L’article 49 de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République a soumis l’instruction en famille à un « régime d’autorisation administrative » au lieu du « régime déclaratif » antérieurement en vigueur (conclusions du rapporteur public sur l’arrêt du Conseil d’Etat du 13 décembre 2022, n° 462274).

Depuis lors, l’instruction étant obligatoire « pour chaque enfant dès l'âge de trois ans et jusqu'à l'âge de seize ans » (article L. 131-1 du code de l’éducation), « les personnes responsables d'un enfant soumis à (cette) obligation scolaire (…) doivent le faire inscrire dans un établissement d'enseignement public ou privé ou bien, à condition d'y avoir été autorisées par l'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation, lui donner l'instruction en famille » (article L. 131-5 du code de l’éducation).

Cette « obligation s'applique à compter de la rentrée scolaire de l'année civile où l'enfant atteint l'âge de trois ans » (article L. 131-5 du code de l’éducation).

Dans sa version issue de l’article 49 de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, l’article L. 131-5 du code de l’éducation a notamment prévu que « l'autorisation (de donner l'instruction en famille) est accordée pour les motifs suivants, sans que puissent être invoquées d'autres raisons que l'intérêt supérieur de l'enfant :

1° L'état de santé de l'enfant ou son handicap ;

2° La pratique d'activités sportives ou artistiques intensives ;

3° L'itinérance de la famille en France ou l'éloignement géographique de tout établissement scolaire public ;

4° L'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif, sous réserve que les personnes qui en sont responsables justifient de la capacité de la ou des personnes chargées d'instruire l'enfant à assurer l'instruction en famille dans le respect de l'intérêt supérieur de l'enfant. Dans ce cas, la demande d'autorisation comporte une présentation écrite du projet éducatif, l'engagement d'assurer cette instruction majoritairement en langue française ainsi que les pièces justifiant de la capacité à assurer l'instruction en famille. »

Elle « est accordée pour une durée qui ne peut excéder l'année scolaire. Elle peut être accordée pour une durée supérieure lorsqu'elle est justifiée par l'un des motifs prévus au 1°. Un décret en Conseil d'Etat précise les modalités de délivrance de cette autorisation » (article L. 131-5 du code de l’éducation).

L’article L. 131-5 du code de l’éducation a, en outre, prévu notamment :

« L'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation peut convoquer l'enfant, ses responsables et, le cas échéant, les personnes chargées d'instruire l'enfant à un entretien afin d'apprécier la situation de l'enfant et de sa famille et de vérifier leur capacité à assurer l'instruction en famille.

En application de l'article L. 231-1 du code des relations entre le public et l'administration, le silence gardé pendant deux mois par l'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation sur une demande d'autorisation formulée en application du premier alinéa du présent article vaut décision d'acceptation.

La décision de refus d'autorisation fait l'objet d'un recours administratif préalable auprès d'une commission présidée par le recteur d'académie, dans des conditions fixées par décret.

Le président du conseil départemental et le maire de la commune de résidence de l'enfant sont informés de la délivrance de l'autorisation. Lorsqu'un enfant recevant l'instruction dans la famille ou l'un des enfants du même foyer fait l'objet de l'information préoccupante prévue à l'article L. 226-3 du code de l'action sociale et des familles, le président du conseil départemental en informe l'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation, qui peut alors suspendre ou abroger l'autorisation qui a été délivrée aux personnes responsables de l'enfant. Dans cette hypothèse, ces dernières sont mises en demeure de l'inscrire dans un établissement d'enseignement scolaire, dans les conditions et selon les modalités prévues à l'article L. 131-5-1 du présent code.

Lorsque, après concertation avec le directeur de l'établissement d'enseignement public ou privé dans lequel est inscrit un enfant, il est établi que l'intégrité physique ou morale de cet enfant est menacée, les personnes responsables de l'enfant peuvent lui donner l'instruction dans la famille après avoir sollicité l'autorisation mentionnée au premier alinéa du présent article, dans le délai restant à courir avant que cette autorisation ne leur soit accordée ou refusée.

