Mon cabinet est fréquemment consulté pour des troubles résultant du comportement inacceptable d'un locataire et/ou de son activité.
On peut citer des dégâts des eaux non réglés, des nuisances sonores et olfactives résultant d'une activité commerciale, la constatation d'activités illicites dans l'immeuble (trafic de stupéfiants et prostitution), voire des cas pathologiques type syndrome de Diogène.
Dans cette hypothèse, comment la copropriété et ses membres doivent agir ?
La première chose à faire sera de mettre en demeure le copropriétaire-bailleur d’avoir à régler la situation sans délai, et si besoin, en agissant sur le terrain de la résiliation du contrat de bail.
Trois textes seront à lui rappeler :
L’article 1242 du Code civil qui dispose : « On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde ».
L’article 9 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 qui précise : « Chaque copropriétaire… use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l’immeuble ».
Et enfin, le Règlement de copropriété qui contiendra généralement une clause de style indiquant qu’un propriétaire ou occupant ne devra causer le moindre trouble de jouissance diurne ou nocturne par le bruit, les trépidations, les odeurs, la chaleur, les radiations, ou troubles autres causes, et que l'ordre, la propriété, la salubrité et la sécurité devront toujours être intégralement respectés et sauvegardés.
La combinaison de ces dispositions fait que le copropriétaire-bailleur est de plein droit responsable des dommages causés du fait de la violation par le locataire du règlement de copropriété, et ce comme s'il avait contrevenu personnellement à celui-ci, et il a notamment été jugé que :
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Le copropriétaire bailleur répond des infractions commises au règlement de copropriété par son locataire et ce, même s'il l'a mis en demeure de respecter ses obligations contractuelles : (CA Paris, 23e ch. B, 21 oct. 2009, RG 07/21162 : JurisData n° 2009-380012)
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Le copropriétaire est responsable des dommages causés aux parties communes par son locataire : (CA Lyon, 23 févr. 2000, n° 1998/05162 : JurisData n° 2000- 126251 ; CA Paris, 4 mars 2005, n° 04/16445 : JurisData n° 2005-271956)
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Dans ses rapports avec le Syndicat des copropriétaires et/ou d'autres copropriétaires, le copropriétaire bailleur est de plein droit responsable des infractions au règlement de copropriété commises par son locataire : (CA Paris, pôle 4, 2e ch., 3 avr. 2013, n°10/22484, Full Scooter c/ Rougier : JurisData n° 2013-006446 ; CA Toulouse, 1re ch., sect. 1, 8 mars 1999, n° 97/05178 : JurisData n°1999-040295).
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Le Syndicat des copropriétaires est recevable à agir contre l'occupant des parties privatives auteur des nuisances sur le fondement délictuel et contre le copropriétaire bailleur tenu par le règlement de copropriété. (CA Paris, 23e ch., sect. B, 29 nov. 2007, n° 07/12503 : JurisData : 2007-349756)
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Le copropriétaire bailleur doit répondre du trouble anormal causé au syndicat des copropriétaires et aux autres copropriétaires par les agissements de son locataire (Cour d'appel, Paris, Pôle 4, chambre 5, 6 Octobre 2010 - n° 07/18798).
Le copropriétaire-bailleur doit donc veiller à la bonne exécution du bail par ses locataires et à leur observation du Règlement de copropriété, et s’il ne le fait pas, et à défaut d'action de sa part, la jurisprudence rendue sous le visa de l’article 1341-1 du Code civil reconnait au Syndicat des copropriétaires de pouvoir agir en lieu et place par la voie de l’action oblique pour mettre en œuvre les moyens de droit en vue de faire cesser les troubles.
En ce sens, il a été jugé que :
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Le Syndicat des copropriétaires avait, en cas de carence du copropriétaire bailleur, le droit d'exercer l'action en résiliation du bail, dès lors que le locataire contrevient aux obligations découlant de celui-ci et que ses agissements, qui causent un préjudice aux autres copropriétaires, sont en outre contraires au règlement de copropriété. (Cour de cassation, Chambre civile 3, 14 novembre 1985 - n° 84-17.577 ; Cour de cassation, Chambre civile 3, 22 Juin 2005 - n° 04-12.540 ; Cour d'appel, Versailles, 4e chambre, 7 Avril 2014 - n° 12/05379)
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Le Syndicat des copropriétaires est bien fondé à exercer l'action oblique en résiliation du bail au lieu et place du bailleur qui malgré les mises en demeures successives refuse de mettre fin à l'infraction. (Cour d'appel, AIX EN PROVENCE, Chambre civile 4, section A, 31 Janvier 2002 - n° 97/09103)
Si l'action de la copropriété est acquise, qu'en est-il pour les copropriétaires ?
Sur ce point la question a longtemps fait débat.
Elle semble désormais réglée, la Cour de Cassation ayant récemment décidé dans arrêt publié au bulletin que tout copropriétaire peut également, par la voie de l’action oblique, exercer les droits et actions du copropriétaire-bailleur pour obtenir la résiliation d’un bail lorsque le preneur méconnaît les stipulations du règlement de copropriété contenues dans celui-ci. (Cass. 3 e civ., 8 avr. 2021, n° 20-18.327, Publié au bulletin)
Cette évolution est à saluer, puisqu'elle permettra souvent aux copropriétaires-victimes d'agir plus rapidement que leur copropriété, laquelle devra d'abord obtenir une habilitation à agir en justice de son syndic.
Il restera néanmoins à craindre que cette action ait moins d'impact que celle de la copropriété. En effet, l'appréciation du trouble relève de l'appréciation souveraine du juge du fond, lequel sera d'évidence plus facilement convaincu lorsque c'est l'ensemble de la copropriété qui en fait état.
En tout état de cause, le cabinet RHA se tient à la disposition des copropriétés et de leurs membres pour vous apporter son concours à la résolution de ce type de litige.
Romain HAIRON
Avocat
Tél : 01 84 60 99 01
Email : contact@hairon-avocat.com
Site : www.hairon-avocat.com
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