« Le régime d'exécution des peines privatives et restrictives de liberté vise à préparer l'insertion ou la réinsertion de la personne condamnée afin de lui permettre d'agir en personne responsable, respectueuse des règles et des intérêts de la société et d'éviter la commission de nouvelles infractions.
Ce régime est adapté au fur et à mesure de l'exécution de la peine, en fonction de l'évolution de la personnalité et de la situation matérielle, familiale et sociale de la personne condamnée, qui font l'objet d'évaluations régulières. »
C’est en ces termes que le II de l’article 707 du Code de procédure pénale fixe les objectifs du régime d’exécution des peines.
Les procédures d’aménagement de peine sont importantes en cela qu’elles permettent souvent de moduler une décision de condamnation à un emprisonnement ferme.
Le présent article a donc pour objet de présenter synthétiquement les différentes voies s’offrant au condamné libre.
1- Qu’est ce qu’un aménagement de peine ?
Un aménagement de peine est un mécanisme permettant d’adapter l’exécution d’une sanction à la situation individualisée du condamné.
Pour ce faire, différentes solutions substitutives à l’incarcération « classique » peuvent être proposées.
Néanmoins, il convient de noter que l’aménagement de peine n’est jamais automatique.
2- Quelles peines peuvent être aménagées ?
Nous nous concentrerons dans cet article sur les condamnations à un emprisonnement ferme.
Depuis la réforme introduite par la loi n°2019-222 du 23 mars 2019, les articles 132-19 et 132-25 du Code pénal disposent :
- Que les peines d’emprisonnement inférieures à un mois sont proscrites ;
- Que les peines d’emprisonnement inférieures ou égale à six mois doivent être aménagées sauf impossibilité résultant de la personnalité ou de la situation du condamné ;
- Que les peines d’emprisonnement supérieures à six mois mais inférieures ou égales à un an peuvent être aménagées en fonction de la situation du condamné.
Ainsi, les peines supérieures à une année d’emprisonnement ne sont pas susceptibles d’aménagement et doivent conséquemment être exécutées sous la forme d’une incarcération.
3- Qui peut prononcer l’aménagement de peine ?
La réforme du 23 mars 2019 a insufflé un changement de paradigme en mettant désormais à la charge des juridictions, se prononçant sur la culpabilité et la peine, le soin de fixer l’aménagement dont pourra bénéficier le condamné.
Dans cette optique, le juge d’application des peines n’intervient qu’a posteriori de l’aménagement décidé ab initio, ou en cas d’impossibilité, pour la juridiction de jugement, de fixer celui-ci.
Nous verrons ainsi que l’aménagement peut d’abord être décidé par la juridiction de jugement (a) mais également par le juge d’application des peines (b).
a- L’aménagement de peine décidé par la juridiction de jugement
En application de l’article 464-2 du Code de procédure pénale, il appartient au Tribunal correctionnel, lorsqu’il ne prononce pas un mandat de dépôt, un mandat de dépôt différé ou un mandat d’arrêt à l’encontre du condamné, de déterminer immédiatement l’aménagement de peine dont ce dernier pourra bénéficier.
On parle alors d’aménagement ab initio car faisant suite à l’audience portant sur la culpabilité et la sanction.
Toutefois, cela ne peut se faire que lorsque le Tribunal dispose de suffisamment d’éléments de nature à l’éclairer tant sur la personnalité que sur la situation personnelle et professionnelle du condamné.
Il est donc particulièrement important, pour une personne poursuivie devant la juridiction correctionnelle, de produire tous les justificatifs de nature à permettre au Tribunal de se positionner utilement.
Dans ce cadre, en présence d’un prévenu reconnaissant sa culpabilité, et lorsque le prononcé d’une peine d’emprisonnement ferme s’annonce inévitable, il peut être opportun de soumettre au Tribunal un projet d’aménagement de peine construit et réfléchi en amont, afin d’offrir une solution alternative à l’incarcération.
A défaut et conformément aux articles 464 et 723-15 du Code de procédure pénale, lorsque le Tribunal estime être dans l’incapacité de trancher sur l’audience la question de l’aménagement, une convocation est remise au condamné d’avoir à se présenter devant le juge d’application des peines, à qui il appartiendra de se prononcer ultérieurement sur les modalités d’exécution de la sanction.
b- L’aménagement de peine décidé par le juge d’application des peines
Qu’il s’agisse d’un aménagement de peine décidé par la juridiction de jugement ou par lui, le juge d’application des peines conserve toujours la maitrise sur ces mesures ; aussi peut-il modifier les modalités d’exécution d’un aménagement ou encore substituer une mesure à une autre (v. entre autres les arts. 723-2, 723-15 et 747-1-1 du CPP).
