Le bail à métayage est un contrat agricole ancien et spécifique, encore en usage dans de nombreuses régions de France. Il diffère du bail à ferme en ce qu'il repose sur un partage non seulement des produits, mais aussi des charges liées à l'exploitation agricole entre le bailleur et le métayer. Ce partage varie selon les clauses du bail, mais respecte des principes généraux posés par le Code rural. Cet article propose une analyse approfondie des dispositions légales et des pratiques liées au partage des frais dans le cadre d'un bail à métayage, en citant à titre d'exemple le bail type du département du Var pour illustrer certaines dispositions pratiques.

1. Partage des Produits et des Charges dans le Métayage

a. Répartition des Produits

En vertu de l'article L. 417-3 du Code rural, le principe du tiercement s'applique généralement à la répartition des produits issus de l'exploitation :

  • Le bailleur reçoit un tiers des produits ;
  • Le métayer (ou preneur) en reçoit les deux autres tiers.

Cette règle de partage s’applique à l’ensemble des produits de l’exploitation, qu'il s'agisse de produits agricoles (récoltes, bétail) ou d'autres revenus issus de l'activité agricole. Ce principe est fondamental dans les contrats de métayage et peut varier légèrement en fonction des régions ou des spécificités locales.

b. Répartition des Dépenses

Le partage des dépenses suit également le principe du tiercement pour les frais communs d'exploitation, bien que certaines dépenses restent entièrement à la charge de l'une ou l'autre partie.

  • À la charge du preneur (métayer) : Le preneur supporte l’essentiel des frais liés à la main-d’œuvre et à l’entretien courant de l’exploitation, tels que les réparations locatives, le remplacement de certains équipements, et l’assurance de ses biens personnels. Il est également responsable des cotisations sociales liées au personnel qu'il emploie.

  • À la charge du bailleur : Le bailleur assume les grosses réparations (conformément à l’article 606 du Code civil), les replantations, les assurances des bâtiments et les impôts fonciers. Certaines taxes, comme la cotisation pour le budget annexe des prestations sociales agricoles, peuvent être partagées entre le bailleur et le preneur.

c. Les Dépenses Communes

Certaines dépenses d’exploitation sont qualifiées de "communes" et sont partagées entre le bailleur et le preneur selon les proportions fixées pour les produits. Généralement, cela se traduit par :

  • Un tiers des dépenses à la charge du bailleur ;
  • Deux tiers à la charge du preneur.

Ces dépenses communes incluent notamment :

  • Les frais d'assurance des récoltes ou du bétail ;
  • L'achat de produits phytosanitaires, d'engrais, de semences ;
  • Les frais de réparation du matériel fourni par le bailleur ;
  • Les frais de vinification, le cas échéant, dans les coopératives viticoles.

Exemple illustratif : Bail à métayage dans le Var
Dans le Var, par exemple, le bail type prévoit un partage strictement encadré des produits et des charges. Le bailleur perçoit un tiers des produits et supporte un tiers des dépenses communes, tandis que le métayer conserve les deux autres tiers des produits et prend en charge les deux tiers des dépenses, y compris l'assurance des récoltes et les frais de vinification dans une coopérative.

2. Gestion des Comptes d’Exploitation

a. Règlement Annuel des Comptes

L'article L. 417-6 du Code rural permet à chacune des parties de demander le règlement annuel des comptes d'exploitation. Le preneur est tenu de tenir un registre des recettes et des dépenses communes, qu'il doit présenter au bailleur à la fin de chaque année culturale. Ce registre garantit la transparence dans la gestion des produits et des charges, et permet un règlement annuel des comptes basé sur les justificatifs fournis par le preneur.

Dans le bail type du Var, par exemple, cette clause est mise en avant : chaque année, les comptes sont arrêtés et réglés dans un délai de trois mois, avec la possibilité pour le bailleur de demander à tout moment les justificatifs des dépenses engagées.

b. Prescription des Actions Résultant du Bail

Les actions résultant du bail à métayage se prescrivent par cinq ans à compter de la sortie du métayer (article L. 417-7 du Code rural). Pendant la durée du bail et jusqu'à cinq ans après sa fin, les parties peuvent demander la révision ou la rectification des comptes, ce qui garantit une protection des droits des deux parties sur une période étendue.

3. Impôts, Taxes et Charges Sociales

a. Répartition des Impôts et Taxes

Les impôts sont généralement partagés selon la nature des prélèvements. Par exemple :

  • Taxe foncière : Le bailleur assume l’essentiel de la taxe foncière, mais un cinquième de cette taxe peut être mis à la charge du preneur.
  • Frais de chambre d'agriculture : Ces frais sont généralement partagés par moitié entre le bailleur et le métayer.
  • Assurances : Le paiement des primes d'assurance est réparti en fonction de celui qui supporte les risques. Par exemple, l'assurance incendie des bâtiments est à la charge exclusive du bailleur, tandis que l’assurance des récoltes peut être partagée selon les proportions des produits.

b. Charges Sociales

Lorsque le métayer est assimilé à un salarié (dans les conditions posées par l'article L. 722-21 du Code rural), les cotisations sociales sont réparties proportionnellement aux parts respectives dans les produits. Le bailleur assume les cotisations patronales, tandis que le métayer prend en charge ses propres cotisations salariales. Dans certains cas, ces cotisations sont partagées à parts égales, notamment pour les prestations familiales.

4. Privilèges et Garanties du Bailleur

Le bailleur bénéficie d'un privilège sur les meubles, les effets, les bestiaux et les récoltes appartenant au métayer, qui sert de garantie pour le paiement des sommes dues. Ce privilège, semblable à celui prévu dans un bail à ferme, permet au bailleur de recouvrer les sommes qui lui sont dues en cas de non-paiement ou de défaut d'exécution par le preneur.

Conclusion

Le bail à métayage est une formule souple et équilibrée pour les exploitations agricoles, qui repose sur un partage équitable des produits et des charges entre le bailleur et le métayer. Si les grandes lignes de ce partage sont posées par le Code rural, des adaptations locales et spécifiques peuvent s’appliquer, comme en témoigne le bail type du Var. Les clauses relatives aux comptes d'exploitation, à la répartition des dépenses et aux assurances jouent un rôle crucial dans la bonne gestion de l'exploitation, et chaque partie doit veiller à respecter ses obligations pour éviter tout litige.