QUE PEUT-ON ATTENDRE DE LA PROPOSITION DE LOI ANTI-SQUAT ?

La proposition de loi « anti-squat » a été adoptée, avec modifications, par le Sénat en première lecture ce 2 février 2023.

Cette proposition de loi vise à protéger les logements contre l’occupation illicite par deux angles bien distincts : d’une part renforcer la répression des squatteurs (I), d’autre part, faciliter les expulsions des locataires défaillants en cas d’impayés (II).

Ces deux situations sont à différencier puisque le locataire bénéficie d’un contrat de bail avec le propriétaire, tandis que le squatteur lui, n’a jamais disposé d’aucun droit de jouissance sur le bien, si ce n’est celui qu’il s’est octroyé illégalement, de fait.

Une répression renforcée à l’encontre des squatteurs

La proposition de loi prévoit l’aggravation de la sanction pénale encourue au titre du délit de violation de domicile (squat).

Un squatteur risquerait jusqu’à trois ans d’emprisonnement et une condamnation à 45 000 euros d’amende, soit des peines trois fois plus lourdes que celles actuellement en vigueur.

Ce renforcement pénal a notamment pour objectif d’aligner les sanctions des squatteurs sur celles pesant sur les propriétaires qui décideraient d’expulser les squatteurs de leur propre initiative, sans autorisation.

La presse décrivait comme assez injuste la situation d’un propriétaire impuissant, qui encourait de lourdes sanctions pénales s’il décidait de récupérer son bien sans autorisation, tandis que les squatteurs encouraient une peine moindre, alors même qu’ils étaient coupables d’occuper sciemment le bien d’autrui sans autorisation.

Le recours à la loi du Talion pour le propriétaire mécontent serait donc toujours interdit.

Il est également proposé que les marchands de sommeil, qui organisent des squats en faisant croire qu’ils sont propriétaires des logements, encourent les mêmes peines que les squatteurs eux-mêmes.

Se pose la question de l’impact réel de ces nouvelles sanctions, eu égard à la situation d’insolvabilité supposée de la majorité des squatteurs et marchands de sommeil et à l’absence de développement de solutions d’hébergement pour les personnes en difficulté.

En outre, le projet ne permet pas vraiment de supprimer, ou a minima, réduire les importantes difficultés pratiques liées à la phase administrative de l’expulsion.

Il est cependant à noter que le texte envisage de contraindre le préfet à ordonner le recours à la force publique pour expulser le squatteur du domicile d’autrui dans un délai de sept jours après une décision d’expulsion, ce qui permettrait d’accélérer l’exécution de l’expulsion, ce qui constitue une première piste d’amélioration intéressante.

Le projet ne s’arrête pas là puisqu’il envisage également de faciliter la procédure de résiliation de bail par le propriétaire en cas d’impayés de loyers ou de charges par le locataire.

Une résiliation facilitée en cas d’impayés de loyers des preneurs

Deux mesures principales permettraient de faciliter et d’accélérer l’expulsion des locataires mauvais payeurs :

  • D’une part, le délai mentionné par le commandement pour payer la dette locative est réduit à un seul mois contre deux précédemment, tout comme le délai séparant l’assignation et l’audience qui serait réduit de deux mois à six semaines ;
  • D’autre part, il existerait une clause résolutoire tacite dans tout bail d’habitation, autorisant un propriétaire à “provoquer la résiliation automatique du bail lorsqu’un commandement de payer est demeuré infructueux“, sans avoir à engager une action en justice.

Néanmoins, il est bien évidemment que pour expulser physiquement le locataire du bien, une fois le bail résilié, le propriétaire sera contraint d’engager une action en justice.

Ainsi, la résiliation du bail est facilitée, mais pas l’expulsion du locataire. Le non-recours à une procédure judiciaire reste donc illusoire pour les propriétaires, même si la procédure pourra être accélérée.

La proposition de loi permet de maintenir un certain équilibre entre les intérêts des deux parties, compte tenu du fait qu’il est sans nul doute excessif d’autoriser l’expulsion d’un locataire défaillant sans recours au juge.