L'enfant instruit dans la famille est rattaché administrativement à une circonscription d'enseignement du premier degré ou à un établissement d'enseignement scolaire public désigné par l'autorité de l'Etat compétente en matière d'éducation. »

Par sa décision n° 2021-823 DC du 13 août 2021, le Conseil constitutionnel a jugé que les dispositions de l’article 131-5 du code de l'éducation issues de l’article 49 de la loi confortant le respect des principes de la République « ont entendu imposer à l'autorité administrative de s'assurer que cette personne est en mesure de permettre à l'enfant d'acquérir le socle commun de connaissances, de compétences et de culture défini à l'article L. 122-1-1 du code de l'éducation au regard des objectifs de connaissances et de compétences attendues à la fin de chaque cycle d'enseignement de la scolarité obligatoire », qu’en « prévoyant que cette autorisation est accordée en raison de « l'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif », le législateur a entendu que l'autorité administrative s'assure que le projet d'instruction en famille comporte les éléments essentiels de l'enseignement et de la pédagogie adaptés aux capacités et au rythme d'apprentissage de l'enfant » et qu’il « appartiendra, sous le contrôle du juge, au pouvoir réglementaire de déterminer les modalités de délivrance de l'autorisation d'instruction en famille conformément à ces critères et aux autorités administratives compétentes de fonder leur décision sur ces seuls critères excluant toute discrimination de quelque nature que ce soit » (paragraphe 76).

Sous cette réserve, il a déclaré conformes à la Constitution du 4 octobre 1958 « les mots « à condition d'y avoir été autorisées par l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation » figurant au premier alinéa et le huitième alinéa de l'article L. 131-5 du code de l'éducation, qui ne méconnaissent pas non plus le droit au respect de la vie privée ni aucune autre exigence constitutionnelle » (paragraphe 79).

Au soutien de sa décision, il a notamment jugé qu’en « prévoyant que « L'instruction primaire est obligatoire … elle peut être donnée soit dans les établissements d'instruction primaire ou secondaire, soit dans les écoles publiques ou libres, soit dans les familles, par le père de famille lui-même ou par toute personne qu'il aura choisie », l'article 4 de la loi du 28 mars 1882 mentionnée ci-dessus n'a fait de l'instruction en famille qu'une modalité de mise en œuvre de l'instruction obligatoire. Il n'a ainsi pas fait de l'instruction en famille une composante du principe fondamental reconnu par les lois de la République de la liberté de l'enseignement » (paragraphe 72).

Les dispositions règlementaires d’application des règles introduites par l’article 49 de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République ont été édictées par le décret n° 2022-182 du 15 février 2022 relatif aux modalités de délivrance de l'autorisation d'instruction dans la famille, le décret n° 2022-183 du 15 février 2022 relatif à la commission devant laquelle sont formés les recours administratifs préalables obligatoires exercés contre les décisions de refus d'autorisation d'instruction dans la famille, et le décret n° 2022-849 du 2 juin 2022 modifiant l'article D. 131-11-10 du code de l'éducation.

Plusieurs requérants l’ayant saisi de recours pour excès de pouvoir contre ces trois décrets, le Conseil d’Etat a joint les requêtes et y a statué par un arrêt du 13 décembre 2022 (n° 462274, 463175, 463177, 463210, 463212, 463320, 466467, 468228, à mentionner aux tables du recueil Lebon), en même temps qu’il s’est prononcé, par deux autres arrêts du 13 décembre 2022 (n° 467550 et 466623, à mentionner également aux tables du recueil Lebon), sur l’appréciation, sur des points précis, des conditions de délivrance de l'autorisation d'instruction dans la famille, en référé-suspension.

