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Selon un arrêt rendu par le Conseil d’Etat le 3 février 2017, n°373898, tous les travaux réalisés sans permis de construire, alors que celui-ci était requis, sont exclus du champ de la prescription administrative mise en place par l’article L. 421-9 du code de l’urbanisme.

Cette article prévoit que, « lorsqu’une construction est achevée depuis plus de dix ans, le refus de permis de construire ou de déclaration de travaux ne peut être fondé sur l’irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l’urbanisme ».

Par la loi du 13 juillet 2006 portant Engagement National pour le Logement (dite ENL), le législateur avait souhaité remettre en cause la position rigoureuse adoptée par les juges du fond en vertu de la jurisprudence Thalamy, selon laquelle les juges n’admettaient la délivrance d’un permis sur une construction irrégulière que si celui-ci régularisait l’ensemble de l’immeuble (CE 9 juill. 1986, n° 51172, Mme Thalamy, Lebon p. 201).

Une prescription administrative de 10 ans a donc été instituée, codifiée à l’article L. 421-9 du code de l’urbanisme, assortie toutefois de 6 exceptions, notamment « e) Lorsque la construction a été réalisée sans permis de construire […] ».

Autrement dit, les constructions réalisées sans permis de construire ne peuvent jamais être prescrites.

C’est cette exception qui a fait l’objet, dans la décision rendue le 3 février 2017 précitée, d’une précision concernant sa portée et ses limites, liées à la réalisation de la construction sans permis de construire.

En l’espèce, l’immeuble en cause, édifié au XIXe siècle, avait été bâti avant qu’un permis ne devienne exigible. La Cour administrative d’appel de Marseille avait cependant jugé que des travaux réalisés sur cet immeuble en 1997 sans permis de construire pouvaient bénéficier de la prescription dès lors qu’ils avaient revêtu une ampleur limitée et n’avaient pas conduit à la réalisation d’une construction nouvelle.

Le Conseil d’Etat a censuré la décision, considérant qu’en présence de travaux nécessitant un permis, que ce soit à l’occasion de la construction initiale ou à l’occasion de modifications apportées à celle-ci, aucune prescription n’est envisageable qu’elle que soit l’ampleur de ces travaux.

Et le Conseil d’Etat d’en déduire que la Cour administrative d’appel a commis une erreur de droit, considérant « que peuvent bénéficier de la prescription administrative ainsi définie les travaux réalisés, depuis plus de dix ans, lors de la construction primitive ou à l’occasion des modifications apportées à celle-ci, sous réserve qu’ils n’aient pas été réalisés sans permis de construire en méconnaissance des prescriptions légales alors applicables ; qu’à la différence des travaux réalisés depuis plus de dix ans sans permis de construire, alors que ce dernier était requis, peuvent bénéficier de cette prescription ceux réalisés sans déclaration préalable ».

C’est donc à une lecture extensive des dispositions de l’article L. 421-9 du code de l’urbanisme à laquelle procède le Conseil d’Etat, puisque tous les travaux réalisés sans permis de construire, alors qu’ils y étaient soumis, sont exclus de la prescription administrative, sans qu’il y ait lieu de prendre en compte leur importance ou la circonstance qu’ils seraient à l’origine de la construction ou de modifications seulement.

Enfin, le Conseil d’Etat prend soin de préciser, par une lecture stricte des dispositions de l’article L. 421-9 du code de l’urbanisme, que les travaux réalisés depuis plus de 10 ans sans déclaration préalable bénéficient, quant à eux, de la prescription administrative.