De nombreux fonctionnaires territoriaux font face, et ce de manière inquiétante, à la problématique du mal être au travail se matérialisant bien souvent par des troubles « anxio-dépressifs ».

Il n’est pas rare de constater chez ces agents un sentiment de honte et de détresse, que le Congé de maladie ne suffit pas à apaiser.

Lorsqu’il s’avère que les troubles subis ont bien été contractés en service et du fait de l’exercice des fonctions exercées (organisation du temps de travail, modification des fonctions exercées, nouveau management public, pression du résultat etc…), il existe des solutions juridiques.

La demande de reconnaissance de l’imputabilité au service du trouble dépressif en est une.  

 

I- Les principes et les textes applicables dans la fonction publique territoriale :

Il est possible de demander l'imputabilité au service d’un congé de maladie pour l’affection des troubles dépressifs, en application de l’article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale qui dispose :

« Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ».

Dans un récent arrêt du 13 mars 2019, le Conseil d'État a précisé les conditions de reconnaissance de l'imputabilité au service d'une maladie contractée par un fonctionnaire territorial. Il indique notamment qu'une dépression peut être reconnue comme liée aux fonctions même en l'absence de volonté de l'employeur de porter atteinte aux droits ou à la santé de son agent.

Le pourvoi est l'occasion pour le Conseil d'État de poser une définition générale de la maladie professionnelle.

Il s’agit d’« une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service ».

Le juge, s’il est saisi évidemment, doit apprécier si les conditions de travail sont à l'origine de la maladie.

 

Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

 

II- Comment l’obtenir :

Il faut en faire la demande par LRAR auprès de l’autorité décisionnaire en demandant que l’affection de trouble anxiodépressif soit déclarée en maladie imputable au service. Il faudra également joindre à ce courrier les certificats médicaux du médecin psychiatre et du médecin traitant.

 

A minima, il faudra préciser dans le courrier les liens entre l’affection et le service.

Lorsque la demande d’imputabilité au service est à l’initiative de l’agent, l’administration employeur doit la transmettre dans un délai de trois semaines au secrétariat de la commission de réforme qui en accuse réception à l’agent et à l’employeur.

Passé ce délai, il est possible de saisir directement la commission de réforme en envoyant au secrétariat un double de la demande, par lettre recommandée avec accusé de réception.

 

Trois possibilités de réponse pour l’autorité hiérarchique :

1- Elle reconnait spontanément l’imputabilité au service après avoir éventuellement consulté un médecin expert agréé.

2- Elle sollicite l’avis la commission de réforme, qui appréciera l’imputabilité au service.

3- Elle ne reconnaît pas spontanément l’imputabilité au service et ne saisit pas non plus la commission de réforme pour avis.

La décision (explicite par retour ou implicite à défaut de réponse du Maire dans les deux mois de la demande) ou l’arrêté refusant d’accorder l’imputabilité au service pourra être déférée au tribunal administratif dans le délai de deux mois à compter de sa notification.

Je précise également que l’avis de la commission de réforme est purement consultatif, il ne peut donc pas faire l’objet d’un recours devant le juge administratif.

Néanmoins, l’irrégularité de la procédure devant la commission de réforme pourra être invoquée dans le cadre d’un recours en annulation contre la décision ou l’arrêté refusant l’imputabilité au service.

Pierre Castéra

Avocat

Docteur en droit

pierre.castera-avocat@outlook.fr

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