Aux termes de l'article L. 1321-1 du code du travail : " Le règlement intérieur est un document écrit par lequel l'employeur fixe exclusivement : / 1° Les mesures d'application de la réglementation en matière de santé et de sécurité dans l'entreprise ou l'établissement, notamment les instructions prévues à l'article L. 4122-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 1321-3 de ce code : " Le règlement intérieur ne peut contenir : (...) 2° Des dispositions apportant aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 4121-1 du même code : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ". Aux termes de l'article R. 4228-20 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable : " Aucune boisson alcoolisée autre que le vin, la bière, le cidre et le poiré n'est autorisée sur le lieu de travail ". Enfin, aux termes de l'article R. 4228-21 de ce code : " Il est interdit de laisser entrer ou séjourner dans les lieux de travail des personnes en état d'ivresse ".

Il résulte de ces dispositions, d'une part, que l'employeur ne peut apporter des restrictions aux droits des salariés que si elles sont justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché. Il en résulte, d'autre part, que l'employeur, qui est tenu d'une obligation générale de prévention des risques professionnels et dont la responsabilité, y compris pénale, peut être engagée en cas d'accident, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

A ce titre, l'employeur peut, lorsque la consommation de boissons alcoolisées est susceptible de porter atteinte à la sécurité et à la santé des travailleurs, prendre des mesures, proportionnées au but recherché, limitant voire interdisant cette consommation sur le lieu de travail.

En cas de danger particulièrement élevé pour les salariés ou pour les tiers, il peut également interdire toute imprégnation alcoolique des salariés concernés.

S'il incombe ainsi à l'employeur qui estime devoir limiter voire interdire la consommation d'alcool sur le lieu de travail d'établir que cette restriction est justifiée et proportionnée dans les conditions mentionnées au point précédent, cette exigence n'implique pas, alors qu'il lui revient de mettre en œuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 du code du travail sur le fondement des principes généraux de prévention fixés à l'article L. 4121-2 de ce code, qu'il doive être en mesure de faire état de risques qui se seraient déjà réalisés.

Par suite, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit en se fondant, pour estimer que la société requérante n'apportait pas la preuve du caractère justifié et proportionné de l'interdiction imposée aux salariés, sur le fait qu'elle ne caractérisait pas l'existence d'une situation particulière de danger faute d'éléments chiffrés sur le nombre d'accidents du travail ou de sanctions préalables liées à l'alcool sur ce site.

(CE 14/03/2022 n°434343)