Dans l’affaire n° 462274 et autres, il a relevé que, « pour la mise en œuvre (des) dispositions de l’ article L. 131-5 du code de l’éducation dont il résulte que les enfants soumis à l'obligation scolaire sont, en principe, instruits dans un établissement ou école d'enseignement, il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à ce que l'instruction d'un enfant dans la famille soit, à titre dérogatoire, autorisée, de rechercher, au vu de la situation de cet enfant, quels sont les avantages et les inconvénients pour lui de son instruction, d'une part dans un établissement ou école d'enseignement, d'autre part, dans la famille selon les modalités exposées par la demande et, à l'issue de cet examen, de retenir la forme d'instruction la plus conforme à son intérêt. »

S’agissant du décret n° 2022-182 du 15 février 2022 relatif aux modalités de délivrance de l'autorisation d'instruction dans la famille, le Conseil d’Etat a d’abord considéré, « en ce qui concerne le principe du régime d'autorisation de l'instruction dans la famille », que « l'article L. 131-5 du code de l'éducation, en ce qu'il prévoit que l'instruction dans la famille constitue une modalité dérogatoire de mise en œuvre de l'instruction obligatoire et qu'elle est soumise à un régime d'autorisation préalable, ne méconnaît, par lui-même, ni le droit à l'instruction, ni le droit des parents à l'instruction de leurs enfants conformément à leurs convictions religieuses et philosophiques, tels qu'ils sont garantis par les stipulations précitées de l'article 2 du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales », et que ledit décret ne fait donc pas application « de dispositions législatives contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales » et qu’il ne saurait être soutenu qu’il aurait « lui-même été pris en violation de ces stipulations, dès lors qu'il se borne à préciser les modalités de mise en œuvre du régime d'autorisation institué par le législateur » (arrêt n° 462274 du 13 décembre 2022).

Il avait d’ailleurs été jugé par la Cour européenne des droits de l’homme que le grief tiré du refus d’autoriser les parents à éduquer leurs enfants chez eux devait être rejeté, au regard de l’article 2 du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (« Nul ne peut se voir refuser le droit à l'instruction. L'Etat, dans l'exercice des fonctions qu'il assumera dans le domaine de l'éducation et de l'enseignement, respectera le droit des parents d'assurer cette éducation et cet enseignement conformément à leurs convictions religieuses et philosophiques »), comme étant manifestement mal fondé, et, partant, irrecevable, par sa décision Konrad c. Allemagne du 11 septembre 2006, n° 35504/03, paragraphe 1 (cf. CEDH, 10 janvier 2019, Wunderlich c. Allemagne, n° 18925/15, paragraphe 42).

Pour le reste, l’ensemble des moyens qu'invoquaient les requérants contre le décret n° 2022-182 du 15 février 2022 relatif aux modalités de délivrance de l'autorisation d'instruction dans la famille, a été écarté par le Conseil d’Etat, qui a ainsi jugé :

