Le Cabinet AXIOME AVOCATS a été interrogé avant le premier confinement, il l’est encore aujourd’hui concernant les contrats conclus.

En effet, bon nombre de relations contractuelles ont été mises à mal avec l’arrivée en France de la vague épidémique de coronavirus depuis mars dernier.

Les cocontractants sont-ils tenus à la poursuite du contrat ? Le cas échéant dans quelles conditions ? Quelle est la marche à suivre pour les parties ?

Le premier réflexe est de s’intéresser au contenu du contrat afin d’identifier si une clause prévoit un éventuel report des obligations pour cause d’épidémie, ou s’il est fait mention de « circonstances exceptionnelles » par exemple.

 

Il est judicieux dans un second temps de prendre attache avec le(s) cocontractant(s) dans l’optique de trouver un accord quant aux reports de certaines obligations, que ce soit sur le fondement d’une des clauses du contrat ou tout simplement dans le cadre d’une recherche de solution amiable. 

Ce n’est qu’en dernier recours qu’il faudra se tourner vers l’office du juge, si les parties peinent à trouver un accord sur les modalités de poursuite du contrat ou encore sur sa résiliation anticipée.

 

Dans ce cadre, il convient de s’interroger afin de savoir si la situation sanitaire actuelle est constitutive ou non d’un cas de force majeure, notion définie par l’alinéa 1 de l’article 1218 du code civil – applicable aux contrats conclus depuis le 1er octobre 2016 – :

« Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur ».

 

Ainsi, pour être considéré comme un cas de force majeur, l’évènement doit cumuler trois critères dont l’existence de chacun d’eux fera l’objet d’une étude attentive par le juge :

–        Il doit avoir été imprévisible au jour de la signature du contrat ;

–        Il doit échapper au contrôle de la partie qui ne peut plus exécuter ses obligations contractuelles ;

–        Il ne peut être évité dans sa réalisation ou ses effets.

Il est à noter que ni la grippe H1N1 (Besançon, 2e ch. comm., 8 janv. 2014, pourvoi n° 12/02291), ni le virus EBOLA (Paris, pôle 6, ch. 12, 17 mars 2016, n° 15/04263), ni le chikungunya (Basse-Terre, 17 déc. 2018, n° 17/00739), ni la dengue (Nancy, 1re ch. Civ., 22 nov. 2010, n°09/00003) n’ont été qualifiés de cas de force majeure.

 

Néanmoins, compte tenu du caractère tout à fait exceptionnel de la pandémie Covid-19, l’empêchement tiré de virus semble pouvoir entrer dans le champ d’application de la disposition précitée, bien qu’il ne s’agisse que de décisions d’espèce dont il ne faut pas tirer de principal général (Colmar, 6e ch., 12 mars 2020, n° 20/01098 en matière de rétention administrative ; T. com. Paris, 20 mai 2020, n° 2020016407 ; T. com. Évry, 1er juillet 2020, n° 2020R0092 en matière contractuelle ; CA Paris, pôle 1 – ch. 2, 28 juillet 2020, n° 20/06689 application d’une clause de force majeure dont la définition est plus large que la force majeure légale ; CA Douai , 23 avr. 2020 , no 20/00632 en matière de transport aérien).

 

 

Par ailleurs, l’alinéa 2 de cet article 1218 du code civil impose de s’interroger quant à la durée de l’empêchement :

–    S’il est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat ;

–        S’il est définitif, le contrat est résolu de plein droit.

Toutefois, cette qualification n’est pas aisée puisque nul ne sait si les restrictions gouvernementales ont vocation à durer et combien de temps, même s’il semblerait que la situation sanitaire exceptionnelle ne soit que temporaire.

De la même manière, le délai constitutif d’un retard justifiant la résolution du contrat est difficilement prévisible dans l’attente des premières décisions sur ce point.

 

Nous pouvons supposer que pour les nouveaux contrats conclus depuis le premier confinement, le critère d’imprévisibilité fera défaut de sorte que la force majeure ne pourra pas être retenue.

Pour les contrats conclus avant, si la crise sanitaire n’est que temporaire aux yeux du juge, le contrat sera simplement suspendu.

 

Si l’évènement constitutif de la force majeure est qualifié d’empêchement définitif, ou comme retardant trop l’exécution des obligations, le juge pourra prononcer la résolution du contrat. Cette résolution entrainera alors le remboursement de toutes les sommes qui ont pu être avancées et libèrera alors les parties de leurs obligations. En revanche, il sera impossible de solliciter des dommages et intérêts pour inexécution.

Article rédigé par Kloé Flébus pour Axiome Avocats