La journaliste Rédacteur reporter radio a interjeté appel du jugement du conseil de prud’hommes de Paris.
Dans un jugement du 3 octobre 2023 (RG 23/05907), le Conseil de prud’hommes de Paris a requalifié une succession de 16 ans CDD en CDI à temps complet et a jugé que la rupture s’analysait en un licenciement sans cause.
La journaliste obtient également un rappel de salaire pendant les périodes intercalaires / interstitielles et une prime RER.
Au total, la journaliste obtient 80 000 euros bruts.
1) Faits
Madame X a été employée par X, dans le cadre de contrats à durée déterminée de remplacement à compter de juin 2007.
Le dernier contrat à durée déterminée de remplacement en qualité de Rédactrice Reporteur a pris fin le 10 septembre 2023.
2) Motifs du jugement du conseil de prud'hommes du 3 octobre 2023
Par jugement du 3 octobre 2023, le Conseil de prud’hommes de Paris, statuant publiquement par jugement contradictoire et en premier ressort :
. DIT irrecevable comme prescrite la demande de requalification au titre des irrégularités dans la rédaction des CDD pour la période antérieure au 26/07/2021.
. DIT irrecevables comme prescrites les demandes antérieures au 26/07/2020 pour les rappels de salaires au titre des périodes interstitielles.
. FIXE le salaire de Madame Y à la somme de 3187,83 euros.
. REQUALIFIE les CDD en CDI.
. DIT que la rupture s'assimile à un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
. CONDAMNE la société X à verser à Madame Y les sommes suivantes :
- 3187.83 euros à titre d'indemnité de requalification
- 25761,99 euros à titre de rappel de salaire pour les périodes interstitielles
- 2576,19 euros au titre des congés payés afférents
- 6375.66 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis
- 637,56 euros au titre des congés payés afférents
- 22314.81 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement
- 100 euros au titre de la prime RER
Avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de jugement.
RAPPELLE qu'en vertu de l'article R.1454-28 du Code du Travail, ces condamnations sont exécutoires de droit à titre provisoire, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire. Fixe cette moyenne à la somme de 3187,83 euros.
- 19123,86 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement.
- 1000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile
DÉBOUTE Madame Y du surplus de ses demandes.
CONDAMNE la société X aux dépens.
2) Sur la demande de requalification des CDD en CDI
Vu les articles L 1242-1, L 1242-2, L 1242-12, L 1245-1 et L 1245-2 du Code du travail
Attendu, en droit, qu'un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire et notamment pour le remplacement d'un salarié absent; qu'il ne doit pas avoir pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale de l'entreprise; que le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif, à défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée; que lorsque le conseil de prud'hommes fait droit à la demande du salarié, il lui accorde une indemnité, à la charge de l'employeur, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire, sans préjudice de l'application des dispositions relatives aux règles de rupture du contrat de travail à durée indéterminée. En cas de requalification d'un CDD en CDI, l'effet de la requalification remonte au premier CDD irrégulier.
Attendu, en l'espèce, que la demanderesse fait grief à la défenderesse que certains contrats ne sont pas signés par l'une ou l'autre des parties, ce qui équivaut à une absence d'écrit, que certains contrats lui ont été remis plus de deux jours après l'embauche et que les règles relatives aux CDD de remplacement n'ont pas été respectées.
Il ressort des contrats produits que le CDD de remplacement qui a débuté le 13 avril 2022 pour une durée courant jusqu'au 3 juillet 2022, n'est pas signé par les parties. Ce défaut de signature constitue une absence d’écrit ; ce contrat est donc réputé être à durée indéterminée. La demanderesse ne verse aucun élément de nature à rapporter la preuve que les motifs de remplacement ne seraient pas justifiés et qu'ils auraient eu pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale de l'entreprise.
Seul le CDD du 17 avril au 30 avril 2023, semble présenter une difficulté sur l'exactitude du motif de remplacement. Toutefois, ce CDD étant intervenu postérieurement au CDD réputé non-écrit d'avril à juillet 2022, cette irrégularité n'a pas de portée sur l’issue du litige opposant les parties.
Dès lors, le Conseil constate la violation de dispositions relatives aux cas de recours à un contrat à durée déterminée et dit qu'il y a lieu de requalifier la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée.
Cette requalification prend effet à compter du contrat ayant débuté le 13 avril 2022, avec une ancienneté contractuelle fixée au 11 février 2017.La requalification du CDD en CDI ouvre droit à la demanderesse de percevoir une indemnité de requalification.
La demanderesse n'apporte aucun élément de nature à justifier l'existence d'un préjudice spécifique.
La difficulté à trouver un logement à Lille n'est rapportée par aucune pièce et il est établi que la demanderesse a décliné plusieurs offres de CDI.
En conséquence, le Conseil condamne la défenderesse à verser une indemnité de requalification correspondant à un mois de salaire, soit 3 187,83 €.
3) Sur la demande d’indemnités pour remise tardive des contrats
Vu les articles L 1242-13 et L 1245-1 du Code du travail
Attendu, en droit, que le contrat de travail est transmis au salarié, au plus tard, dans les deux jours ouvrables suivant l'embauche et que la remise tardive ouvre droit à une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.
Attendu, en l'espèce, que la demanderesse justifie la remise tardive de seulement quatre contrats sur plus de trois cents conclus avec la défenderesse. Le premier contrat concerné est celui du 13 avril au 3 juillet 2022 qui est réputé non écrit du fait de son absence de signature et est de ce fait requalifié en CDI : il ne peut donc pas donner lieu à une indemnité pour remise tardive.
Pour les autres contrats, outre le fait qu'ils ont été conclus à une période postérieure à la requalification on CDI, il apparait que le retard est dû à un bug informatique indépendant de la volonté de l'employeur. Ils ne peuvent donc pas donner lieu à une indemnité pour remise tardive.
En conséquence, le Conseil déboute la demanderesse de sa demande d'indemnité pour remise tardive des contrats de travail à durée déterminée.
4) Sur la demande de rappel de salaire au titre des périodes interstitielles
Attendu, en droit, que le salarié peut obtenir le paiement des salaires au titre des périodes d'inactivité séparant des CDD requalifiés en CDI, dès lors qu'il s'est tenu à la disposition de l'employeur pendant les périodes intermédiaires.
Attendu, en l'espèce, qu'il ressort des conditions dans lesquelles ont été conclus et exécutés les CDD successifs requalifiés en CDI que la demanderesse se tenait à la disposition permanente de la défenderesse.
Dès lors, il y a lieu au versement d'un rappel de salaire au titre des périodes interstitielles sur la pentode non prescrite, sur la base d'un salaire à temps plein de 3 187,83 €.
Sur cette base, le montant du rappel de salaire est fixé à 25 761,99 € auquel s'ajoute la somme de 2 576.19 € au titre des conges payes afférents.
Dès lors, il y a lieu au versement d'un rappel de salaire au titre des périodes interstitielles sur la période non prescrite, sur la base d'un salaire à temps plein de 3 187,83 €. Sur cette base, le montant du rappel de salaire est fixé à 25 761,99 € auquel s'ajoute la somme de 2 ,19 € au titre des congés payés afférents.
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Frédéric CHHUM avocat et ancien membre du conseil de l’ordre des avocats de Paris (mandat 2019-2021)
CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille)
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