  • sur « la période pour présenter les demandes d'autorisation », que « la fixation de la période mentionnée au point précédent pour solliciter une dérogation à l'instruction dans un établissement ou école d'enseignement, qui relève des modalités de délivrance de l'autorisation d'instruction dans la famille que le pouvoir réglementaire était compétent pour édicter, est cohérente avec le calendrier d'inscription des enfants dans ces établissements et permet que les parents souhaitant instruire leur enfant dans la famille aient, en principe, reçu une réponse définitive à leurs demandes d'autorisation avant la rentrée scolaire. En outre, ce calendrier n'est pas manifestement inapproprié aux cas de demandes présentées pour des motifs liés à la pratique d'activités sportives ou artistiques intensives ou pour une situation propre à l'enfant, dès lors que ces deux motifs de demande correspondent à des situations prévisibles. Au demeurant, il est toujours loisible à l'autorité administrative d'examiner, à titre gracieux, une demande formulée hors délai » ;
  • sur « les justificatifs du domicile et des identités », que « (les) personnes sans domicile stable (peuvent) élire domicile auprès d'un centre communal ou intercommunal d'action sociale ou auprès d'un organisme agréé à cet effet et (…) se voir remettre une attestation d'élection de domicile » et qu’il est permis « au demandeur de justifier de son domicile, de son identité et de l'identité de l'enfant par tout document probant, l'autorité compétente portant le cas échéant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, l'appréciation qui lui revient sur l'authenticité et la valeur probante des pièces produites » ;
  • sur les « demandes d'autorisation motivées par l'état de santé de l'enfant ou sa situation de handicap », que les dispositions réglementaires en vertu desquelles le médecin de l'éducation nationale rend, en tenant compte du certificat médical relatif à l’état de santé ou au handicap de l’enfant, un avis sur la demande d'instruction dans la famille au vu de l'état de santé ou de la situation de handicap de l'enfant, ne sont pas entachées d’imprécision ;
  • sur « les demandes d'autorisation motivées par la pratique d'activités sportives ou artistiques intensives », que le pouvoir réglementaire avait pu exiger que « que soient produits, à l'appui des demandes de dérogation, tous documents utiles permettant de justifier de la réalité et de l'intensité de la pratique sportive ou artistique de l'enfant, pour l'année scolaire en cours et, autant que de possible, pour l'année scolaire à venir, afin d'établir qu'elle n'est pas compatible avec son instruction dans un établissement d'enseignement » ;
  • sur « les demandes d'autorisation motivées par l'itinérance en France ou l'éloignement géographique d'un établissement scolaire public », que le « demandeur (peut) justifier le motif de sa demande par tout document utile, l'autorité compétente portant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, l'appréciation qui lui revient sur la valeur probante des pièces produites », si bien qu’aucune imprécision ou erreur manifeste d’appréciation ne pouvait être reprochée aux dispositions réglementaires en cause ;
  • sur « les demandes d'autorisation motivées par la situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif », que la réglementation édictée répond aux exigences de l’article L. 131-5 du code de l'éducation et de la réserve faite au paragraphe 76 de la décision n° 2021-823 DC du 13 août 2021 du Conseil constitutionnel, dès lors que :
    • l’exigence réglementaire « que la présentation écrite du projet éducatif comporterait notamment des éléments sur la démarche et les méthodes pédagogiques mises en œuvre et sur l'organisation du temps de l'enfant » tend bien à ce que « l'autorité administrative s'assure que le projet d'instruction dans la famille comporte les éléments essentiels de l'enseignement et de la pédagogie adaptés aux capacités et au rythme d'apprentissage de l'enfant » ;
    • celle de joindre à la demande « toutes pièces utiles justifiant de la disponibilité de (la) personne (en charge d'instruire l'enfant) » vise à satisfaire l’exigence légale de justification « de la capacité de la ou des personnes chargées d'instruire l'enfant à assurer l'instruction en famille », « l’autorité compétente portant, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, l'appréciation qui lui revient sur la valeur probante des pièces produites » ;
