Des intérêts croisés derrière la rupture diplomatique entre le Pérou et le Mexique ?
La récente rupture des relations diplomatiques entre le Pérou et le Mexique semble plus profonde que les justifications officielles. Si l’asile accordé par Mexico à l’ancienne Première ministre Betssy Chávez a servi de déclencheur immédiat, plusieurs signes laissent penser que cette décision s’inscrit dans un contexte géopolitique et économique bien plus large.
Depuis l’inauguration du port de Chancay à la fin de 2024, le Pérou s’est affirmé comme un acteur clé du commerce transpacifique. Ce port, construit en partenariat avec la société chinoise COSCO Shipping, représente un maillon stratégique des nouvelles routes maritimes reliant l’Amérique du Sud à l’Asie. Il incarne aussi l’approfondissement du rapprochement entre Lima et Pékin, devenu en quelques années un pilier de la politique économique péruvienne.
Au nord du continent, le Mexique mise sur le Corridor interocéanique du Isthme de Tehuantepec, projet visant à relier les océans Pacifique et Atlantique et à concurrencer le canal de Panama. Deux ambitions, deux visions du développement régional : pendant que le Pérou s’intègre à la sphère d’influence chinoise, le Mexique consolide ses liens avec l’Amérique du Nord, tout en cherchant à rester un acteur logistique global.
Ces projets, bien que distincts, placent les deux pays sur des trajectoires économiquement concurrentes. La rupture diplomatique pourrait donc traduire, au-delà des motifs officiels, un réalignement stratégique face à la montée des intérêts chinois dans le Pacifique sud et à la volonté mexicaine de défendre sa propre zone d’influence commerciale.
À ce contexte s’ajoute une préoccupation sécuritaire grandissante. Le 23 octobre 2025, José Luis Gil Becerra, ex-directeur du renseignement au ministère péruvien de l’Intérieur, a révélé que 16 organisations criminelles étrangères opèrent sur le sol péruvien — dont six d’origine mexicaine, parmi lesquelles le Cartel Jalisco Nueva Generación. Ces groupes, selon lui, cherchent à « contrôler des territoires et à influencer le pouvoir politique ».
Cette affirmation soulève une question délicate : les tensions diplomatiques pourraient-elles être liées, en partie, à la présence croissante de réseaux criminels transnationaux ? Rien ne le prouve officiellement, mais l’articulation entre commerce, influence géopolitique et criminalité organisée esquisse un panorama troublant.
Plus qu’un simple différend diplomatique, la rupture entre Lima et Mexico semble refléter les luttes invisibles pour le contrôle des routes et des ressources du Pacifique latino-américain, là où s’entremêlent désormais économie, sécurité et pouvoir.


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