Le Conseil d'Etat à été amené à traiter une question peu courante s'agissant de l'appréciation de la gravité d'une sanction pour un enseignant-chercheur. Dans la majorité des cas, le contrôle de la proportionnalité effectué par le Conseil d'Etat affecte des sanctions estimée trop lourdes. Dans l'affaire commentée, l'annulation prononcée par le Conseil d'Etat l'a été contre une sanction prononcée contre un enseignant-chercheur jugée...trop faible ! (CE, 6 avril 2016, Université Lumière Lyon II, n°389821).
La section disciplinaire de l'université Lumière de Lyon 2 avait condamné un universitaire à une exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois avec privation de la moitié de son traitement pour avoir "signé une convention avec un organisme privé de Guadeloupe au nom de l'université Lumière Lyon 2 sans avoir eu l'accord de son conseil d'administration, (...) exercé une activité rémunérée auprès de cet organisme privé sans avoir obtenu, ni même demandé, d'autorisation de cumul et (...n'avoir) pas respecté les conditions d'inscription en licence et en master des étudiants issus de cet organisme ni les conditions de délivrance de ces diplômes à ces mêmes étudiants".
Le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER), saisi en tant que juridiction d'appel des jugements rendus par les sections disciplinaires des universités, a annulé la sanction prise pour la limiter à un simple blâme, au motif "que les dysfonctionnements de l'université et les relations conflictuelles entre M. B...et le président de l'université expliquaient en partie les manquements de l'intéressé relatifs aux inscriptions des étudiants et à la délivrance des diplômes et qu'une retenue sur traitement avait déjà privé M. B...du bénéfice qu'il avait tiré de l'exercice d'une activité privée lucrative".
L'université a alors saisi le Conseil d'Etat en cassation.
Reprenant tout d'abord une jurisprudence antérieure (CE 30 décembre 2014 Bonnemaison, req. n°381245), le Conseil d'Etat a d'abord réaffirmé son considérant de principe, aux termes duquel :
"si le choix de la sanction relève de l'appréciation des juges du fond au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, il appartient au juge de cassation de vérifier que la sanction retenue n'est pas hors de proportion avec la faute commise et qu'elle a pu dès lors être légalement prise".
Puis, le Conseil d'Etat, appréciant les faits de l'espèce, a jugé que :
"5. Considérant qu'eu égard au fait que la nécessité d'obtenir une autorisation de cumul avant d'exercer une activité privée lucrative est une obligation qui s'impose à tout fonctionnaire et agent public en application de dispositions législatives établies de longue date, que le remboursement des sommes perçues sans autorisation n'a pas le caractère d'une sanction et eu égard à la gravité des manquements relevés aux obligations des enseignants-chercheurs en ce qui concerne la délivrance des diplômes, alors même que des dysfonctionnements peuvent être imputés à l'université Lumière Lyon 2, le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche, en n'infligeant à M. B...qu'une sanction du niveau le plus faible de celles susceptibles d'être infligées à un enseignant-chercheur, a retenu une sanction hors de proportion avec les fautes commises ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, sa décision doit être annulée".
La sanction du blâme étant la plus faible parmi celles susceptibles d'être infligées à un enseignant-chercheur, la réduction de quatre niveaux de l'échelle de la sanction prononcée, entre la première instance représentée par le Conseil d'administration de l'université et l'appel représentée par le CNESER, a été considérée par le Conseil d'Etat hors de proportion avec les manquements relevés.
En conclusion, le contrôle de la proportionnalité des sanctions prononcées au regard des manquements reprochés est susceptible de faire obstacle, non seulement à des sanctions trop fortes, mais également à des sanctions trop faible.
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