    • « il appartenait au pouvoir réglementaire de déterminer les modalités de délivrance de l'autorisation d'instruction dans la famille afin que l'autorité administrative s'assure que la personne chargée de l'instruction de l'enfant est en mesure de permettre à l'enfant d'acquérir le socle commun de connaissances, de compétences et de culture défini à l'article L. 122-1-1 du code de l'éducation au regard des objectifs de connaissances et de compétences attendues à la fin de chaque cycle d'enseignement de la scolarité obligatoire et que ses décisions soient fondées sur des critères excluant toute discrimination de quelque nature que ce soit. La nécessité de produire une copie du diplôme du baccalauréat ou de son équivalent à l'appui d'une demande d'autorisation de l'instruction dans la famille est de nature à établir que la personne chargée de l'instruction de l'enfant est effectivement en mesure de lui permettre d'acquérir ce socle commun et à éviter tout risque de discrimination dans l'examen des demandes d'autorisation, (…) le respect de cette exigence ne (s'appliquant) qu'aux demandes formulées pour le motif tiré de l'existence d'une situation propre à l'enfant » ;
    • « la nécessité de produire un engagement d'assurer l'instruction dans la famille majoritairement en langue française est prévue par les dispositions de l'article L. 131-5 du code de l'éducation » ;
  • sur « le délai fixé pour la réception des pièces et informations manquantes », que « le délai maximum de quinze jours pour produire d'éventuelles pièces manquantes à l'appui d'une demande d'autorisation adressée entre le 1er mars et le 31 mai inclus précédant l'année scolaire au titre de laquelle cette demande est formulée, n'est pas manifestement insuffisant, eu égard à la nécessité d'examiner cette demande dans un délai compatible avec la rentrée scolaire » ;
  • sur « l'instruction dans la famille en cas de harcèlement », que la disposition réglementaire prévoyant que « le directeur de l'établissement (remette) aux personnes responsables de l'enfant, lorsqu'elles s'orientent vers une demande d'instruction dans la famille de l'enfant, un avis circonstancié sur ce projet et que la demande d'autorisation comporte, outre les documents normalement requis, cet avis ainsi que tout document utile de nature à établir que l'intégrité physique ou morale de l'enfant est menacée », n’est pas illégale, dès lors que « l'avis du directeur d'établissement a pour seul objet de matérialiser la concertation entre l'équipe éducative et les parents et l'existence de menaces sur l'intégrité physique ou morale de l'enfant, les parents pouvant en outre produire à l'appui de leur demande d'autres documents et pièces utiles susceptibles d'établir l'existence de ces menaces » ;
  • sur « les formalités incombant aux personnes responsables de l'enfant en cas de changement de résidence », que l’exigence réglementaire faite, dans un tel cas, aux « personnes responsables de l'enfant ayant reçu l'autorisation prévue à l'article L. 131-5 du (…) code (de l’éducation), (d’en informer) dans les huit jours le directeur académique des services de l'éducation nationale qui a délivré l'autorisation, lequel en informe les maires des communes concernées, (vise à) assurer le suivi et le contrôle des enfants soumis à l'obligation scolaire (et) permet la mise à jour de la liste scolaire établie par le maire en application de l'article R. 131-3 du code de l'éducation, (et n’est ainsi) pas (entachée) d'erreur manifeste d'appréciation » ;
  • sur « l'inscription des élèves auprès d'un organisme délivrant un enseignement à distance », qu’il ressort des dispositions des articles L. 131-2 et L. 131-10 du code de l'éducation « qu’un élève inscrit auprès d'un établissement d'enseignement à distance est considéré comme recevant l'instruction dans la famille » et que le pouvoir réglementaire a prévu « que la délivrance d'une autorisation d'instruire l'enfant dans la famille pour les motifs mentionnés aux 1° à 3° de l'article L. 131-5 vaut avis favorable du directeur académique des services de l'éducation nationale pour l'inscription au Centre national d'enseignement à distance, l'avis du directeur académique étant requis pour toute inscription au Centre national d'enseignement à distance d'un élève relevant de l'instruction obligatoire ».

