L’employeur doit-il prendre en compte les indemnités d’activité partielle pour ses contributions aux budgets des CSE ?
Sujet spécifique non tranché à ce jour (au 26 mai 2020).
Rappel :
- L'ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 avait inscrit dans le code du travail que "la masse salariale brute est constituée par l'ensemble des gains et rémunérations soumis à cotisations de sécurité sociale en application des dispositions de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale (...), à l'exception des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée".
- Par deux arrêts du 7 février 2018 (16-16086 et 16-24231), la Cour de Cassation a revu intégralement sa copie sur la question de l'assiette de fixation des subventions du comité d'entreprise sur la base de la masse salariale : elle a abandonné le fondement comptable du compte 641 pour se référer à la notion de "gains et rémunérations soumis à cotisations de sécurité sociale en application de l'article L.2421 du code de la sécurité sociale" (sauf engagement plus favorable bien entendu).
Avec ces arrêts du 7 février 2018, la Cour a donc repris la même solution pour le comité d'entreprise, remplacé depuis par le CSE.
Il en a été déduit que :
- Sont comprises dans l'assiette de calcul de la subvention fonctionnement et de la contribution aux activités sociales et culturelles du CE, pour leur part assujettie aux cotisations de sécurité sociale, les indemnités de licenciement ou de départ volontaire soumises au prélèvement de cotisations sociales pour leur part dépassant deux fois le plafond annuel de cotisations sociales et pour leur totalité lorsqu'elles dépassent 10 fois ce plafond (Cass. soc. 19/12/2018 n°17-22583) ;
- Concernant le budget activités sociales et culturelles ASC, c'est l'article L.2312-83 du code du travail qui s’applique : "(...) la masse salariale brute est constituée par l'ensemble des gains et rémunérations soumis à cotisations de sécurité sociale en application des dispositions de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ou de l' article L.741-10 du code rural et de la pêche maritime, à l'exception des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée."
- Concernant le budget de fonctionnement du CSE, c'est l'article L.2315-61 du code du travail qui s’applique : "(...) la masse salariale brute est constituée par l'ensemble des gains et rémunérations soumis à cotisations de sécurité sociale en application des dispositions de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ou de l' article L. 741-10 du code rural et de la pêche maritime, à l'exception des indemnités versées à l'occasion de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée."
Il y a donc plusieurs sous questions à se poser :
- les indemnités de l'Etat perçues, dans la limite de 70% du brut, sont-elles soumises à cotisations de sécurité sociale de L.242-1 CSS ? Non, donc hors masse du budget CSE ; De plus ce ne sont pas des rémunérations supportées par l'entreprise ;
- les indemnités complémentaires versées par l'employeur, au-delà de 70% du brut, sont-elles soumises à cotisations de L.242-1 CSS ? Oui et non, car cela dépend du calendrier (ou avant, ou à compter du 1er mai 2020), mais aussi des plafonds fixés par les ordonnances, dépassés ou non, car il y a eu deux textes :
1./ D'abord l'article 11 de l’ordonnance n°2020-346 du 27 mars 2020 portant mesures d'urgence en matière d'activité partielle (modifié par Ordonnance n°2020-428 du 15 avril 2020 – art. 6) :
"Par dérogation aux dispositions du premier alinéa du 4° du II de l'article L.136-1-2 et du III de l'article L.136-8 du code de la sécurité sociale, les indemnités d'activité partielle versées aux salariés autres que ceux mentionnés à l'article 7 de la présente ordonnance, ainsi que les indemnités complémentaires versées par l'employeur en application d'un accord collectif ou d'une décision unilatérale de l'employeur sont assujetties à la contribution prévue à l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale au taux mentionné au 1° du II de l'article L. 136-8 du même code."
2./ Puis, l'article 5 de l’ordonnance n°2020-460 du 22 avril 2020 portant diverses mesures prises pour faire face à l'épidémie de covid- venu modifier l'article 11 supra :
"I.-L'article 11 de l'ordonnance n° 2020-346 du 27 mars 2020 susvisée est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l'alinéa précédent, lorsque la somme de l'indemnité légale d'activité partielle et de l'indemnité complémentaire versée par l'employeur en application d'un accord collectif ou d'une décision unilatérale est supérieure à 3,15 fois la valeur horaire du salaire minimum de croissance, la part de l'indemnité complémentaire versée au-delà de ce montant est assujettie aux contributions et cotisations sociales applicables aux revenus d'activité dans les conditions définies aux articles L.136-1-1 et L.242-1 du code de la sécurité sociale. »
II.-Le I est applicable aux indemnités relatives aux périodes d'activité à compter du 1er mai 2020."
Cela étant, un amendement dans le projet de loi « Dispositions urgentes face à l'épidémie de covid-19 » a été présenté au Sénat, le 25 mai 2020, et il explique ceci :
« Jusqu’à présent, les indemnités légales d’activité partielle n’étant pas soumises à cotisations sociales, elles ne sont pas prises en compte pour le calcul du budget du comité social et économique (CSE).
Le code du travail, aux articles L.2312-83 et l’article L.2315-61 prévoit que les budgets des CSE sont définis en fonction de la masse salariale brute de l’entreprise, qui est constituée par l'ensemble des gains et rémunérations soumis à cotisations de sécurité sociale en application des dispositions de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale ou de l'article L.741-10 du code rural et de la pêche maritime.
La question du recours massif à l’activité partielle lors de la période de la crise sanitaire que nous traversons, a donc un impact non négligeable sur le calcul du budget des CSE.
Cet amendement vise donc à modifier les articles L.2312-83 et L.2315-61 du code de travail afin que les indemnités d’activités partielles soient prises en compte.
Ces modifications prennent effet à compter de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, et ce jusqu’à décembre 2020. »
http://www.senat.fr/amendements/2019-2020/454/Amdt_257.html
Il faut donc surveiller la suite donnée à cet amendement.
De plus, le lecteur notera que cet amendement ne concerne que les indemnités légales d’activité partielle, et non pas les indemnités conventionnelles.
Stéphane VACCA
Avocat au barreau de Paris
22, avenue de l'Observatoire - 75014 Paris
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fax.: +33.(0)1.45.38.57.10
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