AVOCAT – AVOCATE – AVOCATS

Caricatures et rumeurs – Pourquoi ? – Premier Motif

                                                                               

 

Bien des rumeurs circulent à propos de notre profession. Ainsi que bien des caricatures. Rumeurs et caricatures aussi anciennes que le monde lorsqu’il s’est aperçu que l’humanité exigeait que certains se lèvent pour agir et parler au nom des autres.

C’est ainsi.

 

Il y a maintes raisons à cela. La première d’entre elles, et nous nous arrêterons à elle, est que le métier d’avocat n’est pas seulement méconnu du citoyen, comme l’est aussi l’institution judicaire ; il est surtout incompris dans sa place, sa fonction sociale, républicaine et démocratique, constitutionnelle, universelle.

Qui, à l’exception de l’univers du commerce, de l’entreprise, et plus largement de celui des affaires, a-t-il compris que l’avocat est un Conseil avant d’être un défenseur ?

 

Qui fera la démarche de consulter juridiquement un avocat avant de se marier, de se « pacser », d’acheter un immeuble à deux ? Avant de signer un contrat du quotidien ? Avant de décider d’agir personnellement à l’égard de ses voisins dérangeants sans mesurer la portée juridique de l’acte entrepris ? Avant d’accepter une succession, d’établir un testament, de vendre sa voiture d’occasion, de planter une haie, un arbre ou d’ériger un mur de clôture ? Avant de consommer l’ultime point de son permis de conduire ? Avant de décider de nier des évidences en imaginant ainsi échapper à la sanction pénale ? Avant de renoncer à pénétrer dans un commissariat pour y déposer plainte ? Ou avant de s’y rendre pour, précisément, se plaindre ?

 

L’avocat dont le conseil n’a pas été recherché en amont, alors, l’avocat judiciaire, se trouve souvent réduit à la seule fonction de défense largement entendue et, avec elle, à son train de confusions : passions, durées, complexités, stress, amertumes, sentiment de victoire ou de déception, revanche à prendre, sentiment d’injustice, de haine parfois, prison, coût !

Perdu, gagné, innocent, coupable, ou renvoyés dos à dos. La cause n’est pas toujours bonne mais le plaideur a oublié qu’il avait pu être imprudent, qu’il s’était insuffisamment informé, qu’il avait peut-être aussi des torts et que, au fond, les juges pourraient ne pas être de son avis.

 

Car il y a d’abord la Loi et elle n’est pas toujours obscure.

Parce qu’il arrive trop tard, le « bon » avocat est recherché comme l’est le « bon » médecin, le « bon » chirurgien, le « bon » ostéopathe, mais aussi l’artisan, le garagiste… Il est de bon sens commun d’être en quête de celle ou celui qui parait le mieux à même de défendre, de soigner, de construire, réparer, protéger, garantir. Le sauveur !

 

Mais le mal est déjà fait alors que le « bon » avocat était partout, consultable, interrogeable. Cet avocat-là aura toujours un défaut : celui de ne pas être magicien. En d’autres termes, de ne pas pouvoir gommer ce qui a été fait en amont, avant lui, sans lui.

Il n’est plus possible désormais de se passer de lui mais ce que l’avocat a à affronter, n’ayant jamais été mesuré antérieurement par le plaideur qui en est à l’origine cependant, relève d’une sphère (juridique et judiciaire) hermétique à laquelle le justiciable n’est pas préparé.

 

Difficiles d’accès au béotien, l'institution elle-même, les règles, le vocabulaire, les usages, le sens du droit, son esprit, créent souvent un obstacle majeur et des difficultés à comprendre, et à admettre.

L’avocat, dans la confusion des genres et l’imagerie collective, devient « associé » de fait à la « justice » honnie ou acclamée, quand il n’a jamais été la justice d’une quelconque manière.

 

            Avocat, avocates, avocats : seulement des mandataires de leurs clients, spéciaux, juristes, formés, compétents, spécialisés pour certains, expérimentés et, plus rarement, célèbres. Strictement réglementée par la Loi, leur profession est décrite textuellement comme étant celle d’ « auxiliaires de justice » : ce qui signifie seulement qu’ils procèdent de, qu’ils participent à l’œuvre de justice en exerçant leur ministère. Leur place est reconnue et non seulement nécessaire ; elle a une dimension qui n’est pas souvent appréhendée : il n’est pas de démocratie sans avocat.

Pour pouvoir parler librement, défendre sans fard, ils portent une robe quasiment semblable à celle des juges. Ils bénéficient d'une immunité de parole et d'écriture.

            Les mêmes études, presque la même robe (les détails formant différence échappent à l’œil des néophytes), les mêmes connaissances. Là s’arrêtent les ressemblances.

            Les uns jugent ; les autres amènent les premiers à le faire. Voilà tout.