Le Conseil d’Etat a également rejeté les recours contre le décret n° 2022-183 du 15 février 2022 relatif à la commission devant laquelle sont formés les recours administratifs préalables obligatoires exercés contre les décisions de refus d'autorisation d'instruction dans la famille, et le décret n° 2022-849 du 2 juin 2022 modifiant l'article D. 131-11-10 du code de l'éducation, à l’exception de la version de cet article (« Toute décision de refus d'autorisation d'instruction dans la famille peut être contestée dans un délai de huit jours à compter de sa notification écrite par les personnes responsables de l'enfant auprès d'une commission présidée par le recteur d'académie ») initialement prévue par le décret n° 2022-183 du 15 février 2022, en tant qu’il fixait à huit jours le délai ainsi prévu.

L’exécution du article D. 131-11-10 du code de l'éducation avait d’ailleurs été suspendue, en tant qu'il fixe à huit jours le délai à compter de la notification écrite de la décision de refus d'autorisation d'instruction dans la famille pour saisir la commission devant laquelle sont formés les recours administratifs préalables obligatoires contre ces décisions, par ordonnance du juge des référés du Conseil d’Etat du 16 mai 2022 (n° 463123), à la suite de laquelle le décret n° 2022-849 du 2 juin 2022 avait modifié l'article D. 131-11-10 du code de l'éducation et porté ce délai à quinze jours à compter de la notification écrite du refus aux personnes responsables de l'enfant.

L’arrêt n° 462274 du 13 décembre 2022 a jugé que la fixation à huit jours du délai d’exercice du recours administratif préalable ainsi prévu « (méconnaissait  le) droit à un recours effectif, eu égard à (sa) brièveté (…), sans que (celle-ci) n'apparaisse, en l'espèce, comme justifiée par les contraintes de la procédure en cause, alors que, par ailleurs, la commission dispose d'un délai d'un mois pour se prononcer sur leur recours et d'un délai de cinq jours pour leur notifier sa décision », tandis que le délai de quinze jours imposé, pour son exercice, par le décret n° 2022-849 du 2 juin 2022, lui a paru conforme à ce droit, « eu égard, d'une part, à l'intérêt tenant à ce que le délai pour saisir la commission ne soit pas d'une durée trop importante pour éviter qu'il soit statué trop tard, au regard de la date de la rentrée scolaire, sur la demande d'autorisation d'instruction dans la famille, et d'autre part, à la circonstance que l'instruction du recours administratif préalable obligatoire ne fait pas obstacle à l'engagement d'une procédure de référé pour contester la décision de refus d'autorisation d'instruction dans la famille ».

Les deux autres arrêts rendus par le Conseil d’Etat le 13 décembre 2022 (n° 467550 et 466623) lui ont permis de préciser, sur des points particuliers, la mise en œuvre du nouveau régime d’autorisation administrative de l’instruction en famille institué par l’article 49 de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République et ses modalités réglementaires d’application fixées par le  décret n° 2022-182.

Ils ont jugé de pourvois en cassation du ministre de l’éducation contre des ordonnances de juges des référés de tribunaux administratifs ayant suspendu l'exécution de décision de commissions académiques et enjoint au recteur d'académie territorialement compétent de délivrer à des parents des autorisations d'instruire leur enfant en famille à titre provisoire.

L’affaire n° 467550 a amené le Conseil d’Etat à préciser l’application du nouveau régime dans le cas « d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif », prévu par le 4° de la quatrième phrase de l’article L. 131-5 du code de l’éducation.

Il y rappelle que les dispositions en cause, « telles qu'elles ont été interprétées par la décision n° 2021-823 DC du Conseil constitutionnel du 13 août 2021, impliquent que l'autorité administrative, saisie d'une telle demande, contrôle que cette demande expose de manière étayée la situation propre à cet enfant motivant, dans son intérêt, le projet d'instruction dans la famille et qu'il est justifié, d'une part, que le projet éducatif comporte les éléments essentiels de l'enseignement et de la pédagogie adaptés aux capacités et au rythme d'apprentissage de cet enfant, d'autre part, de la capacité des personnes chargées de l'instruction de l'enfant à lui permettre d'acquérir le socle commun de connaissances, de compétences et de culture défini à l'article L. 122-1-1 du code de l'éducation au regard des objectifs de connaissances et de compétences attendues à la fin de chaque cycle d'enseignement de la scolarité obligatoire ».

Or, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse avait considéré, dans une ordonnance du 26 août 2022, « pour juger que le moyen tiré de l'erreur de droit entachant le refus d'instruction en famille contesté était de nature à créer un doute sérieux sur sa légalité, que l'existence d'une situation propre à l'enfant motivant un projet d'instruction dans la famille n'est pas au nombre des éléments que l'autorité administrative doit contrôler avant de se prononcer sur une demande d'autorisation d'instruction en famille fondée sur un tel motif », l’entachant ainsi d’une erreur de droit.

