Même si la liberté de circulation est un principe important, pour les couples séparés qui ont des enfants tout en partageant l’exercice de l’autorité parentale, le déménagement peut engendrer des situations conflictuelles.

 

Le texte de référence est l’article 373-2 alinea 3, rappelé dans chaque jugement relative à une séparation : «  Tout changement de résidence de l’un des parents, dès lors qu’il modifie les modalités s’exercice de l’autorité parentale, doit faire l’objet d’une information préalable et en temps utile de l’autre parent. En cas de désaccord, le parent le plus diligent saisit le juge aux affaires familiales qui statut selon ce qu’exige l’intérêt de l’enfant. Le juge répartit et ajuste les frais de déplacement et ajuste en conséquence le montant de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant. »

 

La situation concrète est différente selon le mode de « garde ».

 

1/Le cas de la garde classique (un des parents a ses enfants régulièrement un week end sur deux et la moitié des vacances scolaires)

 

 a/ Dans ce cas qui concerne la majorité des parents séparés, si celui qui déménage est celui qui a la résidence habituelle des enfants, il doit être vigilent à ne pas compromettre la relation avec l’autre parent.

Il doit avertir l’autre parent de son projet et s’assurer de son accord ou en tout cas de son absence d’opposition. Pour des questions probatoires, il faudra émettre un écrit même si on préfère une information orale dans un premier temps.

A défaut d’accord, il est vivement recommandé de saisir sans tarder, et éventuellement en référé, le juge aux affaires familiales pour qu’il se prononce sur la difficulté avant même de quitter son ancien lieu de vie.

En effet, en vertu de l’article 373-2-6 du code civil, le juge peut prendre les mesures permettant de garantir la continuité et l’effectivité du maintien des liens de l’enfant avec chacun des parents.

Le parent qui ne pourrait pas voir son enfant dans des conditions équivalentes serait dans les conditions de s’opposer valablement  à ce projet et d’obtenir la résidence habituelle.

Plusieurs décisions de juges aux affaires familiales ont décidé de modifier le lieu de résidence habituel de l’enfant lorsque le parent a déménagé avec les enfants. La solution des juges est ainsi radicale et le bouleversement est très important pour le parent qui a déménagé. Il  réalise qu’il ne peut pas revenir dans l’ancienne ville pour des raisons professionnelles ou de budget et qu’il a perdu ses enfants au quotidien. Le choc peut être important d’autant qu’il ravive des tensions vécues lors de la première décision de justice et apparait comme une vengeance de celui qui n’avait pas obtenu la garde la première fois. (arrêt de référence 1ere Civ 4 juill. 2006 bull civ I n°339)

Le risque est accru lorsque le parent demandeur bénéficiait d’une plus grande présence auprès des enfants comme un droit de visite un soir de la semaine…

Bien entendu, certains parents qui ont le droit de visite et d’hébergement, tiennent à le maintenir et ne souhaitent pas la résidence habituelle. Cependant, dans ce cas, ils peuvent obtenir des compensations sous la forme de vacances plus longues ou de prise en charge différentes des frais de transport.

 

b/ Si celui qui déménage est celui qui avait un droit de visite et d’hébergement, le problème ne se pose pas du tout dans les mêmes conditions.

Si la distance implique une moindre visite, il pourra s’abstenir de les voir aussi fréquemment. Si la distance est importante et implique des voyages en train, en avion ou une longue route, le droit d’hébergement pourra être difficile pour l’enfant compte tenu de son âge et des horaires des établissements scolaires. Il va donc le plus souvent accepter de voir l’enfant moins souvent et ne pas utiliser son droit, prendre de la distance aussi dans l’éducation de l’enfant. L’autre parent s’occupera donc de fait davantage de l’enfant. Si cela ne lui convenait pas, il ne pourrait pas faire condamner l’absence de prise en charge des enfants. Il n’existe que le délit de non représentation d’enfant, pas celui de non hébergement…

Resterait un recours, minime, celui de réclamer une augmentation de la pension alimentaire éventuelle, justifiée par l’augmentation des charges. En effet, le code civil prévoit que dans ce cas, « Le juge répartit et ajuste les frais de déplacement et ajuste en conséquence le montant de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant. » (art.373-2 al 3)

 

2/ Le cas de la garde alternée

 

La garde alternée se justifie lorsque les parents sont géographiquement assez proches pour permettre à l’enfant de changer souvent de lieu de vie tout en étant scolarisé dans un même établissement scolaire.

Si l’un déménage sans mettre en cause ces conditions, il n’y a pas de difficulté. Il faudra uniquement prévenir l’autre parent de la nouvelle adresse.

Cependant, si le déménagement implique une distance importante, il faudra décider d’un nouveau mode de garde pour l’enfant. La garde alternée prendrait alors fin en tout état de cause.

Une discussion avec l’enfant s’imposera dès qu’il aurait un discernement suffisant. A défaut d’accord entre les parents, il faudra que le juge aux affaires familiales décide après avoir entendu les arguments de chaque parent.

 

Conclusion

Dans tous les cas, il est conseillé de ne pas imposer son choix de vie à l’autre parent car les juges peuvent confier les enfants, sans aucune adaptation, à l’autre parent.

 

La procédure d’appel existe mais est soumise à des délais importants.

 

Les enfants peuvent être consultés lorsqu’ils ont un âge de discernement.

 

Il est préférable à défaut d’accord immédiat, de consulter préalablement un avocat qui pourra mener à bien une négociation ou saisir la justice en référé.

 

Yaëlle Gliott - Naouri

Avocat au Barreau du Val de Marne