontre de la création non autorisée et non sollicitée de fiches Google My Business sont efficaces et permettent d'obtenir la réparation des préjudices subis.
A l'ère de l'information du public sur internet, il n'est pas permis de s'affranchir du respect du règlement sur le droit des données personnelles RGPD, en l'absence de fondements juridiques susceptibles de le contrebalancer, liés à la liberté d'information et la liberté d'expression.
Compétences : Droit de la propriété intellectuelle, Droit du numérique et des communications
Barreau : Paris
Adresse : 23 RUE LAVOISIER 75008 PARIS
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