En outre et comme indiqué supra, lorsque la juridiction de jugement ne s’est pas déterminée sur l’aménagement de peine, c’est au juge d’application des peines de le faire.
Habituellement, le condamné est d’abord reçu par le Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation (SPIP) lequel est chargé de recueillir des éléments quant à la situation matérielle, sociale et familiale de la personne pour ensuite formuler des préconisations.
Ici encore, l’assistance par un Avocat devant le juge d’application des peines est importante afin de maximiser les chances d’obtenir un aménagement utile et adapté.
4- Quels aménagements de peine peuvent être prononcés ?
De multiples aménagements de peine peuvent être décidés. Nous nous focaliserons, dans cet article, sur les principaux.
a- La conversion de peine
En application des articles 723-15 et 747-1 du Code de procédure pénale, le juge d’application des peines peut décider de convertir la peine d’emprisonnement ferme en une autre sanction.
Pour ce faire, la peine d’emprisonnement ferme à exécuter doit être inférieure ou égale à six mois.
Quatre types de conversions existent :
- La conversion en une peine de jours-amende : dans ce cas, le condamné doit s’acquitter d’une amende fixée par le juge dans un délai égal à la peine d’emprisonnement prononcée, à défaut de quoi il peut être incarcéré ;
- La conversion en une peine de travail d’intérêt général : dans cette hypothèse, le condamné doit effectuer un travail bénévole de 20 à 400 heures auprès d’une collectivité ou d’une association agréée, à défaut de quoi il peut être incarcéré ;
- La conversion en une détention à domicile sous surveillance électronique (bracelet électronique) ;
- La conversion en un emprisonnement assorti d’un sursis probatoire renforcé comprenant de modules visant à favoriser l’insertion du condamné au travers d’un suivi personnalisé.
b- La détention à domicile sous surveillance électronique
Il s’agit de la mesure la plus connue mais également la plus fréquente en matière d’aménagement de peine.
Dans ce cadre, le condamné est contraint de porter un bracelet électronique l’astreignant à demeurer en son domicile selon les modalités fixées par le juge d’application des peines.
Typiquement, la personne est autorisée à sortir la journée pour exercer une activité professionnelle ou participer à des démarches d’insertion, et doit regagner son logement aux heures fixées.
c- La semi-liberté
La mesure de semi-liberté implique une incarcération « partielle » du condamné en un centre de semi-liberté.
Schématiquement, la personne est astreinte à demeurer dans le centre à l’exception de certains temps où elle est autorisée à en sortir, le plus souvent pour exercer une activité professionnelle, suivre une formation, ou participer à des démarches d’insertion.
d- Le placement à l’extérieur
Il s’agit d’une mesure s’exécutant sous le contrôle de l’administration pénitentiaire dans le cadre de laquelle le condamné est pris en charge par une association conventionnée en lien avec le Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation, afin de mettre en place un suivi global et individualisé sur les problématiques conduisant au passage à l’acte infractionnel.
A cette fin, un certain nombre d’activités sont proposées.
5- Que se passe-t-il en cas de non-respect de l’aménagement de peine ?
En cas d’inobservation des modalités d’application de l’aménagement de peine, fixées par la juridiction de jugement ou le juge d’application des peines, la mesure peut être restreinte et même révoquée aux termes d’un débat contradictoire. Dans ce dernier cas, le condamné exécutera sa fin de peine sous la forme d’une incarcération en établissement pénitentiaire.
Par ailleurs, et selon les cas, des poursuites pénales peuvent être engagées pour le délit d’évasion, conformément aux articles 434-27 à 434-37 du Code pénal. Lorsqu’une nouvelle peine est prononcée à ce titre, elle se cumule sans possibilité de confusion avec celle qui était en cours d’exécution.
Pour conclure, les procédures d’aménagement de peine sont complexes car multiples et parfois opaques. Toutefois, elles permettent souvent d’éviter l’exécution d’un emprisonnement ferme sous la forme d’une incarcération, au profit d’une mesure en milieu ouvert adaptée à la situation matérielle, sociale et familiale du condamné.
Aussi, il est fortement recommandé d’être assisté par un Avocat maitrisant ce contentieux spécifique.
N’hésitez pas à faire appel à mon cabinet pour de plus amples renseignements.
Maître Guillaume RAYMOND.
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