Le harcèlement moral et le management brutal sont des réalités auxquelles de nombreuses entreprises sont confrontées.

Toutefois, ces notions sont-elles synonymes ? le management brutal est-il une composante du harcèlement moral ?

1. DEFINITION DE HARCELEMENT MORAL ET DU MANAGEMENT BRUTAL

Harcèlement moral

L’article L.1152-1 du Code du travail définit le harcèlement moral comme suit « agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité, d’altérer la santé physique ou mentale ou de compromettre l’avenir professionnel » des salariés.

Toute rupture du contrat intervenue dans un contexte de harcèlement moral est nulle.

Management brutal

Le management brutal se caractérise comme un comportement abusif exercé par un supérieur hiérarchique et qui se manifeste par des critiques excessives, des demandes irréalistes, une pression constante et une dévalorisation permanente des employés.

Lien entre les deux

La frontière entre le management brutal et le harcèlement moral est ténue et donne lieu à un contentieux abondant.

En présence d’un management brutal, les salariés invoquent souvent l’existence d’un harcèlement moral.

Et pour cause, les agissements caractérisant un mangement brutal peuvent en effet révéler l’existence d’un harcèlement moral. Le management brutal et le harcèlement moral ont les mêmes conséquences dévastatrices sur la santé mentale et physique des salariés (épuisement professionnel, anxiété, dépression, troubles physiques, etc.).

En plus de nuire à la santé mentale et physique des salariés, ces comportements peuvent entraîner des litiges prud’homaux coûteux.

Cependant, il convient de distinguer management brutal et harcèlement moral.

2. LE MANGEMENT BRUTAL PEUT JUSTIFIER UNE SANCTION MEME SANS HARCELEMENT MORAL

Dans une récente affaire (Cass. Soc. 14 février 2024 n°22-23.620), l’employeur licencie une salariée pour faute grave en raison de son comportement inadapté et harcelant à l’égard de ses collaborateurs.

Le rapport d’enquête faisait état de critiques, moqueries, violence verbale et physique, déstabilisation dans les relations professionnelles et manipulation, allant au-delà de simples plaisanteries entre collègues.

La salariée contestait son licenciement notifié pour faute grave au motif que :

  • L’employeur fondait la faute grave sur les attestations des seules personnes auditionnées lors de l’enquête interne mais sans les corroborer par d’autres éléments, créant ainsi un doute qui doit lui profiter (le principe reste que le doute profite au salarié),
  • La Cour d’appel n’avait ni précisé les salariés victimes de harcèlement moral, ni caractérisé l’existence d’un tel harcèlement dans les conditions définies à l’article L.1152-1 du Code du travail,
  • Elle était victime des jalousies d’autres salariés, en raison de la qualité de son travail très apprécié de ses supérieurs depuis plus de 22 ans,
  • Son ancienneté et son dossier disciplinaire vierge ôtait la gravité de la faute.

La Cour d’appel a validé le licenciement pour faute grave en raison du caractère avéré des faits reprochés, lesquels étaient en outre constitutifs d’une source de souffrance au travail pour les salariés.

La Cour de cassation a confirmé l’arrêt d’appel et a jugé que les 22 années d’ancienneté et l’absence d’antécédents disciplinaires de la salariée ne suffisaient pas à ôter la gravité des agissements commis.

Rappelons que la faute grave doit être fondée sur des éléments précis et matériellement vérifiables, personnellement imputables au salarié, et d’une importance telle qu’ils rendent impossible son maintien dans l’entreprise, y compris durant la période de préavis.

3. COMMENT PREVENIR LE HARCELEMENT MORAL ET LE MANAGEMENT BRUTAL ? 

Assurer une communication ouverte et transparente sur les valeurs, les attentes et le comportement approprié au sein de l’entreprise et établir une politique tolérance zéro claire.

Vous devez insérer cette politique dans le règlement intérieur si vous en avez un.

Organiser des formations sur la reconnaissance et la prévention de ces situations à destination tant des salariés que des managers.

Mettre en place un système d’écoute et de soutien pour les salariés qui se sentent victimes de tels comportements ainsi que ceux qui dénoncent de tels agissements. Attention à respecter les règles relatives aux lanceurs d’alerte.

Agir rapidement lorsqu’une situation de harcèlement est signalée, en menant une enquête interne approfondie (l’enquête interne est obligatoire en cas de dénonciation de harcèlement et est soumise à des règles très strictes qu’il convient de respecter rigoureusement) et en prenant des mesures appropriées.

Il est essentiel de faire appel à un avocat en droit du travail pour mettre en place une politique de gestion des ressources humaines efficace.

Sa connaissance approfondie des lois et des règlementations en matière de droit du travail permet à l’avocat de fournir des conseils personnalisés en fonction des besoins propres de l’entreprise et de proposer les meilleures pratiques pour se conformer à la législation en vigueur.

Son regard contentieux permettra également à l’avocat d’anticiper les litiges afin d’éviter au mieux les contentieux prud’homaux.