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La procédure d’expropriation peut être mise en œuvre pour résorber l’habitat insalubre. S'agissant de cette procédure spécifique dérogatoire du droit commun de l'expropriation, le Conseil d’Etat a récemment jugé (CE 18 janv. 2017, req. n° 383374) qu’elle est susceptible d’être mise en œuvre même lorsque sont inclus dans l’opération des immeubles qui ne sont pas utilisés pour l’habitation.
Dans cette affaire, le préfet du Var avait, par arrêté, déclaré insalubre un immeuble situé dans la commune de Puget-sur-Argens et appartenant à celle-ci. Il avait par ailleurs édicté un second arrêté déclarant d’utilité publique le projet de la commune d’acquérir d’autres immeubles proches pour réaliser l’opération de résorption de l’habitat insalubre, c’est à dire sa suppression.
Des propriétaires d’une partie de l’immeuble voisin de celui qui faisait l’objet de l’arrêté d’insalubrité, mais néanmoins compris dans le périmètre de la déclaration d’utilité publique, ont demandé au juge administratif l’annulation des deux arrêtés.
Le Tribunal administratif de Toulon et la Cour administrative d’appel de Marseille ont rejeté leurs recours.
Saisi d’un pourvoi, le Conseil d’État a confirmé logiquement l’analyse de la cour, en précisant les conditions d’application de la procédure d’expropriation de l’habitat insalubre.
Dans un premier temps, le Conseil d’Etat a considéré, s’agissant de l’arrêté déclarant l’insalubrité de l’immeuble voisin (et non l’arrêté déclarant l’utilité publique), que « leur seule qualité de voisin de cet immeuble ne suffisait pas à leur conférer un intérêt donnant qualité pour agir contre » l’arrêté d’insalubrité. Cette solution n’appelle pas de remarque particulière.
Dans un second temps, les juges ont admis l’expropriation sur le fondement de la procédure mise en place par l’article 13 de la loi du 10 juillet 1970, codifié à l’article L. 511-1 du code de l’expropriation, relative à la résorption de l’habitat insalubre. La procédure d’expropriation spécifique à cet habitat permet à la puissance publique de s’approprier par voie d’expropriation, et sans enquête publique (contrairement à la procédure habituelle, de droit commun, de l’expropriation), des terrains déclarés « insalubres à titre irrémédiable » en application des articles L. 1331-25 à L. 1331-28 du code de la santé publique.
Cette disposition va plus loin en permettant l’expropriation « à titre exceptionnel, des immeubles qui ne sont ni insalubres, ni impropres à l’habitation, lorsque leur expropriation est indispensable à la démolition des immeubles insalubres ». Il s’agit d’une disposition qui permet d’assurer la cohérence et, surtout, la mise en œuvre d’un projet de démolition des immeubles insalubres.
Les requérants invoquaient, au cas d’espèce, l’illégalité de cette procédure spéciale d’expropriation dans la mesure où plusieurs lots visés n’étaient pas à usage d’habitation. Ils s’appuyaient pour cela sur une jurisprudence constante selon laquelle la disposition exceptionnelle était applicable uniquement aux immeubles affectés à l’habitation (CE 9 oct. 1996, n° 90748, Poupart et Mme Cosic).
Le Conseil d’Etat a néanmoins accepté d’appliquer la disposition législative contestée, alors même que plusieurs n’auraient pas été à usage d’habitation, considérant que « la cour n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant, d’une part, que la circonstance, à la supposer établie, que certains des lots concernés par la procédure d’expropriation ne seraient pas à usage d’habitation ne saurait faire obstacle à la mise en œuvre de la procédure d’expropriation prévue par l’article 13 de la loi du 10 juillet 1970 et, d’autre part, que l’arrêté litigieux ne méconnaissait pas le champ d’application du même article ».
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