Afin de lutter contre les bruits de voisinage ayant pour origine une activité professionnelle, les justiciables dispose de deux fondements juridiques :

 

1°) Le dépassement des normes réglementaires posées par l’article R. 1334-33 du Code de la santé publique

Pour les activités professionnelles (hors activités de chantiers qui sont réglementées par ailleurs), l'émergence globale, dans le cadre de nuisances engendrées par les équipements des activités professionnelles du bruit perçu par autrui ne doit pas être supérieure à 5 décibels en période diurne (de 7 heures à 22 heures) et de 3 dB en période nocturne (de 22 heures à 7 heures), valeurs auxquelles s'ajoute un terme correctif en dB fonction de la durée cumulée d'apparition du bruit particulier. ​

Le dépassement de ces seuils constitue un tapage diurne ou nocturne pénalement sanctionné par une contravention de la 5ème classe correspondant à une amende pouvant atteindre 1 500 € pour une personne physique et 7 500 € s’agissant d’une personne morale.

 

2°) Le trouble anormal de voisinage

Il s'agit d'une théorie jurisprudentielle qui permet d'obtenir sur le terrain civil, la condamnation des responsables du trouble à la réalisation de travaux et au versement de dommages et intérêts aux victimes. La grande originalité de l'action entreprise devant le Juge civil, réside dans la circonstance que le voisin auteur du trouble, ne peut invoquer ni l'absence de faute, ni l'exercice d'une autorisation.

 

Ce qu'il faut absolument admettre, c'est que ces deux notions sont indépendantes, en ce sens qu'un trouble anormal de voisinage peut tout à fait être reconnu même si les valeurs en matière de bruit précisées précédemment ne sont pas dépassées.

La Cour de cassation a précisé récemment que la réciproque était également vraie, savoir que le dépassement des valeurs admissibles en matière de bruit ne constitue pas à lui seul un trouble anormal de voisinage. (Civ. 2,. 24 mars 2016 - n° 15-13.306)

Est-ce à dire que dans un cas de non-respect des normes, toute reconnaissance d’un trouble anormal de voisinage est impossible ? Non, mais il appartiendra au demandeur de rapporter la preuve que les conditions du trouble du voisinage sont réunies (relation de voisinage – anormalité du bruit – préjudice – lien de causalité). 

 

a. La condition du voisinage

Il doit exister une certaine proximité géographique entre l'origine du bruit et son récepteur. La notion de voisinage aura bien entendu une influence sur l’appréciation que fera le juge du caractère normal ou anormal du bruit. Le voisin s'entend au sens large du terme. Le promoteur réalisant par exemple la construction « nécessairement » bruyante d'un immeuble à proximité demeure à titre d’exemple un voisin occasionnel.

 

 b. La condition de l’anormalité du bruit

Les tribunaux considèrent comme anormal non pas le dépassement le dépassement des valeurs admissibles en matière de bruit posées par l’article R. 1334-33 du Code de la santé publique » mais le fait de provoquer un « inconvénient excédant la mesure des obligations ordinaires de voisinage », c’est-à-dire un inconvénient qui dépasse celui qu’on est normalement appelé à supporter, de la part de ses voisins, dans un lieu considéré.

Le bruit peut être permanent (habituel ou répété) ou limité. Il doit dans ce dernier cas durer tout de même suffisamment longtemps pour constituer un véritable trouble du voisinage. A titre d'exemple, le trouble causé par les aboiements d’un chien ne sera retenu que si ces aboiements sont ininterrompus pendant une longue période.

Il importe peu en revanche que le bruit soit émis de jour ou de nuit, cependant le bruit nocturne sera plus facilement considéré comme « inconvénient anormal de voisinage » que le bruit diurne.

Le juge ne se contentera donc pas de la preuve du bruit incriminé. Il recherchera si ce bruit est cause d’un inconvénient excédant les obligations normales du voisinage. Ainsi, apporter la preuve que le bruit dépasse les seuils réglementaires ne suffit pas.

 

c. - La condition du préjudice

Un bruit anormal de voisinage qui ne déboucherait sur aucun préjudice ne saurait être un trouble, au sens de la jurisprudence, susceptible d’être arrêté et d’être indemnisé. Le préjudice doit être personnel et actuel et pas seulement éventuel.

La difficulté vient du fait que bien souvent on confond le préjudice avec le caractère anormal du bruit alors que ces deux notions sont également indépendantes. Si la confusion existe c’est que le fait d’avoir subi un bruit anormal suppose presque nécessairement un préjudice.

 

d. - la condition du lien de causalité entre le trouble anormal et le préjudice

Il appartient au demandeur de faire la preuve du lien de causalité entre ce trouble et le préjudice subi. Il s’agit là d’une règle classique du droit de la responsabilité.

 

En conclusion, la notion du « trouble anormal de voisinage » est appréciée librement par le juge en dehors de tout texte et de toute intensité précise de bruit au regard des normes applicables.