Quels réflexes en cas de classement en zone non constructible ?

Dans une région où la pression foncière ne fait que grandir, la découverte du classement de son terrain en zone inconstructible peut avoir des conséquences regrettables. Pour éviter ces désagréments quelques réflexes peuvent être pratiques pour s’en prémunir.

  • Comment déterminer la constructibilité de mon terrain ?

Il est avant tout nécessaire de bien distinguer d’une part les règles d’urbanisme pouvant limiter ou interdire la construction sur un terrain et, d’autre part, les règles de droit privé. Si l’on pense immédiatement au Plan Local d’urbanisme lorsque l’on envisage de construire sur son terrain, il ne faut pas oublier que chaque titre de propriété peut limiter le droit à construire.

Par exemple, une servitude dite non aedificandi peut empêcher, en tout ou partie, de bâtir sur un terrain. Une grande attention doit donc être portée à la lecture de son titre de propriété.

La consultation du Plan Local d’Urbanisme (PLU) applicable sur la Commune où se situe son terrain est ensuite un réflexe indispensable. Il est le document principal à partir duquel sont instruites les autorisations d’urbanisme (Permis de construire, déclaration préalable ou certificat d’urbanisme).

Les PLU se sont considérablement complexifiés ces dernières années en raison de la multiplication des problématiques auxquelles ils répondent : densification, mixité sociale, mobilité etc. La mutualisation des PLU au sein des intercommunalités a rendu leur étude plus ardue également. Par exemple, les PLU intercommunaux de GRAND LAC et de GRAND CHAMBERY régissent l’utilisation des sols de pas moins de 55 communes.

Le règlement est la partie du PLU la plus importante pour connaître les contraintes d’urbanisme existantes sur un terrain. Il comprend une partie écrite et une partie graphique qui détermine le zonage des secteurs

A ce stade, le second réflexe à avoir consiste à le consulter souvent ! Toujours en raison de leur complexité, les PLU évoluent fréquemment. Cela peut affecter l’ensemble du territoire ou seulement certains secteurs. Il est donc important de connaître les évolutions du PLU envisagées pour pouvoir intervenir en amont.

  • Quels éléments du PLU limitent la constructibilité d’un terrain ?

Les PLU comprennent 4 grands types de zones : Les zones urbaines sont, en principe, constructibles. Elles ne doivent pas être confondues avec les zones à urbaniser (AU) qui ont vocation à être urbanisées mais ne peuvent être immédiatement constructibles faute d’une desserte suffisante aux réseaux publics En revanche, un classement en zone Naturelle ou Agricole entraîne, dans la plupart des cas, l’inconstructibilité du terrain. Ces zones protègent, en effet, les terres agricoles et les espaces naturels. Quelques exceptions peuvent être autorisées par les PLU pour certaines constructions agricoles ou équipements collectifs mais toute construction nouvelle destinée à l’habitation est prohibée.

En plus du zonage général, les règlements contiennent également d’autres éléments limitant la construction sur un terrain. Ils sont moins évidents à identifier que les zones U AU A ou N. Sans être exhaustif, on peut évoquer les espaces boisés classés qui concernent les bois, forêts à conserver ou à créer. Un seul arbre peut être classé en espace boisé classé et prohibe toute édification qui compromettrait sa conservation.

L’article L.151-41 du code de l’urbanisme permet aux auteurs des PLU de prévoir des emplacements réservés à des constructions d’intérêt général (espaces verts, voirie etc.). Véritables outils au service des collectivités, les emplacements réservés doivent rester libres de toute utilisation qui serait contraire à leur destination future. Cela signifie, par exemple, qu’une parcelle grevée d’un emplacement réservé à la construction d’un parking et classée en zone U ne pourra accueillir que des édifices permettant de créer le parking. Compte tenu des contraintes induites par un emplacement réservé, les propriétaires peuvent exercer leur droit de délaissement et mettre en demeure la collectivité d’acquérir leur terrain.

Au-delà des règles édictées par les auteurs du PLU, d’autres règles dites « indépendantes » sont intégrées dans celui-ci et peuvent affecter la constructibilité d’un terrain. C’est le cas notamment des Plans de prévention des risques qui délimitent les différents secteurs d’un territoire en fonction des risques naturels ou industriels.

Au regard de la diversité des contraintes d’urbanisme qui peuvent affecter la constructibilité d’un terrain, certaines peuvent apparaître contestables et faire l’objet d’un recours.

  • Contester le classement de sa parcelle, une bonne idée ?

La saisine du juge administratif ne peut s’effectuer sans respecter des démarches préalables indispensables.

Premièrement : vérifier si le PLU est en cours d’élaboration ou déjà approuvé. Si la phase d’élaboration n’est pas terminée, des remarques peuvent être formulées lors de la phase de concertation avec le public pour attirer l’attention des rédacteurs sur les conséquences de l’évolution du PLU envisagée. Toutefois, les auteurs du PLU ne sont pas tenus de prendre en compte les avis formulés.

Deuxièmement, si le PLU a été approuvé, une action contentieuse peut être envisagée. Il est alors indispensable de saisir préalablement la collectivité compétente d’un recours gracieux pour lui demander de retirer le PLU illégal sans quoi tout recours devant le juge administratif sera irrecevable.

Le recours devant le juge administratif doit être adressé contre la délibération approuvant le PLU. Attention à ne pas contester n’importe quel document faute de quoi le recours serait également irrecevable. L’action est également enfermée dans des délais stricts (2 mois à compter de l’affichage de la délibération en mairie ou de la publication dans un journal local). Une fois ce délai écoulé, la contestation du PLU ne pourra s’effectuer que par la voie de l’exception d’illégalité.

La tentation est souvent grande de faire valoir devant le juge l’atteinte disproportionnée à sa propriété privée. Pourtant , dans la très grande majorité des cas, cet argument n’est pas opérant malgré la perte de valeur du terrain.

La jurisprudence administrative rappelle de manière constante que nul n’a de droit acquis au maintien d’un classement. Cela signifie que la collectivité qui élabore le PLU est libre d’élaborer la politique d’aménagement et de modifier le zonage en conséquence. Le juge administratif exerce un contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation pour vérifier la légalité des éléments du règlement d’un PLU. Autrement dit, il ne se prononce pas sur l’opportunité de l’évolution du zonage dans le PLU, mais il vérifie si les éléments du classement correspondent aux objectifs fixés dans celui-ci. Il faut donc rapporter la preuve que le classement contesté est contraire aux objectifs fixés dans le PLU et notamment ceux contenus dans le Programme d’aménagement et de développement durable.

Il est courant que les propriétaires voyant leur parcelle devenir non constructible souhaitent faire valoir l’absence de potentiel agricole de leur terrain pour contester son classement en zone A ou encore la présence des raccordements nécessaires à leur aménagement. Ces éléments sont en général insuffisants pour caractériser une erreur manifeste d’appréciation. Les auteurs du PLU peuvent également décider de classer une parcelle en zone A malgré la présence d’habitations. Il est indispensable d’avoir une lecture globale du PLU pour déterminer l’utilité d’un recours contentieux. Un raisonnement juridique approfondi pour étayer les raisons du recours augmente les chances de succès.

Enfin et pour finir, un recours contre un PLU n’a pas pour effet de suspendre son application. L’administration est tenue de ne pas faire application d’un règlement illégal mais le juge administratif peut prononcer une annulation partielle du PLU uniquement sur le zonage contesté afin de préserver la stabilité du document d’urbanisme.