La délégation de pouvoirs, outil de gestion et de gouvernance de l’entreprise très pratique, permet à un chef d’entreprise de déléguer une partie de ses pouvoirs à un délégataire (manager, responsable, directeur…), en lui transférant également la responsabilité pénale afférente sur sa tête, pour le champ de compétences concernées.

Mais pour que la délégation soit valable, opposable aux juridictions et qu’elle ait plein effet, encore faut-il que le délégataire ait la compétence et l’autorité, dispose des moyens nécessaires, mais aussi, selon l’arrêt qui nous concerne ici, que les termes de la délégation ne soient pas imprécis ni ambigus.

 

Dans cette affaire du 01/02/2017, une caisse régionale de crédit agricole avait donné (plus précisément, ici la direction) délégation de pouvoirs au directeur des ressources humaines (DRH), lui conférant la « gestion des Instances Représentatives du Personnel (Comité d'entreprise, syndicats, CHSCT, représentants du personnel …) », la « représentation dans les instances représentatives du personnel (IRP) et relations avec les IRP », l'« assistance juridique » et la « gestion du contentieux social ».

A la suite de l'élection des délégués du personnel (DP) et des membres du comité d'entreprise (CE) qui se déroulèrent en septembre et octobre 2015, au sein de cette caisse régionale, les syndicats CFTC CR PCA, Union SUD PCA et FO, qui avaient présenté une liste commune, désignèrent des délégués syndicaux titulaires ou suppléants.

Le DRH, représentant la caisse régionale, saisit par requête du 4 novembre 2015, le tribunal d'instance afin de demander l'annulation des désignations des délégués syndicaux désignés.

Le jugement le débouta de sa demande, au motif que le DRH n’avait pas le pouvoir de saisir le tribunal d’instance.

 

Question : Ici, la délégation de pouvoirs donnée au DRH, lui conférant la gestion des instances représentatives du personnel, la représentation dans ces instances représentatives du personnel, les relations avec ces dernières, la gestion du contentieux social, implique-t-elle aussi « l'organisation des élections professionnelles » et « le pouvoir de saisir le tribunal d'instance d'un litige relatif à la désignation de délégués syndicaux » ?

 

Non répond la Cour de cassation, car dans cette affaire :

En raison de l'ambiguïté des termes de la délégation de pouvoirs, les attributions dévolues au DRH étaient imprécises s'agissant de l'organisation des élections professionnelles et ne comportaient aucune mention de son éventuel pouvoir de représenter l'employeur dans les instances judiciaires.

Le tribunal d'instance en a exactement déduit que la requête présentée par le DRH en qualité de représentant de la caisse régionale était nulle.

 

Conclusion : Attention non seulement aux conditions de validité d’une délégation de pouvoirs et de responsabilité pénale, mais aussi à la rédaction de ses termes dont l’ambiguïté pourrait entraîner des conséquences désastreuses pour l’employeur.

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