Un père et ses trois enfants, propriétaires d’un château, ont donné à un agent immobilier un mandat exclusif pour la vente de ce bien. L'ayant finalement vendu sans le concours de l’agent, un jugement les a condamnés au paiement de la clause pénale du mandat de vente. Sur ces entrefaites, un tiers au mandat a été déclaré coupable d'abus de faiblesse sur la famille propriétaire du château, par le juge pénal. Au plan civil, les juges d’appel prononcent alors la nullité du mandat conclu entre les propriétaires et l'agence immobilière et rejettent la demande en paiement de la clause pénale. Le mandat est nul par application de l'article 414-1 du code civil aux termes duquel il faut être sain d'esprit pour faire un acte valable. La Cour de cassation rejette ici le pourvoi de l’agent immobilier.

 

L'altération des facultés intellectuelles ressort de la procédure suivie à rencontre du tiers déclaré coupable d'abus de faiblesse pour avoir usé de pressions graves ou réitérées sur les propriétaires, ou de techniques propres à altérer leur jugement, ce qui les a conduits à accomplir des actes qui leur étaient préjudiciables, tels que la vente du château. Or, c'est précisément dans ce contexte que le mandat a été donné à l’agent immobilier de vendre ce bien. Dès lors, la Haute juridiction approuve la cour d’appel d’avoir estimé, dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation, que le mandat de vente était nul pour insanité d'esprit des mandants au moment de la signature de cet acte.

Le fait que l’agent immobilier ignorait l'état de sujétion dans lequel avaient été placée la famille est sans incidence sur la validité du mandat, dont la nullité résulte de l'insanité d'esprit des propriétaires mandants dans la mesure où l'article 414-1 ne pose aucunement comme condition la connaissance de celle-ci par le cocontractant.

Quant au fait que l’agent immobilier ait été totalement étranger à l'instance pénale, il est également inopérant dès lors que l'altération des facultés intellectuelles a été retenue par le juge pénal pour caractériser l'abus de faiblesse, peu important que l'agent ait été ou non partie à cette instance.

 

Cass. 1re civ. 13 avr. 2016, n°15-17.587