Une affaire récente rappelle que les collectivités territoriales doivent prendre en compte les règles protectrices de la nature lorsqu’elles aménagent leur territoire.
Une communauté de communes a décidé d’étendre une zone d’activités qui regroupe des entreprises de transformation de bois. Pour cette extension, la collectivité devait acquérir plusieurs terrains privés. Face aux refus des propriétaires, les parcelles ont été achetées par la voie d’une expropriation.
Cette démarche est une acquisition forcée : elle permet à une personne publique de devenir propriétaire d’un bien d’un particulier en échange d’une indemnité. Cet achat n’est possible que s’il présente une utilité publique et sous réserve de respecter une procédure stricte.
En l’occurrence, l’expropriation est jugée illégale car plusieurs règles ont été méconnues.
- Sur l’absence d’utilité publique du projet
Dans cette affaire, les juges devaient se prononcer sur la légalité du projet. Pour ce contrôle, ils prennent en compte les inconvénients de l’expropriation, par exemple les effets néfastes sur l’environnement engendrés par le projet envisagé. Ces inconvénients doivent être contrebalancés par les avantages, comme le développement économique d’un secteur.
En l’occurrence, les juges limogeais ont considéré que l’opération d’extension de la zone d’activités ne satisfait pas suffisamment l’intérêt général pour plusieurs raisons.
Premièrement, l’administration défendait son projet en ce qu’il serait créateur d’emplois. Cependant, le tribunal a relevé qu’aucune démonstration précise n’a été établie sur les retombées économiques des futures activités.
Deuxièmement, le projet va engendrer des nuisances sur la biodiversité des environs : des zones humides et des espèces protégées.
Ces atteintes inquiètent d’autant plus la juridiction que la société bénéficiaire du projet et qui exploite la zone actuelle a déjà été condamnée par la justice pour la méconnaissance de la réglementation environnementale.
L’ensemble de ces inconvénients conduisent les juges à annuler ce projet économique.
- Sur l’absence d’évaluation environnementale
Pour certaines opérations d’aménagement, une évaluation environnementale doit être réalisée. Cette démarche permet d’analyser les effets du projet et prévenir les dommages sur la nature. Elle garantit aussi au public d’avoir une information complète sur les incidences réelles des travaux sur la faune et la flore. Enfin, les résultats de cette étude guident l’administration lorsqu’elle doit autoriser un projet.
Certains travaux sont obligatoirement soumis à une telle analyse en fonction de leurs caractéristiques propres.
En l’occurrence, compte-tenu de la taille du projet d’extension de 16 hectares, une évaluation environnementale était nécessaire. L’appréciation de l’administration qui avait autorisé le projet a pu être faussée. L’étude technique, qui aurait pu identifier des effets négatifs des travaux, aurait pu conduire l’administration à refuser l’extension.
La méconnaissance de cette procédure entraine, elle aussi, l’annulation du projet.
Cette décision rappelle qu’avant de mener une procédure d’expropriation, les collectivités territoriales doivent :
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démontrer que le projet présentera une utilité publique,
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s'interroger sur l’obligation de réaliser une évaluation environnementale.
TA Limoges, 3 décembre 2024, n°22200591
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