Ayant annulé cette ordonnance, le Conseil d’Etat a rejeté la demande de référé présentée par les parents requérants devant le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse.

L’affaire n° 466623 concernait le cas de la justification de l’autorisation dérogatoire d’instruction en famille au motif de l’état de santé de l’enfant, envisagé par le 1° de la quatrième phrase de l’article L. 131-5 du code de l’éducation.

Comme dans l’affaire n° 462274 et autres, le Conseil d’Etat a relevé que, « pour la mise en œuvre (des) dispositions de l’ article L. 131-5 du code de l’éducation dont il résulte que les enfants soumis à l'obligation scolaire sont, en principe, instruits dans un établissement ou école d'enseignement, il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à ce que l'instruction d'un enfant dans la famille soit, à titre dérogatoire, autorisée, de rechercher, au vu de la situation de cet enfant, quels sont les avantages et les inconvénients pour lui de son instruction, d'une part dans un établissement ou école d'enseignement, d'autre part, dans la famille selon les modalités exposées par la demande et, à l'issue de cet examen, de retenir la forme d'instruction la plus conforme à son intérêt. »

Il cite ensuite l'article R. 131-11-2 du code de l'éducation, dans sa rédaction issue du décret du 15 février 2022 relatif aux modalités de délivrance de l'autorisation d'instruction dans la famille (« Lorsque la demande d'autorisation est motivée par l'état de santé de l'enfant, elle comprend un certificat médical de moins d'un an sous pli fermé attestant de la pathologie de l'enfant. / Lorsque la demande d'autorisation est motivée par la situation de handicap de l'enfant, elle comprend le certificat médical prévu par l'article R. 146-26 du code de l'action sociale et des familles sous pli fermé ou les décisions relatives à l'instruction de l'enfant de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées. / Dans les cas prévus aux deux alinéas précédents, le directeur académique des services de l'éducation nationale transmet le certificat médical sous pli fermé au médecin de l'éducation nationale. Celui-ci rend un avis sur cette demande. / Une autorisation justifiée par l'état de santé de l'enfant ou son handicap peut être accordée pour une durée maximale de trois années scolaires »).

En conséquence, il juge résulter « de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, régulièrement saisie d'une demande en ce sens, d'autoriser l'instruction d'un enfant dans sa famille lorsqu'il est établi que son état de santé rend impossible sa scolarisation dans un établissement d'enseignement public ou privé ou lorsque l'instruction dans sa famille est, en raison de cet état de santé, la plus conforme à son intérêt ».

Par suite, le juge des référés du tribunal administratif de Dijon ayant estimé que le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entachée la décision refusant l'instruction dans sa famille de l’enfant concerné était de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de cette décision, en se fondant sur ce que les dispositions législatives et réglementaires encadrant la délivrance d'une autorisation d'instruction en famille en raison de l'état de santé de l'enfant ne limitent pas la délivrance d'une telle autorisation au seul cas où l'état de santé de l'enfant fait obstacle à toute scolarisation, le Conseil d’Etat a considéré qu’eu égard à son office, il avait n'a pas commis d'erreur de droit, si bien que le pourvoi du ministre de l'éducation nationale contre son ordonnance a été rejeté.

Par ses arrêts du 13 décembre 2022, le Conseil d’Etat a ainsi posé les « premiers jalons pour l’interprétation du régime d’autorisation administrative de l’instruction en famille institué par l’article 49 de la loi du 4 août 2021 confortant les principes de la République », suivant les mots de son rapporteur public dans les affaires n° 462274 et autres, et qui, dans les affaires n° 466623 et 467550, soulignait également que « les décisions rejetant les demandes d’instruction en familles prises en vue de cette rentrée ont donné lieu à un abondant contentieux en référé-suspension puisque près de 250 ordonnances de référé ont été rendues  pendant l’été. »

Le volume de ce contentieux pourrait donc amener la jurisprudence à prendre position sur des points qui n’auraient pas encore été tranchés par ces premiers arrêts.